lundi 25 avril 2016

La partie requérante n'a pas à obtenir l'aval de la Cour pour déposer de la preuve à l'autorisation d'une action collective

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Dans l'affaire Lambert (Gestion Peggy) c. Ecolait ltée (2016 QCCA 659), la Cour d'appel vient de rendre une décision qui vaut la peine d'être lue en matière de recours collectif. Entre autre choses, elle vient clarifier que la partie requérante n'a jamais à demander la permission de la Cour pour déposer des pièces au stade de l'autorisation, contrairement à ce que certaines décisions ont affirmé.


Dans cette affaire, l’Appelante désire intenter une action collective au nom des personnes physiques, les personnes morales de droit privé, les sociétés ou associations, avec 50 employés ou moins, ayant contracté avec Écolait ltée par une convention appelée « contrat de fourniture d’aliments, de nourrissons et autres services ».

Le jugement de première instance a rejeté la demande d'autorisation, jugeant que celle-ci ne remplissait pas les critères de l'article 1003 C.p.c. (aujourd'hui l'article 575).

Au nom d'une formation unanime de la Cour d'appel, l'Honorable juge Dominique Bélanger est d'avis que le jugement de première instance doit être infirmé. La juge Bélanger souligne par ailleurs, à la défense de la juge de première instance, que son travail a été rendu plus difficile par un jugement préalable dans le dossier (rendu par une autre juge) qui a incorrectement refusé à l'Appelante la permission de produire une preuve additionnelle.

La juge Bélanger indique en effet que la partie requérante n'a jamais besoin de l'aval de la Cour pour produire une preuve au stade de l'autorisation:
[29]        L’appelante a raison d’affirmer que la juge n’a pas tenu pour avérées les allégations de la requête pour autorisation d’exercer une action collective, et ce, sur trois points : 1) la nature des sommes versées en vertu du contrat verbal; 2) la démonstration du sérieux des chiffres avancés; et 3) l’identification d’autres éleveurs dans la même situation qu’elle. 
[30]        Cette situation, problématique faut-il le dire, n’est certes pas étrangère au fait qu’une première juge gestionnaire du dossier a ordonné à l’appelante de retirer les pièces déposées au soutien de sa requête pour autorisation, estimant que cette dernière devait obtenir sa permission pour les utiliser lors de l’audition sur la requête pour autorisation et ajoutant qu’elles n’étaient pas nécessaires à l’étude de la requête, car les faits doivent être tenus pour avérés. Un jugement de gestion rendu avant l’autorisation a aussi permis la production d’une déclaration sous serment de l’intimée, tout en décidant qu’aucun interrogatoire ne serait fait. 
[31]        Il est utile de rappeler qu’une personne qui requiert l’autorisation d’exercer une action collective peut produire, au soutien de sa requête, les pièces qu’elle estime appropriées pour satisfaire son fardeau de démonstration, sans avoir à obtenir la permission pour ce faire.  
[32]        L’ancien article 1002 C.p.c., in fine (C-25), devenu 574 C.p.c. in fine (C-25.01), n’a jamais eu pour effet d’obliger un requérant à demander la permission pour déposer des pièces au soutien de sa requête pour autorisation. D’ailleurs, le juge de l’autorisation doit non seulement tenir pour avérées les allégations de la requête, mais il doit aussi prendre en considération les pièces déposées à son soutien. Ce n’est que de façon très exceptionnelle qu’il pourra ordonner le retrait de pièces déposées par un requérant et uniquement parce qu’elles ne seraient pas pertinentes à l’examen des quatre critères d’autorisation ou alourdiraient indument un dossier. Les pièces visant à soutenir les allégations de la requête sont pertinentes et contribuent généralement à leur donner du poids, permettant ainsi au requérant de convaincre le juge de l’autorisation qu’il a satisfait son fardeau de démonstration.
Référence : [2016] ABD 163

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