mardi 30 août 2016

Ce n'est pas au stade interlocutoire d'un dossier qu'il fait se pencher sur la suffisance de la preuve des dommages

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà souligné à quelques reprises que - dans le cadre d'une requête en irrecevabilité ou en rejet d'action - la Cour n'a pas à se pencher sur la difficulté qu'aura la partie demanderesse à prouver ses allégations. Et bien ce principe s'applique également à la quantification des dommages allégués. Comme le souligne l'Honorable juge Lucie Fournier dans Dias c. Wilson (2016 QCCS 4084), ce n'est qu'au procès que l'on jugera la suffisance de la preuve des dommages.



Dans cette affaire, la juge Fournier est saisie d'une requête en irrecevabilité et pour déclaration d'abus à l'encontre du recours des Demandeurs. Cette requête soulève plusieurs reproches à l'égard du recours intenté, dont le fait que les Demandeurs sont incapables de justifier le montant réclamé dans la procédure leur de leur interrogatoire préalable ou suite aux réponses aux engagements.

Après analyse, la juge Fournier rejette l'argument plaidé par les Défendeurs, et ce même si elle convient que la preuve du quantum est très mince. Elle indique que c'est au procès que l'on devra juger de la preuve des dommages et du quantum puisqu'il reste des étapes avant le procès (dont présumément le dépôt d'une expertise):
[41]        En ce qui concerne les dommages réclamés par les demandeurs, les défendeurs soutiennent dans leur requête :
79.   In the Landlord Action, the Plaintiffs claim that no liquor licence was awarded to Wilson Holdco (para 11), an allegation that is clearly false, as evidenced by the Wilson Permit Decision, and which is contradicted in the Amended Introductory Motion wherein it is clearly acknowledged that Cherry opened and operated beginning in June 2011;  
80.   The ‘’economic loss’’ allegedly suffered by the Plaintiffs is said to me $700,000 in the Amended Introductory Motion but $300,000 in the Landlord Action;  
81.   The Plaintiffs’ ‘’moral damages’’ are $50,000 in the Amended Introductory Motion but $90,000 in the Landlord Action; 
[42]        Lorsque M. Dias est interrogé, il souscrit les engagements suivants : 
#U-13 : Provide how the amount of damages of $700,000.00, as well as an additional $50,000.00 as moral damages was arrived at.  
#U-14 : Provide evidence of the profitability of Cherry Bar that was used in calculating the damages of $700,000.00. 
[43]        Pour les défendeurs, une telle réclamation est abusive si elle n'est pas appuyée d'écrits ou si aucune explication n’est fournie relativement à sa quantification. 
[44]        Il est vrai que les allégations de la procédure introductive d’instance sont laconiques, particulièrement en ce qui concerne les dommages et au vu de leur importance. De même, les engagements fournis ne permettent pas de comprendre leur calcul. Ainsi, comme réponse à l’engagement U-13, les demandeurs fournissent des projections financières ne portant aucune date ni indication de leur auteur. Quant à l’engagement U-14, il s’agit de rapports et de documents comptables sans lien ou justification entre eux. Il apparaît clairement que cela n’est pas suffisant et que ces documents ne sont pas concluants sur les dommages réclamés. Toutefois, d’autres étapes sont à venir qui obligeront les demandeurs à compléter leur dossier et à faire leur lit sur la poursuite contre les défendeurs pour un montant substantiel. S’il s’avère, à ce moment, que leur démarche est abusive, leur comportement pourra être sanctionné. Le juge du fond ou celui confronté à l’insouciance ou à la témérité des demandeurs, ou de leurs avocats, de soumettre à la cour un dossier sans aucune chance de succès pourra sanctionner un tel comportement. Il apparaît imprudent, au stade préliminaire où en est le dossier, de conclure immédiatement à un tel abus.
Référence : [2016] ABD 345

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