mercredi 31 janvier 2018

L'abus de position dominante au sens de la Loi sur la concurrence n'est pas une cause d'action civile

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

La Loi sur la concurrence prévoit certaines conséquences possibles pour l'entreprise qui abuse de sa position dominante. Une de ces conséquences n'est cependant pas l'ouverture d'un recours civil. Comme le souligne l'Honorable juge Thomas M. Davis dans l'affaire Groupe de sécurité Garda c. Corps canadien des commissionnaires (Division du Québec) (2018 QCCS 344), l'abus de position dominante n'est pas une assise valable pour un recours civil.

L'injonction est le moyen approprié pour faire respecter un pacte de préférence

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Cela fait déjà huit ans (!), nous indiquions qu'il est possible d'obtenir une injonction pour faire respecter un pacte de préférence. Nous revenons sur la question aujourd'hui alors que l'Honorable juge en chef Jacques R. Fournier applique ce même principe dans l'affaire Brasserie Labatt ltée c. Placements Sergakis inc. (2018 QCCS 292).

mardi 30 janvier 2018

Le vendeur d’un immeuble affecté de vices cachés qui fait des fausses déclarations ou omet délibérément de divulguer qu’il est affecté de tels vices ne pourra être libéré par la faillite de la dette découlant de sa conduite frauduleuse

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

L'article 178 (1)(e) de la Loi sur la faillite prévoit qu'un débiteur ne sera pas libéré de ses dettes résultant de la fraude civile ou de fausses représentations. Le champs d'application de cette disposition est plutôt vaste. Par exemple, cette disposition s'applique au débiteur qui a fait de fausses représentations - positives ou par omission - à propos de vices cachés comme l'illustre l'affaire Letarte c. Richer (2018 QCCS 377).

L'exécution en nature n'est pas appropriée lorsque l'obligation contractée est intuitu personae

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous en traitons souvent, l'exécution en nature est la règle en droit contractuel québécois. Cela ne veut pas dire pour autant qu'elle s'impose automatiquement dans toutes les situations. En effet, il existe des cas où celle-ci est impossible, comme lorsque l'obligation contractée est intuitu personae. L'Honorable juge Lukasz Granosik effectue une analyse en profondeur de la question dans Centre hospitalier de l'Université de Montréal c. Heinmüller (2018 QCCS 223).

lundi 29 janvier 2018

Rappel sur les conditions nécessaires à la responsabilité d'un tiers pour une inexécution contractuelle

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà traité dans le passé du principe voulant qu'une tierce partie puisse être tenue responsable d'une inexécution contractuelle dans certaines situations. Une des conditions de la responsabilité du tiers cependant est qu'il ait connaissance de ladite relation contractuelle. C'est ce que rappelle l'Honorable juge Stéphane Sansfaçon dans l'affaire Yale Capital Inc. c. Sofame Technologies Inc. (2018 QCCS 2313).

La partie requérante à une action collective en vertu de la Loi sur les valeurs mobilières ne peut obtenir de la communication de la preuve de la partie intimée au stade pré-autorisation du recours

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

C'est l'évidence même: il est souvent beaucoup plus facile de critiquer, que d'apprécier les éléments positifs de notre système. Parce que je lis beaucoup de jurisprudence, on me demande souvent qui sont les meilleurs (et les moins meilleurs…) juges au Québec. Pour des raisons dont nous pourrons discuter un autre jour, j'évite généralement de répondre à cette question. Reste que les lecteurs assidus de mon blogue peuvent deviner ma grande admiration pour certains juges. J'attire aujourd'hui votre attention sur une décision rendue par un de ceux-là et vous invite à lire le jugement complet pour constater pour vous-même à quel point le raisonnement juridique est logique, clairement présenté et - au final - impeccable. Il s'agit de la décision rendue par l'Honorable juge Nicholas Kasirer dans Amaya inc. c. Derome (2018 QCCA 120).

dimanche 28 janvier 2018

NéoPro: la partie qui dépose plus d'une expertise par sujet - en contravention de l'article 232 C.p.c. - aura le choix de l'expertise à conserver

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Comme nous en discutions en juin 2014, le législateur est intervenu dans le nouveau Code de procédure civile pour limiter le nombre d'expertises par discipline. Qu'arrive-t-il lorsqu'une partie contrevient à cette règle et que la Cour ordonne le retrait des expertises additionnelles? Selon la décision récente rendue par l'Honorable juge France Bergeron dans Hamel c. Lames Nordik (2018 QCCS 925), ce sera à la partie qui a produit les expertises de choisir l'expertise qui demeurera au dossier.

