jeudi 8 novembre 2012

Un règlement municipal visant spécifiquement un terrain ne revêt pas le caractère général et impersonnel requis par la loi

Étudiant en droit, Université de Sherbrooke

En vertu de la Loi sur les règlements, ces derniers doivent être généraux, impersonnels et contenir une norme à respecter. Ainsi, un règlement ne peut, dans sa formulation, viser une situation spécifique – situation relativement rare en jurisprudence comme le mentionne la doctrine. Le jugement Lac-Sergent (Ville de) c. Lapointe (2012 QCCA 1935) constitue un exemple de ce type de règlement qui peut, en raison de la nullité découlant de sa formulation, amener incidemment à créer l’inverse de la situation recherchée.
 

Les faits de la présente affaire sont relativement simples : un règlement municipal porte sur un lot cadastral précis pour lequel un article prévoit une zone de circulation interdite pour les motoneiges sur ce même lot. Contesté, ce règlement se voit déclaré nul par la Cour d’appel pour les motifs suivants :  
[68] Le professeur Garant explique également, tout en notant qu'il existe « peu de jurisprudence sur la question », « que la norme générale et impersonnelle est celle qui s'applique à un nombre indéterminé de personnes. ». Les auteurs Pierre Issalys et Denis Lemieux reprennent la même expression et expliquent qu'un nombre indéterminé de personnes ne fait pas forcément référence à un « "grand nombre" de personnes », mais à un « ensemble de personnes visé par des termes abstraits et génériques ». Un règlement ne pourrait donc pas viser spécifiquement « [des] personnes ou [des] situations individualisées. ». 
[…] 
[71] La règle selon laquelle un règlement doit avoir une portée générale et impersonnelle apparaît comme une illustration du principe général en vertu duquel « [l]e pouvoir réglementaire ne peut et ne doit être exercé qu'en conformité avec la loi habilitante. ». Ainsi, « [l]e règlement, par son objet ou son contenu, ne doit pas aller au-delà de ce qu'autorise la clause habilitante. ». 
[…] 
[76] Ce pouvoir réglementaire donne en effet aux municipalités la possibilité de faire varier la portée de l'interdiction prévue à l'article 12 de la Loi et ainsi de définir pour l'ensemble de leur territoire (ou, à tout le moins, pour une partie significative de celui-ci) leur propre norme de tolérance à l'égard des véhicules hors route. Dans cette optique, la Ville pouvait très bien décider d'établir cette distance à 23 mètres sur l'ensemble de son territoire, mais elle ne pouvait pas imposer uniquement à Mme Lapointe et son voisin de devoir supporter le passage des motoneiges à une distance plus courte que ce que permet la loi, tout en maintenant pour le reste du territoire de la municipalité la distance minimale établie par défaut à 30 mètres. 
[77] Ainsi, le Règlement 263 et ceux qui l'ont précédé ne sont pas suffisamment généraux et impersonnels de sorte que la déclaration de leur nullité au dispositif du jugement de la Cour supérieure est bien fondée.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/VI7wPJ
 
Référence neutre: [2012] ABD 405

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