vendredi 30 novembre 2012

Seule la main est fiable?

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Il est de l’essence du droit qu’il s’adapte à la société, quoique qu’avec un certain recul. En effet, s’affrontent en la matière deux impératifs : d’un côté l’importance de la stabilité et la prévisibilité du droit, de l’autre le souci d’éviter les anachronismes trop importants. Le défi est constant. En cette période de notre histoire, c’est l’acceptation et l’intégration des nouvelles technologies qui pose le plus de maux de tête au législateur et aux tribunaux.
 

L'urgence comme critère même de l'injonction interlocutoire? Non, mais presque

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

La différence fondamentale entre l'injonction provisoire et l'injonction interlocutoire, outre leur durée, est que la deuxième n'exige pas que l'on établisse l'urgence de l'ordonnance recherchée. Or, comme le souligne l'Honorable Jean-Yves Lalonde dans Corporation Xprima.com c. Goudreau (2012 QCCS 5889), cette différence est moins importante qu'elle puisse paraître initialement puisque les considérations temporelles demeurent très importantes.

jeudi 29 novembre 2012

Vous voulez faire condamner la partie qui demande une remise de dernière minute aux honoraires extrajudiciaires du jour? Soyez prêt à démontrer l'abus au sens de l'article 54.1 C.p.c.

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Il est monnaie courante que, face à une demande de dernière minute de la partie adverse pour obtenir une remise, un procureur exige que cette partie soit condamnée aux honoraires extrajudiciaires encourus pour préparer cette audition. S'il ne fait aucun doute que le juge saisi d'une telle demande a le pouvoir de l'accorder, il doit néanmoins constater l'abus au sens de l'article 54.1 C.p.c. et motiver sa décision comme le souligne l'Honorable juge Nicholas Kasirer dans Moko c. Ebay Canada Inc. (2012 QCCA 2052).

Il est essentiel d'appuyer une requête pour être relevé du défaut d'inscrire à l'intérieur du délai de 180 jours d'un affidavit

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Qui a dit qu'un jugement devait être long pour être utile? Certainement pas moi. Comme vous le savez chers lecteurs, nous traitons régulièrement de l'importance de la preuve de l'impossibilité d'agir lorsque l'on demande d'être relevé du défaut d'inscrire (voir, par exemple, notre billet d'octobre 2012: http://bit.ly/QsWhZk). Or, dans un jugement succinct et particulièrement clair, la Cour d'appel vient, encore une fois, de réitérer l'absolue nécessité d'une preuve au support d'une prétention d'impossibilité d'agir dans l'affaire Morin c. Latour (2012 QCCA 2103).

mercredi 28 novembre 2012

L'expert de la partie adverse n'est pas un de ses agents au sens des articles 397 ou 398 C.p.c.

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Dans certaines circonstances exceptionnelles, les tribunaux québécois ont accepté d'un expert soit interrogé au préalable dans un litige civil (voir notre billet de mars 2012 sur la question: http://bit.ly/Tu8YT5), mais seulement sur les faits qu'il a constaté personnellement. Dans Acadia Subaru c. Michaud (2012 QCCS 5653), l'Honorable juge Dominique Bélanger est par ailleurs saisie de la prétention d'une partie que, non seulement on peut interroger au préalable un expert, mais que la permission de la Cour n'est pas nécessaire puisque celui-ci est l'agent de la partie qui l'a engagé au sens des articles 397 et 398 C.p.c.

On ne peut, par la voie d'une ordonnance de sauvegarde, ordonner le paiement d'une somme d'argent qui rendra le jugement final inefficace, même partiellement

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

On conjugue les principes en matière d'ordonnance de sauvegarde ce matin. D'abord, certains se souviendront de notre billet d'août 2011 par lequel nous rappelions qu'on ne peut, par voie d'une ordonnance de sauvegarde, obtenir un jugement anticipé sur le fond (voir notre billet ici: http://bit.ly/V2XhzS). En juillet de l'année précédente, nous attirions également votre attention sur le fait qu'il est possible, dans certaines circonstances d'obtenir le paiement d'une somme d'argent via une telle ordonnance (voir notre billet ici: http://bit.ly/IUufye). Comment réconcilier ces deux principes? L'Honorable juge Jean-Yves Lalonde s'attaque à ce défi dans l'affaire Pro-Jet Démolition inc. c. Pomerleau inc. (2012 QCCS 5884).

