lundi 27 septembre 2021

Une partie ne peut invoquer le manquement à un délai de rigueur si elle est elle-même en défaut de respecter ses obligations

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Court billet cet après-midi pour vous parler d'un principe contractuel que je ne connaissais pas, mais qui fait plein de sens. En effet, dans l'affaire Kutschera c. Investissements So-Bel inc. (2021 QCCS 3922), l'Honorable juge Tiziana Di Donato souligne qu'une partie ne peut invoquer un manquement à un délai de rigueur si elle est elle-même en défaut de respecter ses obligations contractuelles. 


Dans cette affaire, la juge Di Donato est saisie d'une action en passation de titre et en dommages suite au refus allégué de la Défenderesse de donner suite à une promesse bilatérale d'achat. 

La Défenderesse conteste pour plusieurs motifs, dont le fait que les Demandeurs n'auraient pas respecté le délai de rigueur stipulé à la promesse d'achat. Les Demandeurs rétorquent que le délai stipulé n'était pas de rigueur, ayant été imposé unilatéralement par la Défenderesse.

Face à des arguments diamétralement opposés sur la question, la juge Di Donato indique qu'elle n'a pas à déterminer si le délai était de rigueur ou pas. En effet, son analyse de la preuve l'amène à conclure que la Défenderesse était elle-même en défaut de respecter ses obligations, de sorte qu'elle ne pourrait se prévaloir d'un manquement à respecter un délai de rigueur: 
[48] So-Bel plaide que l’échéance du 15 août 2016 stipulée au dernier addendum pour signer l’acte de vente est de rigueur et que la promesse d’achat se trouve résolue de plein droit parce que Alfa n’a pas signé l’acte de vente à cette date. 
[49] Alfa rétorque que la clause qui énonce que l’échéance du 15 août 2016 constitue un délai de rigueur ne représente pas l’intention réelle des parties et elle tente d’introduire une preuve testimoniale pour démontrer que les parties ne l’ont ni négociée ni discutée. So-Bel s’oppose à toute preuve testimoniale qui tente de contredire la clause, en soutenant que la clause est claire et donc non sujette à interprétation. 
[50] Le Tribunal a pris l’objection sous réserve et permis le témoignage de MM. Timu et Proulx à ce sujet. Cependant, il est inutile d’en décider. 
[51] En effet, même s’il s’agissait d’un délai de rigueur, So-Bel ne peut l’opposer à Alfa car elle-même fait défaut, à cette date, de respecter ses propres obligations aux termes de la promesse d’achat. Or, une partie ne peut invoquer l’expiration d’un délai de rigueur si elle se trouve elle-même en défaut d’accomplir l’une de ses obligations. C’est le cas en l’espèce.
Référence : [2021] ABD 384

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