mercredi 4 mai 2016

Les tribunaux québécois font preuve d'une plus grande ouverture dans l'acceptation des déclarations écrites pour valoir témoignage

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Dans une ère où le législateur et les tribunaux placent de plus en plus d'importance sur la proportionnalité, il n'est pas surprenant de voir une plus grande ouverture à la preuve faite par écrit. On constate d'ailleurs que le nouveau Code de procédure civile est plus généreux à cet égard. Je m'attends donc aussi à ce que les tribunaux québécois soient plus permissifs dans l'utilisation de l'article 2870 C.c.Q. comme en témoigne l'affaire Robojo inc. (Syndic de) (2016 QCCS 2098).



Dans cette affaire, l'Honorable juge Marie-Anne Paquette est saisie de la demande du syndic pour permission de déposer des déclarations écrites pour valoir témoignage de certaines personnes. Le syndic fait valoir qu'il sera déraisonnable de faire témoigner celles-ci viva voce alors que les faits pertinents datent de plus de 25 ans et qu'il existe déjà des interrogatoires sous serments.

À la lumière de toutes les circonstances pertinentes, la juge Paquette est d'avis que la demande doit être accueillie. Elle souligne expressément que la proportionnalité commande d'accepter une telle solution:
[14]        Les témoignages écrits en cause ont été rendus de façon contemporaine aux événements. En effet, les transactions en litige ont eu lieu en 1991 et 1992. Les interrogatoires que le syndic entend introduire en preuve ont eu lieu de façon contemporaine aux événements (1992, 1992, 1994, 1996). En cela, leur utilité et leur acuité seront vraisemblablement plus grandes que les témoignages que ces témoins pourraient rendre à l’audience, plus de 25 ans après les faits pertinents. 
[15]        Dans les circonstances, il serait déraisonnable, disproportionné et peu efficace d’exiger la présence de ces témoins, pour réitérer des éléments qu’ils ont déjà affirmé sous serment et dont ils n’ont peut-être plus qu’un pâle souvenir aujourd’hui. 
[16]        De plus, compte tenu de l’ampleur et de la durée du litige, pour lequel les procédures ont été intentées en 1991, le Tribunal estime que le dépôt en preuve des transcriptions visées constitue une mesure de gestion respectueuse des principes de proportionnalité et d’efficacité qui doivent guider la gestion de la procédure civile. 
[17]        Dans l’éventualité où les intimées entendaient tout de même requérir la présence de Messieurs Abe et Roy Murad comme témoins, malgré le dépôt en preuve de leurs témoignages écrits, il leur appartiendra de démontrer la nécessité d’une telle démarche et, le cas échéant, de les assigner comme témoins.
Référence : [2016] ABD 177

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