samedi 30 avril 2016

Par Expert: peu importe que l'expert soit celui de la Cour, des parties ou d'une partie, le juge ne devrait pas le rencontrer hors de la présence des parties

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Peu importe la qualification que l'on donne à un expert - qu'il soit l'expert de la Cour, commun des parties ou d'une partie - toute la preuve d'expert doit se faire devant la Cour et les parties. C'est pourquoi il n'est jamais approprié pour un juge de rencontrer in camera un expert, même si c'est l'expert de la Cour. C'est ce qu'indique la Cour d'appel dans Droit de la famille — 16269 (2016 QCCA 244).



Dans cette affaire, l'Appelant se pourvoit contre un jugement de première instance qui a prononcé le divorce des parties, entériné une convention partielle sur les mesures accessoires, prononcé la garde alternée de leurs enfants et fixé la pension alimentaire payable par l’Intimée à l’Appelant, au bénéfice des enfants.

Un des motifs de reproche de l'Appelant est le fait que le juge a rencontré en son bureau l'expert de la Cour hors la présence des parties, créant ainsi une crainte raisonnable de partialité.

Même si la Cour ne casse pas le jugement de première instance pour cette raison - concluant qu'il n'en résulte pas une crainte raisonnable de partialité - elle indique que le juge de première instance n'aurait pas dû rencontrer son expert hors la présence des parties puisque ces dernières ont le droit de connaître toute l'information qui est communiqué par l'expert à la Cour:
[13]        Enfin, l’appelant reproche au juge d’avoir démontré de la partialité en rencontrant, dans son bureau, le psychologue De Wit, en l’absence des parties et de leurs avocates, avant qu’il rende témoignage. 
[14]        À la fin de l’audience de l’avant-midi, le 16 février 2015, le juge a informé les parties et leurs avocates qu’il voulait rencontrer M. De Wit dans son bureau, sur l’heure du midi, le qualifiant d’expert de la Cour.  Aucune représentation n’a été faite par quiconque à ce moment. 
[15]        Cette rencontre était inappropriée.  Les parties ont le droit de connaître toute l’information qui est communiquée à un juge par un témoin quelque soit sa qualité, pour pouvoir y répondre à tous égards.  Cela dit, il faut rappeler que M. Wim De Wit avait effectué une expertise psychosociale portant sur la capacité parentale de chaque partie, qui a donné lieu à un rapport élaboré déposé le 24 avril 2013, à la suite d’une ordonnance prononcée par la Cour supérieure le 21 février 2013.  Un an et demi plus tard, il était présent à l’audience sur le fond.  Le juge relate: 
[...] 
[16]        M. De Wit a été le dernier témoin appelé à la barre.  Il a témoigné pendant près d’une heure le 17 février 2015 et il a été contre-interrogé par l’avocate de l’appelant.  Rien ne permet de croire qu’il n’a pas fait preuve d’objectivité et de désintéressement.  La transcription de son témoignage ne nous a pas été fournie par l’appelant. 
[17]        Enfin, la maladresse commise par le juge ne permet pas d’inférer, comme le suggère l’appelant, qu’il y a là une indication de la partialité du juge.  Au surplus, il faut savoir qu’une preuve « par expert, scientifique, théorique et conjecturale, ne peut l’emporter sur la preuve positive d’un fait rapporté par des témoins ordinaires qui parlent à leur connaissance personnelle ». 
[18]        En l’espèce, le juge de première instance se réfère abondamment au témoignage des parties, tel qu’on peut le constater dans les extraits cités ci-haut, et l’appelant n’identifie pas d’erreur manifeste et déterminante dans l’évaluation qui en découle.
Référence : [2016] ABD Expert 18

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