dimanche 1 janvier 2017

Dimanches rétro: l'octroi de dommages exemplaires ne dépend pas de la mesure du préjudice résultant de l’atteinte illicite, mais du caractère intentionnel de cette atteinte

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous discutons occasionnellement de l'octroi - par ailleurs exceptionnel - des dommages punitifs en droit québécois. Tel que nous en avons parfois discuter, cet octroi ne dépend pas de la mesure du préjudice subi, mais plutôt du caractère intentionnel du droit protégé par la Charte. C'est ce que nous enseignait la Cour suprême du Canada dans l'affaire Québec (Curateur public) c. Syndicat national des employés de l'hôpital St-Ferdinand ([1996] 3 RCS 211).



Dans cette affaire,  les employés syndiqués d’un centre hospitalier pour déficients mentaux avaient pris part à des grèves illégales.  Le curateur public, au nom des bénéficiaires hospitalisés lors des grèves, a exercé un recours collectif contre les Appelants.  

Le juge de première instance a décidé que les Appelants avaient commis une faute civile en déclenchant ou en encourageant les grèves illégales, ou encore en y participant, et  que les bénéficiaires avaient subi un préjudice.  Il a toutefois refusé d'accorder des dommages exemplaires en vertu du second alinéa de l’art. 49 de la Charte des droits et libertés de la personne puisqu’à son avis la nature du préjudice ne donnait pas ouverture à ce redressement. 

La Cour d’appel a confirmé la décision du premier juge relativement aux dommages compensatoires. Elle a  cependant condamné les appelants, solidairement, à verser aux bénéficiaires 200 000 $ à titre de dommages exemplaires.  La cour, à la majorité, a conclu que les appelants ont porté atteinte, de façon illicite, aux droits à l’intégrité et à la dignité que  les art. 1 et  4 de la Charte garantissent aux bénéficiaires, et que cette atteinte était intentionnelle au sens du second alinéa de l'art. 49.

L'Honorable juge Claire L'Heureux-Dubé - au nom d'une Cour unanime - confirme le jugement de la Cour d'appel. Au chapitre des dommages exemplaires, la juge L'Heureux-Dubé souligne qu'il ne faut pas s'attarder au type de préjudice subi par la victime, mais plutôt au caractère intentionnel de l'atteinte au droit garanti par la Charte:
117. Contrairement aux dommages compensatoires, l’octroi de dommages exemplaires prévu au deuxième alinéa de l’art. 49 de la Charte ne dépend pas de la mesure du préjudice résultant de l’atteinte illicite, mais du caractère intentionnel de cette atteinte. Or, une atteinte illicite étant, comme je l’ai déjà mentionné, le résultat d’un comportement fautif qui viole un droit protégé par la Charte, c’est donc le résultat de ce comportement qui doit être intentionnel.  En d’autres termes, pour qu’une atteinte illicite soit qualifiée d’«intentionnelle», l'auteur de cette atteinte doit avoir voulu les conséquences que son comportement fautif produira.
Référence : [2017] ABD Rétro 1

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