Dimanches rétro: l'enregistrement d'un nom d'affaires ne donne pas de droits à l'encontre de l'entreprise qui utilisait déjà auparavant ledit nom

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

L'enregistrement d'un nom d'affaires - bien que fortement recommandé - n'a pas l'effet ou la portée que plusieurs lui donnent. En effet, cet enregistrement n'est pas une preuve irréfragable du droit d'utiliser ce nom si celui-ci - ou un nom similaire qui pourrait porter à confusion - est déjà utilisé par une autre entreprise. C'est ce que soulignait la Cour suprême du Canada en 1965 dans l'affaire Martel c. Filion ([1965] RCS 349).

samedi 27 janvier 2018

Par Expert: lorsque le témoignage d'un expert n'est pas utile et que le dépôt de son rapport aurait suffit, seuls les honoraires relatifs à la préparation du rapport seront accordés à titre de frais de justice

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

On l'a vu avec la réforme du Code de procédure civile, le législateur veut décourager l'utilisation excessive du temps d'audition dévoué à la preuve d'expertise. C'est pourquoi le législateur prévoit que le rapport de l'expert tient généralement lieu de son témoignage en chef. C'est également pourquoi la partie qui décide de faire témoigner son expert en chef lorsque ce n'est pas réellement utile n'obtiendra pas le remboursement des honoraires associés à ce témoignage comme l'illustre l'affaire Coffrages HD inc. c. Constructions Gagné & Fils inc.Coffrages HD inc. c. Constructions Gagné & Fils inc. (2018 QCCS 88)

La veille juridique: nos billets préférés de la semaine du 21 janvier 2018

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Chaque semaine, nous attirons votre attention sur nos billets préférés de la blogosphère juridique canadienne (et parfois américaine) dans l'espoir de vous faire découvrir d'autres blogues juridiques intéressants et pour encourager la libre circulation de l'information juridique. Il va de soi que le fait que je trouve un billet intéressant n'implique en rien que je sois en accord (ou en désaccord d'ailleurs) avec son contenu. Sans plus attendre, nos billets préférés de la semaine:

vendredi 26 janvier 2018

Si l'appréciation du délai raisonnable pour déposer un recours en mandamus est plus souple, il n'en reste pas moins que la partie demanderesse doit justifier son délai à déposer des procédures

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons régulièrement traité du fait que la partie qui demande à la Cour supérieure d'exercer son pouvoir de surveillance et contrôle doit intenter son recours à l'intérieur d'un délai raisonnable (lequel est habituellement 30 jours). Dépendamment du recours et des circonstances, l'appréciation de ce délai par la Cour variera. Par exemple, les tribunaux se montrent généralement plus souples en matière de mandamus. Ceci étant dit, comme le souligne l'Honorable juge Claude Dallaire dans l'affaire Pavlov c. Ville de Montréal (2018 QCCS 845), cette souplesse ne dispense pas la partie requérante de son obligation de justifier le délai entrepris lorsqu'il dépasse 30 jours.

La partie qui endure une situation problématique pendant des mois ne respecte pas le critère de l'urgence et ne peut donc obtenir une injonction provisoire

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Si vous lisez régulièrement le blogue, vous savez que je fais une mini obsession sur le critère de l'urgence pour les injonctions provisoires et les ordonnances de sauvegarde. Dans l'affaire Roy c. Pilote (2018 QCCS 258), l'Honorable juge J. Roger Banford souligne que la partie qui endure une situation problématique pendant des mois ne respecte pas le critère de l'urgence et ne peut donc obtenir une injonction provisoire.

jeudi 25 janvier 2018

Il importe de garder à l'esprit le fait que la dissolution d'une personne morale pour des raisons administratives peut toujours être suivi de la reconstitution de celle-ci

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Court billet pour cet après-midi pour rappeler à tous nos lecteurs que la dissolution d'une personne morale pour des raisons administratives - comme le défaut de déposer des déclarations annuelles - ne marque pas nécessairement la fin de ladite personne morale. En effet, il est toujours possible de reconstituer la personne morale comme le souligne l'Honorable juge Claude Villeneuve dans Ménard c. Arseneau (2018 QCCS 427).