mardi 27 novembre 2012

La diffusion d’une information fausse n’est pas nécessairement fautive et à l’inverse celle d’une information véridique peut dans certains cas constituer une faute

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

La semaine dernière, j'attirais votre attention sur l'affaire Labeaume (voir notre billet ici: http://bit.ly/SoncoP) pour souligner que, dans le cadre d'un recours en diffamation, la partie demanderesse avait l'obligation de prouver la diffamation et la faute. Il en découle nécessairement qu'une partie pour proférer des propos diffamatoires et et faux, mais ne pas être tenue civilement responsable parce qu'elle n'a pas commis de faute. Je reviens à la charge sur le même thème aujourd'hui en discutant de l'affaire Perkins c. Demers (2012 QCCS 5777) parce que la question est d'une grande importance et elle est mal comprise dans la communauté juridique en général.
 

Peu importe le type de contrat, une tierce partie ne peut baser son recours sur une alléguée obligation de résultat

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

En fonction du type de contrat qui est intervenu entre des parties, l'obligation qui pèse sur la (ou les) partie qui doit fournir la prestation caractérisée est une obligation de résultat ou de moyens. Il s'agit cependant là de l'intensité de l'obligation qui est due à la partie co-contractante. Lorsqu'une tierce partie invoquera ce contrat dans le cadre d'un recours extracontractuel, elle ne pourra alléguer l'existence d'une obligation de résultat. En effet, comme le souligne l'affaire Industries Ultratainer inc. c. Toiture Omer Brault inc. (2012 QCCS 5880), l'intensité de l'obligation envers une tierce partie sera toujours celle de moyens.
 

lundi 26 novembre 2012

La clause pénale constitue une évaluation anticipée des dommages-intérêts en cas de bris du contrat, réitère la Cour d’appel du Québec

par Hassan Trabulsi
Étudiant en droit

Les tribunaux québécois ont souvent traité de la question des clauses pénales à l’intérieur des contrats. La Cour d’appel revient sur cette question dans le contexte des rapports individuels de travail, plus spécifiquement dans l’affaire Walker c. Norcan Aluminium inc. (2012 QCCA 2042). Avant d’entamer les faits, il convient de se rappeler l’article 1622 du C.c.Q qui traite de ce type de clauses:
 

L'intensité du devoir d'information varie en fonction du degré d'expertise de la partie adverse

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

En droit contractuel, on parle maintenant beaucoup du devoir d'information qui pèse sur les parties respectives. La question pertinente n'est pas tant de savoir si les parties ont un tel devoir, mais plutôt d'en déterminer l'intensité. À ce chapitre, dans Groupe SNC-Lavalin inc. c. St-Paul Guarantee Insurance Company (2012 QCCA 2076), la Cour d'appel indique que l'intensité du devoir d'information est faible lorsque la partie adverse a un grand degré d'expertise en la matière.

dimanche 25 novembre 2012

Dimanches rétro: l'interprétation restrictive des clauses boomerang

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Les clauses boomerang (communément appelées clauses shotgun) sont des mécanismes puissant de règlement de différends lorsque utilisées de manière appropriée. Par ailleurs, leur effet est drastique puisque l'on parle essentiellement d'un droit contractuel d'expropriation. C'est pourquoi la Cour d'appel, dans sa décision charnière sur la question de 2008 dans Trépanier c. Trépanier, a posé le principe voulant que de telles clauses sont d'interprétation stricte et restrictive.

samedi 24 novembre 2012

La veille juridique: nos billets préférés de la semaine du 18 novembre 2012

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Comme c'est le cas chaque samedi, nous partagerons avec vous les liens vers nos billets préférés de la blogosphère juridique canadienne (et parfois américaine). Nous le faisons dans l'espoir de vous faire découvrir d'autres blogues juridiques intéressants et pour encourager la libre circulation de l'information juridique. Cette semaine, le retour tant attendu d'un de mes bloggeurs préférés :
 

vendredi 23 novembre 2012

L'erreur de droit ne peut être un motif d'annulation d'une transaction

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Court billet pour terminer la semaine de travail sur une question simple, mais importante touchant la validité des transactions. La signature d'une transaction est un geste lourd de conséquences puisque l'on renonce inévitablement à faire valoir certains droits. Qui plus est, comme le stipule clairement l'article 2634 C.c.Q., l'erreur de droit ne donnera pas ouverture à l'annulation de ladite transaction. L'affaire Demers c. Tremblay (2012 QCCS 5776) illustre cette réalité.

