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En décembre 2017, nous vous rappelions que ce n'est que dans les cas sans équivoque que le rejet préliminaire pour cause de prescription est possible. Cela s'explique par le fait que le point de départ du délai de prescription est une question hautement factuelle, lequel nécessite habituellement une preuve complète. C'est ce que souligne l'Honorable juge Michel Beaupré dans l'affaire Gestion Martin D'Astous inc. c. WSP Canada inc. (2018 QCCS 5464).
Dans cette affaire, la Défenderesse présente une requête en rejet d'action fondée sur la prescription et le caractère prétendument abusif du recours. Elle plaide que certaines admissions effectuées par le représentant de la Demanderesse dans le cadre de son interrogatoire préalable démontrent que le recours est clairement prescrit.
La Demanderesse rétorque qu'une preuve complète est nécessaire pour décider de la question de la prescription, puisqu'il s'agit d'une question de fait.
Après analyse de la question et rappel de la jurisprudence pertinente, le juge Beaupré se rallie à la position de la Demanderesse. À ce chapitre, il souligne que la prescription est une question hautement factuelle:
[61] Comme la Cour d’appel l’a souligné à plusieurs reprises, et encore récemment, la naissance du droit d’action et le point de départ du délai de prescription extinctive sont des questions hautement factuelles, dont la solution dépend des circonstances propres à chaque cas.
[62] Dans l’arrêt Beaulieu c. Paquet, la Cour d’appel écrit :
« [17] L’article 2880 al. (2) C.c.Q. énonce que le point de départ de la prescription extinctive débute au jour où le droit d'action prend naissance. Dans un arrêt récent, notre Cour précise la portée de cette règle en matière de responsabilité civile :
Le point de départ pour calculer le délai de prescription est le moment « où le droit d’action a pris naissance », soit le moment où l’appelant a connaissance de la faute, du dommage et du lien de causalité. Des suspicions sont insuffisantes pour constituer le point de départ de la prescription. Le délai commencera uniquement à courir lorsque le demandeur prendra connaissance des éléments de la responsabilité.»
(Les soulignements et les caractères gras sont du Tribunal)
[63] Ainsi, le droit d’action ne naît pas uniquement au moment où celui qui veut s’en prévaloir constate un préjudice ou des dommages pour la première fois, mais le premier jour où il a connaissance suffisante, en faisant preuve de diligence raisonnable, que les trois éléments constitutifs de son droit d’action sont réunis, à savoir un préjudice qu’il subit, une faute et le lien de causalité qui les unit.
[64] Les auteurs mentionnent que dans certaines circonstances l’ignorance légitime d’un élément du droit d’action peut être considérée comme un motif de suspension de la prescription suivant l’article 2904 du Code civil du Québec (« C.c.Q. »).
[65] La Cour d’appel a aussi souligné que l’absence de connaissance des faits donnant ouverture à un recours, dont, il faut le comprendre, l’ignorance d’une faute ou de son lien de causalité avec le préjudice constaté, peut dans certaines circonstances particulières constituer une impossibilité d’agir qui suspend le cours de la prescription.
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