mardi 16 janvier 2018

La partie qui poursuit ses procureurs renonce implicitement au secret professionnel

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Même si le secret professionnel est absolument indispensable à la saine administration de la justice, celui-ci ne doit pas non plus empêcher les avocats poursuivis par leurs anciens clients de faire valoir une défense pleine et entière. C'est pourquoi les tribunaux ont posé la règle voulant que la partie qui poursuit ses anciens avocats renonce implicitement au secret professionnel à l'égard de l'information pertinente au litige. C'est ce que rappelle l'Honorable juge Johanne Mainville dans l'affaire Kanavaros c. Kugler Kandestin (2018 QCCS 547).


Dans cette affaire, la juge Mainville est saisie du débat d'objections soulevées dans le cadre de l'interrogatoire préalable de la Demanderesse. Cette dernière s'objecte entre autre au dépôt d'un courriel qu'elle plaide être protégé par le secret professionnel. 

La Défenderesse fait valoir que la Demanderesse - qui poursuit ses anciens procureurs au motif qu'elle n'aurait jamais accepté de rémunérer ceux-ci à pourcentage - a implicitement renoncé au secret professionnel pour deux raisons, dont le fait d'intenter sa poursuite.

La juge Mainville donne raison à la Défenderesse et rappelle que la partie qui poursuit ses anciens avocats renonce implicitement au secret professionnel à l'égard des éléments pertinents au litige:
[24] Cela dit, le pouvoir de renoncer au secret professionnel appartient au titulaire du secret, ici, madame Kanavaros.  
[25] En l’espèce, celle-ci a volontairement divulgué à Me Wechsler et à Me Olivera Pajani de l’étude Kugler Kandestin l’opinion juridique de Me Bissonnette. À cette époque, les défendeurs représentaient madame Kanavaros dans le Deuxième litige. Celle-ci n’a pas renoncé au secret professionnel en lien avec le fond de ce litige dans lequel les défendeurs la représentaient et ces derniers ont gardé confidentielle l’information. 
[26] Toutefois, en instituant par la suite des procédures contre les défendeurs alléguant l’absence de convention d’honoraires à pourcentage quant aux services que ces derniers lui ont rendus dans le Deuxième litige, madame Kanavaros a fait de l’information assujettie au secret un élément pertinent au litige, ouvrant ainsi la porte à une enquête à ce sujet. Elle a implicitement renoncé au secret professionnel découlant de sa relation avec les défendeurs. Les mêmes principes s’appliquent au courriel du 24 avril 2014 de madame Kanavaros à Me Bissonnette et à son courriel du 28 avril 2014. 
[27] En l’espèce, la renonciation implicite au secret professionnel est suffisamment établie, a ce stade préliminaire du dossier, pour permettre le dévoilement requis.
Référence : [2018] ABD 24

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