Le dépôt de procédures floues et incompréhensibles est un abus qui doit être sanctionné par leur rejet

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

En janvier dernier, j'attirais votre attention sur une décision de la Cour supérieure qui déclarait abusive et rejetait une procédure dont la rédaction était telle qu'elle la rendait incompréhensible (voir notre billet ici: http://bit.ly/WGeTrm). Plusieurs d'entre vous m'ont écrit pour exprimer l'opinion qu'il semblait d'un cas d'espèce puisque la partie demanderesse se représentait seule et qu'on voyait rarement des procédures aussi incompréhensibles. Or, mes amis, vous aviez tort. En effet, dans El-Hachem c. Decary (2012 QCCA 2071), la Cour d'appel vient de confirmer un jugement rendu sous l'égide de l'article 54.1 C.p.c. où la juge de première instance en était venue à la conclusion que la demande reconventionnelle, rédigée par le procureur des Défendeurs, était presque impossible à comprendre, ne semblait pas supportée par quelque élément solide et l'avait rejetée.
 

jeudi 22 novembre 2012

Le demandeur en diffamation doit établir que le caractère diffamatoire des propos tenus à son égard et la faute de la partie défenderesse

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

C'est à tort que certains soumettent que, dans des procédures en diffamation, l'établissement que les propos prononcés par la partie défenderesse sont diffamatoires entraîne nécessairement la conclusion qu'il y a faute civile. En effet, en plus de caractère diffamatoire des propos, il faut prouver la faute comme le souligne l'Honorable juge Georges Taschereau dans Équipe Labeaume c. Syndicat des fonctionnaires municipaux de Québec (2012 QCCS 5713).
 

La cour n'a pas le pouvoir de changer le nombre d'arbitres désignés dans une clause compromissoire

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Un court billet ce matin pour traiter du processus de nomination des arbitres conventionnels. On le sait, lorsque les parties ne s'entendent pas sur le choix de leur arbitre (ou lorsque les arbitres désignés par les parties ne s'entendent pas sur le troisième arbitre), une des parties peut s'adresser à la Cour. Par ailleurs, dans Letendre c. Letendre (2012 QCCS 5707), se pose la question de savoir si la Cour peut, à la demande d'une partie, changer le nombre d'arbitres prévus à la clause compromissoire. L'Honorable juge François Tôth répond à cette question par la négative.

mercredi 21 novembre 2012

Le fait qu'un des associés du cabinet devra témoigner, n'empêche pas un bureau d'avocats de se représenter lui-même

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Il existe tout un corpus de jurisprudence sur l'habilité d'un cabinet à continuer à représenter un client lorsqu'un de ses membres doit témoigner. Généralement, on dira que le cabinet ne peut continuer à agir lorsque ledit témoignagne touche une question pertinente au fond du litige et qu'il est nécessaire. Dans Picard Sirard Poitras c. Messier-Houle (2012 QCCS 5735), la question se pose par ailleurs de savoir si cette règle s'applique même lorsque le cabinet en question se représente lui-même.
 

Un employé peut se prévaloir d'une clause pénale contenue dans un contrat d'emploi sans avoir à mitiger ses dommages

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Nous en avons déjà traité sur le blogue, en droit de l'emploi québécois, un employé ne peut renoncer d'avance à une indemnité de départ raisonnable de sorte que les clauses qui fixent d'avance cette indemnité ne peuvent être opposées à l'employé (voir un de nos billets sur la question ici: http://bit.ly/10cE58T). La décision très récente de la Cour d'appel dans Walker c. Norcan Aluminium inc. (2012 QCCA 2042) vient cependant apporter un caveat très important à cette affirmation: dans le cas d'un contrat de travail à durée déterminée, l'employé pourra invoquer la clause pénale par laquelle les parties avaient liquidé d'avance les dommages payables en cas de terminaison sans cause juste et suffisante. Qui plus est, dans un tel cas, l'employé n'aura pas à mitiger ses dommages.

mardi 20 novembre 2012

Même en l'absence de mauvaise foi, une partie peut se voir opposer une fin de non-recevoir

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Déjà en septembre 2011, j'attirais votre attention sur une décision de la Cour supérieure qui posait le principe voulant que l'on peut conclure à une fin de non-recevoir même en l'absence de mauvaise foi (voir le billet en question ici: http://bit.ly/WuARxx). Or, la Cour d'appel, dans Groupe Trans-inter inc. c. Ragusa Canada inc. (2012 QCCA 2033) vient de rendre une décision au même effet.
 

