mardi 10 septembre 2013

Ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles que la Cour d'appel acceptera d'entendre un appel où la question est devenue théorique

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Le 26 avril dernier, j'attirais votre attention sur le fait que la Cour d'appel se réserve la discrétion d'entendre un appel même lorsque le problème factuel qui a donné lieu au litige est devenu théorique. Reste que, comme le rappelle l'Honorable juge Marie St-Pierre dans Société de l'assurance automobile du Québec c. Propriété Provigo ltée. (2013 QCCA 1509), ce pouvoir ne sera exercé que dans des circonstances exceptionnelles (essentiellement lorsqu'il s'agit d'une question de principe qui mérite l'intervention de la Cour).
 

Dans cette affaire, la juge St-Pierre est saisie d'une requête pour permission d'en appeler d'un jugement qui a rejeté une requête introductive d'instance au motif que l'incident qui a donné lieu à la réclamation est un accident automobile aux termes de la Loi sur l'assurance automobile du Québec. En effet, la question qui se posait en l'espèce était celle de savoir si "[u]ne personne qui se blesse en déneigeant un rétroviseur de son véhicule automobile est [...] victime d'un accident au sens de la Loi sur l'assurance automobile?".
 
Or, le Demandeur en première instance est maintenant décédé et ses héritiers ont renoncés à sa succession. Qui plus est, l'État ne désire pas reprendre l'instance, de sorte que le litige est devenu académique.
 
Nonobstant ce qui précède, SAAQ demande à la juge St-Pierre de lui accorder la permission d'appeler au motif que la question est importante et qu'elle se pose régulièrement. Elle ajoute que l'occasion est parfaite pour que la Cour tranche cette question de principe selon elle.
 
Malheureusement pour la SAAQ, la juge St-Pierre ne voit pas ici les circonstances exceptionnelles qui pourraient justifier la Cour à entendre une affaire devenue théorique:
[10] Le débat serait purement théorique. En principe, la Cour n'entend pas ce genre de débat à moins d'exercer son pouvoir discrétionnaire de le faire en raison de circonstances exceptionnelles. 
[11] La SAAQ n'est qu'une mise en cause au dossier de première instance et la partie défenderesse, qui obtiendra autrement la paix judiciaire (le jugement aura effet de chose jugée), s'objecte à la requête. 
[12] En raison de la fréquence de situations donnant lieu à des réclamations semblables à celle qui est à l'origine du présent dossier, je suis convaincue que le présent dossier n'est pas le dernier dossier de nature à permettre à la Cour d'examiner la question : d'autres dossiers viendront et ils permettront un débat contradictoire entre des parties dont les droits seront effectivement en cause. 
[13] Il ne me paraît pas que le présent dossier (tel que constitué) soit un dossier où il y ait lieu d'exercer le pouvoir discrétionnaire d'entendre un appel théorique ou académique. La SAAQ ne réussit pas à me convaincre que la Cour pourrait faire œuvre utile dans ce contexte. Ainsi, l'usage raisonné et raisonnable des ressources judicaires ne milite pas en faveur de la permission d'appeler.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/17Sv4pz

Référence neutre: [2013] ABD 362
 

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