Peut-on intenter une action collective dans laquelle on ne réclame que des dommages punitifs? Possiblement, oui

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Dans l'affaire De Montigny, la Cour suprême confirmait le caractère autonome des dommages punitifs. Avant cette décision, une majorité de la jurisprudence pertinente posait comme principe que l'attribution de dommages punitifs était impossible en l'absence de dommages compensatoires. Est-ce pour autant dire qu'il est possible d'intenter un recours ou une action collective qui ne recherche que l'attribution de dommages punitifs? Dans l'affaire Association québécoise de lutte contre la pollution atmosphérique c. Volkswagen Group Canada Inc. (2018 QCCS 174), l'Honorable juge Daniel Dumais répond peut-être à cette question et autorise l'institution de l'action collective, déférant la question au mérite.

mercredi 24 janvier 2018

La théorie de l'indoor management s'applique également à la conclusion d'une transaction

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

La règle de l'indoor management implique que le tiers de bonne foi a droit de présumer que l'administrateur ou le dirigeant d'une personne morale qui signe un document a le pouvoir de le faire. Cette règle s'applique pour tous les types de contrat, incluant la transaction. C'est ce que souligne l'Honorable juge Jacques Babin dans l'affaire 9176-9091 Québec inc. c. Labrie (2018 QCCS 485).

Une preuve créée par une des parties après le jugement de première instance ne peut se qualifier de preuve nouvelle en appel

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Est-ce qu'un document qui est créé après le jugement de première instance peut se qualifier de preuve nouvelle devant la Cour d'appel? Peut-être. Est-ce qu'un document qui est créé après le jugement de première avec la participation d'une des parties peut se qualifier de preuve nouvelle en appel? Assurément pas. C'est ce qu'illustre la décision récente rendue dans l'affaire Heafey c. Dormani (2018 QCCA 140).

mardi 23 janvier 2018

L'abus de droit c'est le fait pour une partie d'exercer son droit de façon téméraire ou sans se soucier des intérêts de son cocontractant. Il n'est pas nécessaire que la partie soit de mauvaise foi

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà traité à quelques reprises du principe: une conclusion d'abus de droit n'implique pas nécessairement la mauvaise foi d'une partie. L'abus de droit contractuel implique le fait pour une partie d'exercer son droit de manière téméraire ou sans se soucier des intérêts de son cocontractant. C'est ce que rappelle la Cour d'appel dans l'affaire Municipalité de Sainte-Sophie c. Sauvetage Médical (2018 QCCA 119).

Il n'est pas nécessaire d'obtenir l'autorisation du tribunal de faillite pour intenter un recours extracontractuel contre des personnes autres que le failli qui ont contribué aux dommages de la partie demanderesse

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

L'autorisation du tribunal de faillite est requise pour faire valoir une réclamation contre le failli, contre ses biens ou au nom du failli. Ce qui ne veut pas pour autant dire que tout recours relatif à une dette pour laquelle une réclamation a été déposée dans la faillite nécessite une autorisation de la Cour. C'est le cas d'un recours extracontractuel contre des tiers qui sont allégués avoir causé les dommages de la partie demanderesse. C'est ce que souligne l'Honorable juge Allan R. Hilton dans Gestion de patrimoine ASF inc. c. Jeansonne Avocats inc. (2018 QCCA 87).

lundi 22 janvier 2018

Est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Vous voulez une définition simple et directe de ce que constitue un vice caché? Et bien vous êtes chanceux parce que la Cour d'appel a exaucé votre vœux dans la décision récente qu'elle a rendu dans l'affaire Joseph c. Fortin (2018 QCCA 74). Dans celle-ci, elle souligne que le vice apparent est celui qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.