La conclusion par laquelle une partie réserve ses droits est inutile

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Un court billet ce matin afin de m'attaquer à une pratique que je désire vivement enrayer: i.e. les conclusions par lesquelles les parties réservent leur droit (quel que soient ces droits). Ces conclusions sont complètement inutiles simplement parce qu'elle ne veulent rien dire. C'est donc avec grand plaisir que j'ai pris connaissance des commentaires de l'Honorable juge Clément Gascon dans Montréal (Ville de) c. Bergeron (2012 QCCA 2035) à l'égard des réserves de droit.

lundi 19 novembre 2012

Ce n'est qu'exceptionnellement que la Cour découpera une expertise pour en garder seulement les extraits recevables

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Le 1er juin dernier, j'attirais votre attention sur la décision de la Cour supérieure dans l'affaire Poulin c. Presse Ltée. (La) (2012 QCCS 2368) où l'Honorable juge Nicole-M. Gibeau avait rejeté la presque totalité d'une expertise au motif qu'elle se prononcait sur des questions de droit à être ultimement tranchées par la Cour (voir le billet en question ici). Or, la Cour d'appel est récemment venue en grande partie confirmer cette décision, rejetant cependant certains extraits du rapport qu'elle considérait recevables. Ce faisant, elle a cependant indiqué que ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles que cet exercice de découpage sera entrepris, le rapport devant habituellement être jugé dans son ensemble. La décision est indexée sous  Presse ltée (La) c. Poulin (2012 QCCA 2030).
 

La divulgation involontaire d'une communication privilégiée pourrait causer la perte du secret professionnel?

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Je vous ne le cache pas, il n'est pas rare que je rencontre des personnes qui sont d'opinion que ma rédaction du présent blogue est une mauvaise idée. Les raisons qui me sont le plus souvent données sont, dans l'ordre: (1)  que je partage gratuitement mon "expertise" et le fruit de mon travail (ce à quoi je réponds que je suis d'opinion qu'une plus grande dissémination gratuite de l'information juridique est à l'avantage de tous), (2) que je donne à mes adversaires des munitions pour invoquer contre moi des billets que j'ai écris (ma réponse: bof) et (3) que je risque d'offusquer les juges qui ont rendu les décisions dans les rares cas où je critique un énoncé de droit ou un résultat particulier. Pour ce qui est de ce dernier point, je suis d'avis que la critique constructive est essentielle à l'avancement et au développement du droit. Qui plus est, mes critiques ne sont jamais personnelles et ne vise que l'énoncé de droit ou le résultat, de sorte que j'espère n'offusquer personne. Pourquoi en parler ce matin? Parce que je suis en vif désaccord avec la décision rendue par la Cour divisionnaire d'Ontario dans  Fernandes v. Marketforce Communications (2012 ONSC 6392).
 

dimanche 18 novembre 2012

Dimanches rétro: la renonciation au secret professionnel lorsqu'on prétend s'être fié aux conseils de ses procureurs

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Nous avons déjà attiré votre attention sur la jurisprudence québécoise qui souligne que la partie qui allègue ou témoigne s'être fiée aux conseils de ses avocats renonce implicitement au secret professionnel (voir nos billets ici: http://bit.ly/XSGk1r et ici: http://bit.ly/ZSSarU). La genèse québécoise de ce courant jurisprudentiel se retrouve dans la décision de 1999 de la Cour d'appel dans Saint-Alban (Municipalité de) c. Récupération Portneuf inc. (1999 CanLII 13284) dont nous traitons aujourd'hui.

