jeudi 4 janvier 2024

Pour pouvoir intervenir dans une instance, une personne doit avoir un intérêt personnel dans le litige

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Une personne qui désire intervenir dans un litige doit avoir un intérêt dans ledit litige. Cela implique nécessairement cet intérêt soit personnel et direct - et non simplement moral - comme l'indique l'Honorable juge Bernard Synnott dans l'affaire Succession de Gentili (2023 QCCS 4737).


Dans cette affaire, la Demanderesse dépose des procédures en jugement déclaratoire pour qu’il soit déclaré qu’un document en sa possession ne constitue pas un testament olographe. Les Intervenants - frères et soeurs de la défunte - désirent intervenir au litige.

La Demanderesse s'oppose à cette intervention au motif que les Intervenants n'ont pas d'intérêt direct et personnel dans le débat. Elle plaide que les Intervenants veulent plutôt protéger les droits d'autres membres de la famille.

Après analyse, le juge Synnott donne raison à la Demanderesse et insiste sur la nécessité d'un intérêt personnel pour pouvoir intervenir au litige:
[14] Sur le même sujet, voici comment la juge Michèle Lacroix de cette Cour s’exprime :
[29] En vertu de l’article 772 C.c.Q., en matière de succession, la demande de vérification d’un testament devant témoins peut être faite par toute personne intéressée.

[30] L’intérêt de la demanderesse, pour être suffisant, doit être juridique, direct et personnel, né et actuel, à défaut de quoi la demande pourra être rejetée.

[31] La notion de « tout intéressé » peut se définir comme étant une personne ayant un intérêt direct et personnel à demander la vérification testamentaire.

[32] L’intérêt, c’est l’avantage que retirera la demanderesse du recours qu’elle exerce, s’il est fondé.

[33] La demanderesse n’est ni héritière ni successible. Elle ne retire aucun avantage direct ni personnel du recours exercé. La demanderesse était l’amie de cœur du défunt.

[34] La demanderesse n’a aucun intérêt direct et personnel à demander la vérification des testaments et ne peut ester en justice.
[15] Ici, le Tribunal comprend que les intervenants agissent non pas pour protéger leurs propres intérêts, mais celui de leur neveu Oliver. Aussi louable la démarche soit-elle, cela ne peut leur conférer un intérêt suffisant pour agir comme intervenants. À ce sujet la Cour d’appel écrit :
[16] Selon la jurisprudence, le tiers qui souhaite intervenir à titre agressif dans un litige déjà formé entre des parties doit avoir un intérêt vraisemblable dans celui-ci, fondé sur un lien de droit par rapport à l’objet du litige ou à l’endroit de l’une des parties. L’intérêt doit être juridique, direct et personnel, né et actuel, ou à tout le moins certain. Il doit être réel et direct.

[17] La Cour a déjà expliqué qu’il faut que le droit du tiers « ait été violé ou soit mis en danger de l'être dans la procédure engagée ». De plus, cet intérêt doit porter sur le litige principal, par opposition à un intérêt de nature différente et personnelle à l’intervenant. L’intérêt de l’intervenant potentiel doit « s'apprécier en fonction des effets du jugement sur les droits de la personne qui souhaite intervenir ».

[Soulignement ajouté]
[16] Bref, l’intérêt au mieux moral des intervenants ne leur confère pas l’intérêt suffisant pour intervenir dans la présente affaire.
Référence : [2024] ABD 8

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