Ne souffre pas de préjudice irréparable le locateur qui continue de recevoir son loyer pendant la durée des procédures

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons souvent attiré votre attention sur des situations où - pour les fins d'une injonction provisoire ou interlocutoire - l'impossibilité d'obtenir l'exécution en nature est considérée être en soi un préjudice irréparable (on parle habituellement de la violation de clauses restrictives). Cela ne veut pas pour autant dire que toute inexécution contractuelle constitue un préjudice irréparable. La décision récente rendue par l'Honorable juge Gregory Moore dans l'affaire 9129-2086 Québec inc. c. 9356-6503 Québec inc. (2018 QCCS 96) illustre bien ce principe.

dimanche 21 janvier 2018

NéoPro: il est inapproprié de demander comme pré-engagement ou engagement la communication de documents qui sont déjà en possession de la partie qui formule la demande

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Peu de choses me dérangent autant lors d'un interrogatoire préalable que voir la partie adverse demander comme engagement la communication de documents qui sont déjà en sa possession - comme par exemple une copie de toute la correspondance échangée entre les parties. C'est donc avec grand plaisir que j'attire aujourd'hui votre attention sur la décision rendue par l'Honorable juge David R. Collier dans l'affaire Bouvier c. Lachance (2018 QCCS 233) où il indique qu'il est évident qu'on ne doit pas demander la communication de documents qui sont déjà en notre possession.

Dimanches rétro: les enseignements de la Cour suprême en matière de captation... en 1907

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Aujourd'hui, les Dimanches rétro remontent plus d'un siècle en arrière pour traiter des enseignements de la Cour suprême du Canada en matière de captation. En effet, nous traitons de l'affaire Mayrand v. Dussault ((1907) 38 SCR 460), où la Cour décrivait les caractéristiques et le fardeau de la preuve applicable à la captation.

samedi 20 janvier 2018

Par Expert: la partie qui annonce une expertise dans le protocole de l'instance peut être tenue de dévoiler l'identité de cet expert même avant le dépôt de son rapport

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

J'attire cet après-midi votre attention sur une décision qui m'a - je l'avoue - un peu surpris. Pas nécessairement parce que je suis en désaccord, mais parce que je pensais que le droit avait clairement établi la règle contraire. En effet, j'ai toujours cru (peut-être à tort) que l'identité de l'expert retenu par une partie était protégé par le secret relatif au litige jusqu'au dépôt de son rapport. Cependant, selon la décision rendue par l'Honorable juge Marie St-Pierre dans Succession de Castonguay (2018 QCCA 12), il n'en est rien.

La veille juridique: nos billets préférés de la semaine du 14 janvier 2018

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Chaque semaine, nous attirons votre attention sur nos billets préférés de la blogosphère juridique canadienne (et parfois américaine) dans l'espoir de vous faire découvrir d'autres blogues juridiques intéressants et pour encourager la libre circulation de l'information juridique. Il va de soi que le fait que je trouve un billet intéressant n'implique en rien que je sois en accord (ou en désaccord d'ailleurs) avec son contenu. Sans plus attendre, nos billets préférés de la semaine:

vendredi 19 janvier 2018

Pour être suffisante pour fins de substitution de garantie, la nouvelle garantie doit couvrir le capital, les intérêts et les frais qui sont susceptibles d'être engagés dans le cadre du litige

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

L'article 2731 C.c.Q. prévoit la possibilité de substituer à une hypothèque légale une autre garantie jugée suffisante. Or, comme le souligne l'Honorable juge Simon Hébert dans l'affaire Poulin c. Menuiserie Ranger inc. (2018 QCCS 631), pour être suffisante la nouvelle garantie doit couvrir non seulement le capital, mais également les intérêts et frais qui sont susceptibles d'être engagés dans le cadre du litige.

Dans la mesure où le compte-rendu des procédures judiciaires est fidèle et fait de bonne foi, la publication régie par la Loi sur la presse ne peut faire l'objet d'une poursuite en diffamation

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

La Loi sur la presse prévoit certaines protection pour les publications qui sont régies par celle-ci. Une de celles-là est relative aux rapports effectués sur des procédures judiciaires. En effet, dans ce cas, la publication n'a pas à s'assurer que les faits qui sont allégués dans une procédure judiciaire ou rapportés à la Cour sont vrais dans la mesure où le compte-rendu des procédures est fidèle et fait de bonne foi. L'affaire Trams Property Management Inc. c. Postmedia Network Inc. (2018 QCCS 97) traite de ce principe.

jeudi 18 janvier 2018

Les critères à satisfaire pour obtenir l'autorisation d'intenter une action dérivée

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Court billet cet après-midi en matière de recours corporatif. L'action dérivée prévue à l'article 239 de la LCSA permet à un plaignant au sens de la loi de prendre un recours au nom de la société lorsque celle-ci refuse ou néglige d'agir. Ce recours nécessite cependant l'autorisation préalable de la Cour. Dans l'affaire Aciers Picard inc. c. Compagnie d'assurances Travelers du Canada (2018 QCCS 1211), l'Honorable juge Johanne April rappelle les critères à satisfaire pour obtenir une telle autorisation. 

