jeudi 31 octobre 2013

Dans une action contre plusieurs défendeurs, la partie demanderesse peut choisir le district judiciaire du domicile d'un d'entre eux

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Depuis l'entrée en vigueur du Code civil du Québec en 1994, il importe de distinguer clairement les règles régissant la compétence internationale des tribunaux québécois (que l'on retrouve au livre X du Code civil du Québec) et celles régissant la compétence territoriale, i.e. le district approprié pour déposer une action (que l'on retrouve aux articles 69 et suivants du Code de procédure civile). Dans le premier cas, les tribunaux québécois doivent avoir compétence pour chacun des défendeurs. En effet, il est possible que les tribunaux québécois soient compétents pour entendre une action contre certains des défendeurs, mais pas contre certains autres (voir, mutatis mutandis, notre billet du 4 décembre 2012). Pour ce qui est du district judiciaire cependant, c'est la règle contraire qui s'applique. Comme l'indique l'affaire Dépanneur Michel Parent inc. c. Sobeys Québec inc. (2013 QCCS 5307), dès que l'on peut assigner une des parties défenderesses devant un district donné, les autres défenderesses ne peuvent contester le choix de la partie demanderesse.
 


D'avis que le choix par les Demandeurs du district judiciaire de Joliette pour le dépôt de leurs procédures contre les Défendeurs est inapproprié, la Défenderesse Sobeys Québec inc. soulève un moyen déclinatoire visant à renvoyer l’action devant la Cour supérieure du district de Montréal, soit le tribunal du lieu où elle a son siège social.

Pour leur part, les Demandeurs plaident avoir opté, comme ils en avaient le choix, pour la compétence du district de Joliette, lieu du domicile de certains des Défendeurs.
 
L'Honorable juge Clément Trudel donne raison aux Demandeurs, soulignant que le choix du district judiciaire revient aux Demandeurs dans la mesure où un des Défendeurs peut être assigné dans le district judiciaire choisi:
[20]        Par ailleurs, il coule de source qu’un seul tribunal est compétent pour juger un même litige. Dans cette optique, il s’avère impossible d’appliquer la règle de compétence de principe lorsque le litige concerne plusieurs défendeurs domiciliés dans des districts différents. En ce cas, l’article 75 (103) offre au demandeur la possibilité de porter l’action personnelle ou mixte dans le district où l’un d’eux est domicilié; alors qu’il impose au demandeur l’obligation de porter son action réelle dans le district où se situe l’objet en litige. À toutes fins utiles, le but du législateur consiste à faire en sorte qu’une action contre plusieurs défendeurs domiciliés dans des districts différents puisse être intentée dans un seul et même district. 
[21]        Dans l'arrêt Baird c. Matol Botanical International Ltd., la Cour d'appel a rappelé que la charge probatoire en pareil cas pèse sur le demandeur : 
« La jurisprudence constante veut que le demandeur doive alléguer tous les éléments nécessaires pour justifier la compétence territoriale du tribunal devant lequel l'action est instituée. Si cette compétence est mise en question par une requête pour exception déclinatoire et si les faits sont contestés, le demandeur a le fardeau de prouver, par une preuve présentée dans le cadre de la requête pour exception déclinatoire, tous les éléments justifiant la compétence du tribunal. »
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/17GBgSz

Référence neutre: [2013] ABD 435

Autre décision citée dans le présent billet:

1. Baird c. Matol Botanical International Ltd., 1994 CanLII 5569 (C.A.).

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