samedi 17 novembre 2012

La veille juridique: nos billets préférés de la semaine du 11 novembre 2012

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Comme c'est le cas chaque samedi, nous partagerons avec vous les liens vers nos billets préférés de la blogosphère juridique canadienne (et parfois américaine). Nous le faisons dans l'espoir de vous faire découvrir d'autres blogues juridiques intéressants et pour encourager la libre circulation de l'information juridique. À vos lectures chers juristes  :
 

vendredi 16 novembre 2012

Jurisprudence contradictoire en matière de testament olographe écrit via un moyen technologique

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Le 19 septembre dernier, j'attirais votre attention sur une décision de la Cour supérieure qui posait le principe voulant qu'un document dactylographié ou écrit par ordinateur, même lorsque signé à la main, ne pouvait se qualifier à titre de testament olographe (voir notre billet ici: http://bit.ly/T5P9Bo). Or, dans la récente décision de Gendreau c. Laferrière (2012 QCCS 5525), un autre juge de la Cour supérieure vient d'en arriver à la solution contraire.

La mise en demeure : la mal-aimée du droit

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Pauvre mise en demeure ! Trop souvent reléguée aux oubliettes, qualifiée de simple lettre sans conséquence et parfois même ridiculisée pour son contenu biaisé.Vraiment, la mise en demeure est la mal-aimée du droit civil. Reste qu’elle est non seulement utile, mais souvent essentielle à la viabilité d’un recours judiciaire. Dans un billet récent, j’ai déjà fait état de son caractère presque toujours impératif en matière de vices cachés, mais il y a plus.
 

jeudi 15 novembre 2012

L'inclusion d'une clause de médiation obligatoire dans un contrat n'empêche pas une des parties d'aller directement à l'arbitrage

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Les clauses de médiation obligatoire le sont-elles vraiment? C'est là une question que les plaideurs se posent fréquemment puisque plusieurs contrats contiennent la stipulation que les parties devront tenter de régler leur différend à l'amiable avant de pouvoir soumettre celui-ci à l'arbitrage. La décision récente rendue par l'Honorable juge Scott Hugues dans Corporation Inno-Centre du Québec c. Média Opti Rythmix (2012 QCCQ 8980) semble indiquer que de telles clauses ne peuvent avoir pour effet d'empêcher une partie d'instituer immédiatement des procédures d'arbitrage.
 

L'inscription en faux est nécessaire pour contester les énoncés d'un procès-verbal de signification

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

À travers les années et les amendements législatifs, la place réservée à la signification a été diminuée. En effet, l'avènement de nouvelles technologies fiables, sécuritaires et efficaces a amené le législateur a ouvrir la porte à la notification. Il ne faut pas pour autant oublier que la signification apporte certains avantages importants, dont le fait que le procès-verbal est un acte authentique pour lequel l'inscription en faux est nécessaire pour en contester le contenu comme le rappelle l'affaire Dolmen (1994) inc. c. Peluso (2012 QCCQ 10173).
 

mercredi 14 novembre 2012

L'oppression est fondamentalement une question factuelle

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

J'ai noté récemment que plusieurs confondent les notions d'oppression et d'abus de droit et je consacrerai bientôt un billet à la question (pour répondre rapidement à la question d'un lecteur, oui un comportement donné peut constituer simultanément de l'oppression et de l'abus de droit, mais ces deux notions ne sont pas redondantes pour autant). Un point que ces deux notions ont par ailleurs en commun c'est que leur détermination est essentiellement et habituellement une question factuelle comme le souligne la Cour d'appel dans Guerrera c. Damiani (2012 QCCA 2007).
 

Dans le cadre du processus de communication de la preuve, l'on peut forcer la partie adverse à signer des autorisations nous permettant d'obtenir des documents d'une tierce partie

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Un court billet ce matin qui touche à une question importante en matière de communication de la preuve. On dira généralement que, lors d'un interrogatoire préalable, une partie ne peut être tenue de communiquer les documents qui ne sont pas sous son contrôle. Comme le souligne l'affaire Gestion CDGM inc. c. Roux (2012 QCCS 5560), on peut cependant demander à ce que la partie adverse signe une autorisation pour que l'on puisse obtenir des documents pertinents en possession d'une tierce partie.
 

mardi 13 novembre 2012

Toute demande de récusation doit d'abord être présentée au décideur visé

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Pour que notre système de tribunaux administratifs fonctionnent efficacement, il faut éviter, dans la mesure du possible, que les parties se retrouvent constamment devant les tribunaux judiciaires. C'est pourquoi, l'on exige généralement que les parties épuisent tous les recours disponibles avant de se retrouver devant ceux-ci. C'est le cas en matière de récusation comme le souligne l'Honorable juge Pierre J. Dalphond dans Faucon bleu 2 Québec inc. c. Régie des alcools, des courses et des jeux (2012 QCCA 1995).