Les états financiers d'une partie demanderesse ne sont pas pertinents à la contestation d'une réclamation pour dommages punitifs

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Même si les états financiers d'une compagnie devront être communiqués lorsqu'ils sont pertinents au contrôle de la réclamation de la partie demanderesse, il n'en reste pas moins que les tribunaux se montrent plus exigeants quant à la démonstration de leur pertinence en raison de leur caractère confidentiel. La décision rendue par l'Honorable juge Sandra Bouchard dans l'affaire Chrono Aviation inc. c. 10241849 Canada inc. (2018 QCCS 149) illustre bien ce principe.

mercredi 17 janvier 2018

En matière de litispendance internationale, l'article 3137 C.c.Q. ne permet la suspension des procédures québécoises que lorsque l'action étrangère a été déposée avant celle du Québec. Ainsi, lorsque les actions sont déposées le même jour, les procédures québécoises ne peuvent être suspendues

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà souligné qu'en matière de litispendance internationale, l'article 3137 C.c.Q. ne permet aux tribunaux québécois de suspendre les procédures québécoises que dans la mesure où les procédures étrangères ont été déposées en premier. Qu'en est-il lorsque les procédures québécoises et étrangères sont déposées le même jour? Dans l'affaire Garage Poirier & Poirier inc. c. FCA Canada inc. (2018 QCCS 107), l'Honorable juge Marie-Anne Paquette indique que le critère de l'antériorité n'est pas rempli, de sorte que la suspension en vertu de l'article 3137 demeure impossible.

Le dépôt d'une expertise que l'on sait irrecevable peut constituer un abus de procédure

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Ce qui peut constituer de l'abus procédural est presque illimité. En effet, les tribunaux québécois semblent de plus en plus enclins à sanctionner des comportements qu'ils jugent indéfensibles, même en l'absence de mauvaise foi. La décision récente rendue par l'Honorable juge François Tôth dans l'affaire Parenteau c. Prince (2018 QCCS 106) offre une belle illustration de cette réalité alors qu'il conclut à abus en raison de la communication d'une expertise que la partie aurait du savoir irrecevable.

mardi 16 janvier 2018

La partie qui poursuit ses procureurs renonce implicitement au secret professionnel

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Même si le secret professionnel est absolument indispensable à la saine administration de la justice, celui-ci ne doit pas non plus empêcher les avocats poursuivis par leurs anciens clients de faire valoir une défense pleine et entière. C'est pourquoi les tribunaux ont posé la règle voulant que la partie qui poursuit ses anciens avocats renonce implicitement au secret professionnel à l'égard de l'information pertinente au litige. C'est ce que rappelle l'Honorable juge Johanne Mainville dans l'affaire Kanavaros c. Kugler Kandestin (2018 QCCS 547).

Au sens de l'article 2862 C.c.Q., l'acte passé dans le cours des activités d'une entreprise doit être une activité régulière et courante

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà souligné que l'exception relative aux actes passés dans le cours des activités d'une entreprise à l'article 2862 C.c.Q. doit recevoir une interprétation restrictive. Nous revenons à la charge sur le sujet aujourd'hui pour traiter de l'affaire 3090-4320 Québec inc. (Royal Lepage St-Jean) c. Sobeys Québec inc. (2018 QCCS 59) où l'Honorable Louis Lacoursière souligne que l'acte passé dans le cours des activités d'une entreprise doit correspondre à une activité régulière et courante.

lundi 15 janvier 2018

Il y a des limites à la souplesse dont fera preuve le tribunal à l'égard de la preuve du financement dans le cadre d'une action en passation de titre

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous en avons souvent traité: depuis le prononcé par la Cour d'appel de l'arrêt Houlachi c. Bray, l'exigence d'offrir les fonds dans le cadre d'une action en passation de titre a été grandement relaxée. Cela ne veut pas dire pour autant que cette exigence a complètement disparue. La partie demanderesse doit quand même convaincre le tribunal que les fonds nécessaires lui sont disponibles comme le souligne l'Honorable juge Jean-Yves Lalonde dans l'affaire Blanchard c. Solomita (2018 QCCS 36).

