par Karim Renno
Osler, Hoskin & Harcourt s.e.n.c.r.l./s.r.l.
Les frais d'expertise devraient-ils être accordés à la partie victorieuse à titre de dommages et intérêts ou à titre de dépens? C'est une des questions dont a traité la Cour d'appel dans Maison Simons inc. c. Lizotte (2010 QCCA 2126), décision dont nous avons traité sous l'angle de l'évaluation de la perte de gains hier, pour trancher une certaine controverse jurisprudentielle.
Dans cette affaire, l'Appelante fait valoir que la juge de première instance a commis une erreur de droit en incluant les frais d'expertise dans les dommages plutôt que dans les dépens. Cette méprise a comme effet d'octroyer à l'intimée des intérêts depuis l'assignation sur des montants qu'elle a déboursés en cours d'instance.
Dans cette affaire, l'Appelante fait valoir que la juge de première instance a commis une erreur de droit en incluant les frais d'expertise dans les dommages plutôt que dans les dépens. Cette méprise a comme effet d'octroyer à l'intimée des intérêts depuis l'assignation sur des montants qu'elle a déboursés en cours d'instance.
Au nom de la Cour, l'Honorable juge France Thibault reconnait d'emblée l'existence d'une certaine controverse:
[42] Le droit au remboursement des frais d'expertise déboursés pour établir l'existence d'un droit a été reconnu par la Cour suprême dans Hôpital Notre-Dame de l'Espérance c. Laurent. Après cet arrêt, il y a eu un débat, tant dans la doctrine que dans la jurisprudence, pour déterminer si les frais d'expertise doivent être inclus dans les dommages ou plutôt faire partie des dépens. Cette détermination a son importance puisque, comme je l'ai déjà écrit, le fait de les inclure dans les dommages permet au demandeur de réclamer l'intérêt et l'indemnité additionnelle depuis l’assignation.
[...][45] L’examen de la jurisprudence permet de constater que certains arrêts de la Cour ont reconnu que le juge de première instance peut, à l’occasion de l’exercice de la discrétion judiciaire que lui confère l’article 477 C.p.c., accorder les frais d'expertise à titre de dommages plutôt qu’à titre de dépens. Toutefois, dans Massinon c. Ghys, un arrêt de principe portant sur les frais d’expertise, la Cour a plutôt choisi de les qualifier comme des dépens. C'est d’ailleurs en fonction de ce dernier arrêt que, dans Godin c. Quintal, la Cour a refusé d'accorder les frais d'expertise à titre de dommages.
Le juge Thibault tranche la question sous l'angle de l'uniformité. En effet, elle souligne l'inéquité d'un processus où la partie demanderesse peut obtenir les frais d'experts à titre de dommages si elle a gain de cause, mais où la partie défenderesse ne pourrait les obtenir qu'à titre de dépens:
[46] Je suis d'avis que les frais d'expertise doivent être attribués au chapitre des dépens comme l’a décidé la Cour dans Massinon c. Ghys et dans Godin c. Quintal précités. Cette solution est logique, raisonnable et, en plus, c’est la seule qui permet un traitement uniforme des parties. En effet, il n’y a aucune raison qui justifie de traiter de façon différente un demandeur, qui a besoin d’une expertise pour établir son droit, et un défendeur, qui a tout autant besoin d’une expertise pour éviter une condamnation. En effet, si l’on devait inclure les frais d'expertise dans les dommages, cela aurait pour conséquence d’obliger un défendeur, qui a obtenu le rejet d’une action, à établir la faute du demandeur pour recouvrer ses frais d'expertise, ce qui n’est pas acceptable.
Référence: [2010] ABD 172
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