L'obligation de motivation des décisions administratives n'impose pas que l'on expose toutes les étapes du raisonnement logique du décideur, mais les motifs doivent logiquement supporter le résultat

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Aussi frustrant est-ce que cela soit pour les plaideurs, les décideurs administratifs, s'ils ont l'obligation de donner des motifs pour leur décision, ne sont pas obligés de détailler chaque étape de leur raisonnement. Selon la Cour d'appel dans l'affaire Matchewan c. Centre communautaire juridique de l'Outaouais (2012 QCCA 2000), cela n'empêche pas que les décideurs administratifs doivent donner des motifs qui supportent logiquement le résultat.

lundi 12 novembre 2012

L'employé qui utilise des informations confidentielles pour démarrer son entreprise concurrente viole son devoir de loyauté

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

En décembre dernier, j'attirais votre attention sur un courant de jurisprudence qui indique que le simple fait pour un employé de travailler à mettre sur pieds une entreprise concurrente n'équivaut pas à une contravention de son devoir de loyauté (voir le billet en question ici: http://bit.ly/VXTfi3). Cela suppose cependant que l'employé en question n'utilise pas de l'information confidentielle pour se faire. Si c'est le cas, l'émission d'une ordonnance d'injonction sera tout à fait appropriée comme le souligne la Cour supérieure dans Sher-Wood Hockey inc. c. Mathieu (2012 QCCS 5517).

Les procédures d’une commission d’enquête ne peuvent être l’objet d’une injonction ou une requête en révision judiciaire

par Samuel Grondin
Étudiant en droit, Université de Sherbrooke

Lorsque la loi octroie à un organisme particulier des pouvoirs d’enquête qui sont assimilés à ceux des commissaires en vertu de la Loi sur les commissions d’enquête, il importe de bien comprendre les implications qui en découlent. Le jugement Saulnier c. Régie du bâtiment (2012 QCCS 5564) démontre ce fait en rappelant la disposition législative à l’effet que les recours en injonction ou en révision judiciaire visant les procédures des commissaires sont prohibés.
 

dimanche 11 novembre 2012

Dimanches rétro: le respect des conclusions et inférences factuelles de première instance

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'appel, on le sait, n'est pas une audition de novo. Les conclusions factuelles et les inférences tirées par le juge de première instance méritent une grande déférence en appel. Aujourd'hui, dans le cadre de la série des Dimanches rétro, nous traitons de la décision de principe de la Cour suprême en la matière, Housen c. Nikolaisen ([2002] 2 R.C.S. 235).

samedi 10 novembre 2012

La veille juridique: nos billets préférés de la semaine du 4 novembre 2012

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Comme c'est le cas chaque samedi, nous partagerons avec vous les liens vers nos billets préférés de la blogosphère juridique canadienne (et parfois américaine). Nous le faisons dans l'espoir de vous faire découvrir d'autres blogues juridiques intéressants et pour encourager la libre circulation de l'information juridique. Sans plus attendre, la crême :
 

vendredi 9 novembre 2012

La demande d'annulation d'une transaction homologuée doit être présentée dans les mêmes délais que la demande de rétractation de jugement

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Quel est le délai applicable à une demande d'annulation d'une transaction homologuée par la Cour? C'est la question à laquelle devait répondre l'Honorable juge Pierre Ouellet dans Voyer c. Voyer (2012 QCCS 5562). Celui-ci en vient à la conclusion qu'une telle demande équivaut à une rétractation de jugement et répond donc au même délai.

