samedi 10 décembre 2016

Par Expert: il n'est pas toujours possible d'exclure la partie de l'expertise qui est irrecevable

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Généralement, on dira qu'il n'est pas utile de faire radier une partie d'une expertise avant le procès. Cependant, dans certaines circonstances, l'on jugera la partie irrecevable de l'expertise trop importante ou trop "toxique" pour accepter celle-ci et le rapport au complet sera rejeté. Ce fut le cas dans l'affaire Banque de Montréal c. Mercille (2016 QCCS 6777) où l'Honorable juge Louis J. Gouin jugea nécessaire d'exclure l'expertise au complet.



Dans cette affaire, le juge Gouin est saisi d'une demande en rejet de l'expertise de la Demanderesse. Les Défendeurs plaident qu'une partie importante de celle-ci tient de l'opinion juridique et est donc irrecevable.

Après analyse, le juge Gouin en vient à la conclusion que la demande doit être accueillie. En effet, non seulement est-ce qu'une partie de l'expertise est irrecevable selon lui, mais il n'est pas fonctionnellement possible d'écarter cette partie seulement:
Après avoir pris connaissance de la Demande et entendu les représentations des procureurs des parties, le Tribunal accueillera en partie la Demande; 
Essentiellement, le Tribunal est d’avis que Me Brunelle a dépassé les limites applicables à une expertise, et ce, en donnant clairement une opinion quant  à la responsabilité du notaire Mercille, tout comme s’il donnait une opinion à la Demanderesse pour justifier qu’elle prenne action, ou tout comme s’il était sur le banc et rédigeait le jugement à rendre; 
Tel qu’établi par la jurisprudence, l’expert ne doit pas  franchir la frontière entre l’explication d’une pratique légale ou notariale particulière et l’opinion sur les faits d’un dossier. Certes,  il peut y avoir certains écarts, mais le tout doit être bien mesuré. 
Dans la présente affaire, le Tribunal est d’avis, entre autres, que la rubrique du rapport de Me Brunelle intitulée «3. Application des principes aux faits en l’espèce» constitue une opinion pure et simple du cas soumis au Tribunal, ce qui ne relevait pas du rôle de Me Brunelle. 
Aussi, dans un tel cas, le Tribunal ne peut tout simplement pas dire qu’il reviendra au juge du fond de faire abstraction, entre autres, de cette rubrique, car en laissant, entre autres, une telle rubrique, cela «polluerait» la neutralité à laquelle on doit s’attendre dans un rapport d’expert.
Mise à jour

L'Honorable juge Marie-Josée Hogue a refusé la permission d'en appeler de ce jugement dans Banque de Montréal c. Mercille (2017 QCCA 141). Nous avons traité de cette décision le 21 janvier 2017.

Référence : [2016] ABD Expert 50

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