En matière d’interprétation de contrats créant une servitude, s'il n'est pas possible de cerner l’intention des parties, l’interprétation qui favorise le fond servant sera privilégiée

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Les règles d'interprétation des contrats sont généralement prévues aux articles 1425 à 1432 C.c.Q. Reste qu'il existe certaines règles particulières d'interprétation propres à certains types de contrats. L'affaire Samson c. Tardif (2018 QCCS 29) illustre un de ces cas alors que l'Honorable juge Stéphane Sansfaçon traite de l'interprétation des contrats créant une servitude.

dimanche 14 janvier 2018

NéoPro: le jugement qui accueille une objection à la preuve dans le cadre d'un interrogatoire préalable n'est pas susceptible d'appel immédiat

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà souligné à quelques reprises que le jugement qui maintient une objection lors d'un interrogatoire préalable n'est pas susceptible d'appel immédiat, contrairement à un courant jurisprudentiel antérieur. Puisque cela fait quelques années et sous l'ancien C.p.c., nous revenons sur le sujet aujourd'hui en attirant votre attention sur la décision rendue par l'Honorable juge Paul Vézina dans David S. Laflamme Construction inc. c. Minister of Public Works and Government Services (2018 QCCA 57).

Dimanches rétro: une clause qui empêche un ex-employé de communiquer avec des clients n'est pas valide

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà traité du fait que n'est pas valide la clause qui empêche un ex-employé ou un ex-actionnaire de communiquer avec ses anciens clients ou fournisseurs. En effet une telle clause restrictive n'est pas justifiable et est excessive. Ainsi, il n'est pas possible de contourner l'interprétation restrictive qu'il faut donner aux clauses de non-concurrence ou de non-sollicitation en prévoyant plutôt une prohibition de communication. C'est dans l'affaire Martin Assurance et gestion de risques Inc. c. Trudel (2002 CanLII 7668) que le principe était posé pour la première fois.

samedi 13 janvier 2018

Par Expert: le témoignage d'un expert qui a une relation professionnelle préexistant avec la partie qui retient ses services est recevable, mais sa valeur probante peut être fortement diminuée

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

La semaine dernière, nous traitions du fait qu'une relation professionnelle préalable entre une partie et un expert n'empêchait pas ce dernier d'être qualifié d'expert dans un litige. Tout est une question de force probante. Nous revenons à la charge sur le sujet cette semaine pour vous offrir une belle illustration. En effet, dans l'affaire Frigon c. Tribunal administratif du travail (2018 QCCS 21), la Cour supérieure rappelle que rien ne s'oppose à ce qu'un médecin traitant agisse à titre de témoin expert pour sa patiente, mais que la force probante de son témoignage .

La veille juridique: nos billets préférés de la semaine du 7 janvier 2018

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Chaque semaine, nous attirons votre attention sur nos billets préférés de la blogosphère juridique canadienne (et parfois américaine) dans l'espoir de vous faire découvrir d'autres blogues juridiques intéressants et pour encourager la libre circulation de l'information juridique. Il va de soi que le fait que je trouve un billet intéressant n'implique en rien que je sois en accord (ou en désaccord d'ailleurs) avec son contenu. Sans plus attendre, nos billets préférés de la semaine:

vendredi 12 janvier 2018

La violation des droits découlant d'un brevet est un préjudice irréparable

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

En mars 2013, nous attirions votre attention sur la jurisprudence qui indique que la violation d'une marque de commerce constitue en soi un préjudice irréparable. Il n'est donc pas surprenant que la même règle trouve application à l'égard d'un brevet. C'est la conclusion à laquelle en vient l'Honorable juge Michel Déziel dans l'affaire Thermolec ltée c. Stelpro Design inc. (2018 QCCS 901).