Pour avoir gain de cause dans un recours en diffamation, il faut prouver plus que l'atteinte possible à la réputation

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

En août dernier, j'attirais votre attention sur l'importance, dans un recours en diffamation, de prouver la diffusion généreuse de l'information et une véritable atteinte à la réputation, par opposition à la simple possibilité que la réputation d'une personne donnée soit atteinte (voir le billet en question ici: http://bit.ly/RJpf6n). Nous continuons aujourd'hui dans la même veine en traitant de la décision rendue par l'Honorable juge Johanne Mainville dans Larivière c. 1050386 Canada inc. (Trinome Conseils) (2012 QCCS 5555).
 

jeudi 8 novembre 2012

Il appartient au requérant en forum non conveniens d’apporter la preuve, même sommaire, de la compétence des autorités étrangères à se saisir du litige

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Les critères applicables à une requête en forum non conveniens sont biens connus (voir notre billet de janvier 2012 ici: http://bit.ly/SU0k0O). Cependant, comme nous l'avions souligné en mars dernier en traitant de la décision de la Cour d'appel dans l'affaire Bennaouar (voir notre billet ici: http://bit.ly/YSpbEd), il faut ajouter à ces critères le fardeau qui pèse sur la partie requérante de prouver que les tribunaux de l'état que l'on prétend mieux placé pour trancher le litige sont compétents pour entendre celui-ci. La récente décision de la Cour supérieure dans Alarium inc. c. De la rue international Ltd. (2012 QCCS 5523) met en application ces principes, tout en ajoutant que la preuve de la compétence de l'autorité étrangère est une preuve sommaire.
 

Un règlement municipal visant spécifiquement un terrain ne revêt pas le caractère général et impersonnel requis par la loi

Étudiant en droit, Université de Sherbrooke

En vertu de la Loi sur les règlements, ces derniers doivent être généraux, impersonnels et contenir une norme à respecter. Ainsi, un règlement ne peut, dans sa formulation, viser une situation spécifique – situation relativement rare en jurisprudence comme le mentionne la doctrine. Le jugement Lac-Sergent (Ville de) c. Lapointe (2012 QCCA 1935) constitue un exemple de ce type de règlement qui peut, en raison de la nullité découlant de sa formulation, amener incidemment à créer l’inverse de la situation recherchée.
 

mercredi 7 novembre 2012

Une compagnie volontairement dissoute ne peut obtenir jugement

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Un très court billet cet après-midi qui touche quand même à une question d'importance en matière de droit corporatif. En effet, dans Fédération de soccer du Québec c. Corporation TotalCampo 2002 Inc. (2012 QCCA 1946), la Cour d'appel indique qu'une compagnie volontairement dissoute ne peut obtenir jugement.
 

Un juge peut rendre, proprio motu, des ordonnances de gestion

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

La réforme du 2003 de la procédure civile a donné beaucoup plus d'outils de gestion à la magistrature. C'est pourquoi, à titre de plaideur, l'on se doit d'être préparé pour discuter de toute facette d'un dossier lorsqu'on se présente à la Cour puisque, comme le confirme l'Honorable juge Pierre J. Dalphond dans Ewen c. Pressman (2012 QCCA 1957), il est possible et approprié pour un juge de rendre des ordonnances de gestion proprio motu, dans la mesure bien sûr où ces ordonnances n'empiètent pas sur les droits substantifs des parties.

mardi 6 novembre 2012

Les recours prévus à la Loi sur les sociétés par actions du Québec ne peuvent être exercés pour des faits survenus avant son entrée en vigueur

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'adoption et l'entrée en vigueur subséquente de la Loi sur les sociétés par actions du Québec a officiellement introduit pour les compagnies québécoises le recours en oppression. Avant cette entrée en vigueur, les recours de ce type devaient se fonder sur le pouvoir de surveillance et contrôle de la Cour supérieure (art. 33 C.p.c.). Il n'est donc pas surprenant que des questions de droit transitoire se posent à savoir si l'on peut utiliser les recours prévus dans la nouvelle loi même si les faits générateurs de la cause d'action ont eu lieu avant son entrée en vigueur. Cette question s'est posée récemment dans l'affaire Sawyer et Teller-Sawyer (2012 QCCS 5416).
 

