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Nous en avons déjà traité: règle générale, l'envoi d'une mise en demeure est une condition essentielle à la validité d'un recours civil en dommages pour des coûts de réparation. La Loi prévoit cependant deux exceptions importantes, i.e. la demeure par l'effet de la loi et celle par l'effet d'un contrat. C'est donc sans surprise que l'on prend connaissance de la décision de la Cour d'appel dans Compagnie de location d'autos Enterprise Canada c. Baseball Senior Élite de Sherbrooke (2023 QCCA 1542), où elle rappelle que l'envoi d'une mise en demeure n'est pas nécessaire avant que des réparations soient effectuées lorsque le contrat de location d'un véhicule prévoit expressément la demeure.
Dans cette affaire, l'Appelante se pourvoit à l'encontre d'un jugement de première instance qui a accueilli une demande en rejet à l'encontre de son recours en dommages contre l'Intimée.
L'Appelante allègue dans son recours avoir loué un véhicule à l'Intimée, qui l'a abîmé pendant la période de location. L'Appelante a mis l'Intimée en demeure, mais seulement après avoir effectué les réparations. C'est ce qui amène la juge de première instance à conclure que le recours n'a pas de chance de succès et à accueillir la demande en rejet.
Une formation unanime de la Cour composée des Honorables juges Dutil, Gagnon et Hardy casse le jugement de première instance. Ce faisant, la Cour indique que l'obligation d'envoyer une mise en demeure prévue à l'article 1602 C.c.Q. cède le pas aux modalités du contrat lorsque ce dernier prévoit la demeure automatique:
[6] La Cour est d’avis que le pourvoi doit être accueilli. Deux clauses du contrat intervenu entre les parties sont au cœur du litige. Elles prévoient que l’intimée accepte de payer les dommages subis par le véhicule pendant la période de location et que cette dernière n’a pas le droit d’effectuer ou de faire effectuer les réparations requises :4a) Si le VÉHICULE est endommagé pendant qu’il vous est loué en vertu du présent contrat, vous acceptez de rembourser la COMPAGNIE pour tout dommage subi, incluant le coût des réparations du VÉHICULE, la perte d’usage pour la COMPAGNIE sur celui-ci pendant sa réparation et les frais de transport ou remorquage et les frais administratifs pouvant atteindre 250$.
9) Vous devez aviser la COMPAGNIE de tout bris du VÉHICULE dans les vingt-quatre (24) heures de celui-ci. Vous n’avez nullement le droit d’effectuer ou de faire effectuer une réparation quelconque au VÉHICULE, peu importe qu’elle ait été rendue nécessaire par votre faute ou non. Vous ne pourrez en aucun cas être considéré mandataire ou un agent de COMPAGNIE pour cette fin ou autrement.[7] Il ressort du contrat que l’intimée a contracté trois obligations : 1) rapporter le véhicule dans le même état qu’elle l’a reçu; 2) ne pas réparer ou faire réparer les dommages au véhicule; et, 3) rembourser l’appelante pour les dommages subis par le véhicule pendant la location.
[8] La demande de l’appelante en dommages se fonde sur la clause 4a) du contrat de même que sur l’article 1862 al. 1 C.c.Q., lequel prévoit que le locataire est tenu de réparer le préjudice subi par le locateur en raison des pertes survenues au bien loué, à moins qu’il ne prouve qu’elles ne soient pas dues à sa faute ou à celle des personnes à qui il a permis l’usage du bien ou l’accès à celui-ci. En l’espèce, il ne s’agit pas d’une obligation en nature, mais bien d’une obligation pécuniaire à payer les dommages. L’article 1602 C.c.Q ne s’applique donc pas.
Référence : [2024] ABD 2[9] La mise en demeure du 8 février 2021 n’était donc pas tardive et la juge aurait dû rejeter la demande en rejet présentée par l’intimée.
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