Puisque les bitcoins ont une valeur monétaire déterminable et précise, on ne pourra en principe obtenir une injonction provisoire pour en forcer le transfert

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà traité du fait qu'hormis des circonstances exceptionnelles, il n'est pas possible d'obtenir une injonction provisoire pour forcer le paiement d'une somme d'argent. Puisque les bitcoins ont une valeur monétaire déterminable et précise, il n'est pas surprenant que la même réalité existe pour ceux-ci. C'est ce qu'illustre la décision récente de l'Honorable juge François P. Duprat dans Hill c. Blockstream Corporation (2018 QCCS 28).

jeudi 11 janvier 2018

Le fardeau qui pèse sur la partie qui demande l'autorisation d'instituer une action collective qui allègue un complot anti-concurrentiel

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

L'autorisation des actions collectives qui allègue un complot anti-concurrentiel pose un dilemme particulier. D'un côté, les allégations factuelles à l'effet que certaines défenderesses ont participé audit complot doivent être prises pour avérées. De l'autre, la prétention légitime des défenderesses qu'elles ont le droit de connaître avec une certaine spécificité ce qu'on leur reproche. La décision récente rendue par l'Honorable juge Clément Samson dans l'affaire Asselin c. Hitachi Ltd. (2018 QCCS 483) traite de cette dynamique.

Même si une créance non liquidée est contestée par la débitrice, ladite créance doit apparaître sur la liste de créanciers confectionnée dans le cadre de l'ouverture d'une faillite

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Court billet ce matin pour discuter d'une question technique - mais non moins importante - en matière de faillite et d'insolvabilité. En effet, la liste des créanciers revêt une importance indéniable en la matière puisque les personnes qui se retrouvent sur cette liste recevront, inter alia, toutes les communications relatives aux procédures de faillite. Or, dans l'affaire Avis d'intention de 2993821 Canada inc. (Écolait ltée) (2018 QCCS 20), l'Honorable juge Michel A. Pinsonnault indique que ce n'est pas parce qu'une créance non liquidée est contestée qu'elle ne devrait pas apparaître sur la liste.

mercredi 10 janvier 2018

La partie qui allègue qu'un administrateur a manqué à ses obligations fiduciaires et qui le poursuit en dommages doit démontrer qu'elle a subi des dommages ou que l'administrateur a réalisé un profit personnel en raison de ses gestes déloyaux

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Les administrateurs d'une compagnie ont des devoirs fiduciaires envers la personne morale, lesquels incluent un devoir de loyauté. Cela ne veut pas autant dire que la violation de ces devoirs entraîne automatiquement la possibilité d'obtenir une condamnation en dommages contre un administrateur fautif. Les règles de la responsabilité civile continuent de s'appliquer de certes que la partie demanderesse doit faire la preuve d'un dommage subi ou d'un bénéfice illicite obtenu par l'administrateur. C'est ce que souligne l'Honorable juge Jean-François Michaud dans l'affaire 8237514 Canada inc. c. Kucer (2018 QCCS 12).

Certains contrats de service - de par leur nature même - se prêtent mal à l'exercice du droit de résiliation unilatérale et sans cause de l'article 2125 C.c.Q.

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Lors de l'entrée en vigueur du Code civil du Québec en 1994, l'inclusion de l'article 2125 C.c.Q. - qui permet au client de résilier un contrat d'entreprise ou de service unilatéralement et sans cause - a causé beaucoup de vagues. On comprend facilement pourquoi, puisque le législateur donnait à une partie contractuelle un pouvoir exorbitant du droit contractuel général. Or, si ce pouvoir de résiliation unilatérale se comprend et se justifie facilement dans le cadre de la relation traditionnelle entre entrepreneur et client ou fournisseur commercial de services et client, il est difficile à accepter dans le cadre de certains contrats de service. C'est pourquoi - dans une décision remarquable selon moi - l'Honorable juge Stephen Hamilton en vient à la conclusion que certains contrats de service, de par leur nature, ne se prêtent pas au droit de résiliation unilatérale prévu à l'article 2125 C.c.Q. Il s'agit de l'affaire Lamontagne c. Distribution financière Sun Life (Canada) inc. (2018 QCCS 6).

mardi 9 janvier 2018

L'article 2870 C.c.Q. ne permet pas la production en preuve d'un document faisant état d'une opinion

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

L'article 2870 C.c.Q. met de l'avant une exception à la prohibition de la preuve par ouï-dire en permettant la production en preuve de certains documents ou déclarations lorsque les conditions de fiabilité et de nécessité sont remplies. Reste que - comme nous l'avons souligné dans le passé - cet article ne permet pas la production d'un témoignage d'opinion. C'est ce que rappelle l'Honorable juge Silvana Conte dans l'affaire 9213-8923 Québec inc. c. Acevedo (2018 QCCS 5).