Lorsque saisie d'une requête en rejet d'action, la Cour doit prendre en considération la possibilité pour une partie de faire valoir que l'état du droit sur une question devrait changer

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

On le sait, lorsque saisie d'une requête en rejet, la Cour doit faire preuve de prudence. C'est non seulement le cas parce que la preuve au stade préliminaire n'est pas complète, mais également parce qu'il faut, comme le souligne l'affaire Laberge c. Gemme (2012 QCCS 5453), laisser de la place à la possibilité que la partie demanderesse établisse qu'une nouvelle voie jurisprudentielle sur un point donné s'impose. En effet, le droit n'est jamais figé.

lundi 5 novembre 2012

Lorsque l'exécution provisoire rendrait le droit d'appel illusoire, il est parfois approprié de suspendre celle-ci même lorsque les critères habituels ne sont pas rencontrés

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

La suspension d'une ordonnance d'exécution provisoire en appel n'est pas une mince affaire (voir notre billet ici: http://bit.ly/WpUNCw). C'est pourquoi la décision rendue récemment par l'Honorable juge Allan R. Hilton dans Brais c. Québec (Procureur général) (2012 QCCA 1918) a attiré notre attention. Dans celle-ci, le juge Hilton indique qu'il existe des circonstances où le droit d'appel devriendrait illusoire sans la suspension de l'exécution provisoire et que cela suffit pour ordonner sa suspension, même lorsque les critères traditionnels ne sont pas rencontrés.

Ce n'est pas contredire un acte que de faire la preuve des circonstances qui ont entouré sa signature pour établir son objectif

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Nous traitons régulièrement, au chapitre de la preuve testimoniale, de la distinction à faire entre la preuve qui tend à contredire un écrit et celle qui tend à l'interpréter ou le mettre de son contexte approprié. Or, comme nous l'avons préalablement souligné, les tribunaux québécois se montrent de plus en plus permissifs à l'égard de la preuve de contexte, tel que l'illustre la récente décision de la Cour d'appel dans Placements Suclo ltée. c. Métro Richelieu inc. (2012 QCCA 1929).
 

dimanche 4 novembre 2012

Dimanches rétro: la retenue quant à l'utilisation en droit civil des précédents de common law

par Samuel Grondin
Étudiant, Université de Sherbrooke

En matière de jugements classiques, les enseignements du juge Mignault dans Desrosiers v. The King (remontant à 1920) sont toujours, presqu’un siècle plus tard, pertinents. Si au cours de l’histoire juridique canadienne, le droit civil et la common law ont tous deux évolués l’un par rapport à l’autre et se sont quelque peu influencés de sorte que des concepts inhérents au droit anglais ont été empruntés et importés en droit civil à l'occasion, cette pratique a toutefois été largement freinée par la Cour suprême du Canada en 1920. En effet, elle a alors pris soin de souligner clairement le fait que le droit civil constitue un système complet par lui-même qui devait s’interpréter d’après ses propres règles.
 

samedi 3 novembre 2012

Veille juridique: nos billets préférés de la semaine du 28 octobre 2012

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Comme c'est le cas chaque samedi, nous partagerons avec vous les liens vers nos billets préférés de la blogosphère juridique canadienne (et parfois américaine). Nous le faisons dans l'espoir de vous faire découvrir d'autres blogues juridiques intéressants et pour encourager la libre circulation de l'information juridique. À vos lectures chers amis! :
 

vendredi 2 novembre 2012

Ces procédures qui deviennent abusives

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Les lecteurs réguliers de la présente chronique savent que je porte une attention particulière à la jurisprudence rendue sous l’égide des articles 54.1 C.p.c. et suivants qui traitent de l’abus. Cet abus découle soit du comportement d’une partie dans le cadre des procédures judiciaires ou du caractère manifestement mal fondé de ces mêmes procédures. Dans ce dernier cas, il existe des situations où une requête introductive d'instance, ou toute autre procédure, est initialement légitime mais où les faits ou les découvertes subséquents la rendent sans objet ou clairement sans chance de succès. Dans cette situation, une partie qui continue ses procédures se trouve à commettre un abus.
 

Les situations où l'absence de mise en demeure entraînera le rejet d'un recours

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
 
Nous discutons régulièrement de la nécessité, en matière de recours pour vices cachés, de la nécessité de dénoncer la problématique par voie de mise en demeure. Mais nous attirons également parfois votre attention sur l'importance des mises en demeure en général (voir notre billet d'août 2011 ici: http://bit.ly/Q9WvVV), et ce particulièrement lorsqu'il importe de donner la chance à la partie adverse de pouvoir commander une expertise. L'affaire Blackburn c. Entreprises service auto électrique Victor & Yves ltée. (2012 QCCQ 8936) offre une belle illustration de ce principe.