jeudi 11 juillet 2013

La mention "paiement final" sur un chèque et son encaissement n'emportent pas nécessairement extinction de la dette

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Nous en avons déjà traité il y a maintenant plus de deux ans le 18 avril 2011 (le temps passe vite...), mais la question vaut la peine d'être revisitée. Contrairement à la croyance populaire, l'encaissement d'un chèque portant la mention "paiement final" n'implique pas nécessairement extinction complète de la dette. En effet, une telle mention ne créée qu'une présomption simple qui est renversée lorsque le créancier s'objecte à cette mention et donne un délai raisonnable au débiteur pour demander le retour du chèque (ou l'annuler). L'affaire Corporation Alter Moneta c. Questard Technologie inc. (2013 QCCQ 6467) illustre ce principe.


Dans cette affaire, la Demanderesse, une entreprise de location de véhicules, réclame solidairement des Défendeurs le montant de la perte monétaire existant entre le produit de la vente par encan du véhicule loué par les Défendeurs et la valeur résiduelle de celui-ci prévue au contrat. Les Défendeurs contestent l'action pour plusieurs motifs, dont le fait que la Demanderesse a encaissé un chèque portant une mention libératoire.
 
L'Honorable juge Suzanne Vadboncoeur en vient à la conclusion que cette mention libératoire n'éteint pas la dette. En effet, la Demanderesse, avant d'encaiser le chèque, s'est objectée à cette mention et a donné assez de temps au Défendeur pour reprendre celui-ci ou l'annuler:
[47]        Quant à savoir si le chèque de 8 000,03$ est libératoire, le Tribunal considère qu'en l'espèce, la mention « Paiement final » inscrite sur le chèque ne rend pas le paiement libératoire. 
[48]        En effet, la Cour d'appel nous enseigne qu'il n'y a pas de règles universelles en cette matière et qu'il faut analyser chaque cas pour voir si les circonstances peuvent être interprétées comme signifiant que le créancier a voulu accepter le paiement partiel comme étant final et libératoire. Notons que le fardeau de preuve appartient au débiteur, soit celui qui invoque l'extinction de la dette.   
[49]        Ici, c'est nettement le contraire que les faits nous indiquent.  Dès réception du chèque, LUTEX a immédiatement fait savoir aux défendeurs son désaccord par une lettre signifiée par huissier et leur a donné un délai de trois jours pour agir, délai que la jurisprudence considère comme raisonnable.  Aucune acceptation de la part de LUTEX ne peut s'inférer des gestes posés, bien au contraire.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/1564fLm

Référence neutre: [2013] ABD 276

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