La nonchalance d'une partie dans le respect des délais convenus dans le protocole de l'instance peut constituer un abus de procédure

par Karim Renno
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Le souhait du législateur (et, il semble, de la magistrature) avec l'avènement du nouveau Code de procédure civile est d'encourager plus de discipline au sein de la profession des avocats quant au respect des échéances prévues au protocole de l'instance. En effet, le législateur a donné les outils nécessaires à la magistrature pour sanctionner ce qu'elle considère être des abus de procédures. Si l'on se fie à la décision rendue dans l'affaire Équiporc inc. c. RCA Électrique inc. (2018 QCCS 8), la nonchalance d'une partie quant au respect des délais prévus au protocole de l'instance pourra être assimilé à l'abus et sanctionné par l'attribution de dommages.

lundi 8 janvier 2018

La partie qui plaide que le taux d'intérêt prévu dans un convention de prêt est lésionnaire doit démontrer que le taux prévu au contrat de prêt est beaucoup trop élevé lorsque comparé aux taux du marché dans un contexte comparable

par Karim Renno
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En principe, le droit québécois ne reconnaît pas la lésion entre majeurs comme cause d'annulation ou de réduction de l'obligation contractuelle. Comme presque tous les principes cependant, il existe plusieurs exceptions. L'une de celles-là se retrouve à l'article 2332 C.c.Q. et permet au tribunal d'annuler un contrat de prêt ou d'en réduire les obligations en cas de lésion. Dans Westboro Mortgage Investment c. 9080-9013 Québec inc. (2018 QCCS 1), l'Honorable juge Marie-Josée Bédard souligne cependant que pour prouver la lésion au sens de cet article, la partie requérante devra démontrer que le taux d'intérêts prévu au contrat est beaucoup trop élevé en comparaison avec les taux du marché dans un contexte comparable.

La reconnaissance de l’existence d’un premier acte juridique peut constituer un commencement de preuve donnant ouverture à la preuve testimoniale d’un second acte juridique

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

La question de savoir qu'est-ce qui constitue ou non un commencement de preuve demeure - à dessein selon la volonté du législateur - difficile à cerner avec précision. Bien que l'article 2865 C.c.Q. pose le principe que le commencement doit émaner de la partie contre laquelle on tente de prouver l'existence de l'acte juridique et rendre l'existence de celui-ci vraisemblable, il laisse une large mesure de discrétion au tribunal. C'est pourquoi il est intéressant de noter que - dans certaines circonstances - l'existence d'un acte juridique peut constituer un commencement de preuve de l'existence d'un autre tel acte. C'est ce que souligne l'Honorable juge Frédéric Bachand dans l'affaire Hamel c. Hamel (2018 QCCS 14).

dimanche 7 janvier 2018

NéoPro: les facteurs qui doivent guider la Cour pour déterminer si des circonstances exceptionnelles justifient un changement de district

par Karim Renno
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Le nouveau Code de procédure civile a introduit une nouveauté avec l'article 48 C.p.c. En effet, celui-ci permet maintenant au juge en chef "exceptionnellement, dans l’intérêt des parties ou des tiers concernés ou encore si d’autres motifs sérieux le commandent, ordonner, même d’office, le transfert du dossier, de l’instruction ou d’une demande relative à l’exécution du jugement dans un autre district". Dans l'affaire Gingras c. Rogers Communications inc. (2018 QCCS 13), l'Honorable juge Lukasz Granosik discute de ce qui constitue de telles circonstances.

Dimanches rétro: il est possible de faire valoir une fin de non-recevoir à l'encontre d'une requête en irrecevabilité pour litispendance lorsque la partie défenderesse adopte un comportement procédural inacceptable

par Karim Renno
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Non seulement est-ce que la fin de non-recevoir peut être opposée à une cause d'action et un moyen de défense, mais elle peut également être invoquée à l'encontre d'un moyen procédural. En effet, dans l'affaire Sàfilo Canada Inc. c. Chic Optic (2004 CanLII 46683), la Cour d'appel indiquait qu'une fin de non-recevoir faisait obstacle à une requête en irrecevabilité pour motif de litispendance en raison du comportement procédural inacceptable de l'Appelante.