samedi 31 octobre 2015

Par Expert: c'est au procès que la question de la qualification d'un expert est débattue

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Nous avons déjà discuté du fait que c'est généralement au juge du fond de juger de la recevabilité d'une expertise et que ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles que l'expertise sera exclue du dossier de la Cour au stade préliminaire. Ces principes s'appliquent au contenu de l'expertise, mais non pas aux qualifications de l'expert. En effet, dans ce dernier cas c'est toujours le juge du fond qui devra trancher comme l'indique l'affaire Promutuel Appalaches St-François c. Bergerie de l'Érable (2015 QCCS 4812)



Dans cette affaire, les Défendeurs demandent le rejet préliminaire d'une expertise déposée par les Demandeurs. Ils allèguent que l'expert qui a préparé le rapport n'a pas les qualifications requises et que le contenu de son rapport est inapproprié.

Pour nos fins d'aujourd'hui seul le premier de ces arguments nous intéresse.

L'Honorable juge Clément Samson rejette cet argument et souligne que ce sera au juge du fond de trancher la question des qualifications de l'expert:
[10]      Pour justifier leur demande de rejet, les défendeurs prennent appui sur le curriculum vitae de Monsieur Gauthier pour indiquer que, depuis 1987, il se spécialise en origines et causes d'incendie et qu'il a produit plus de 3 000 rapports d'expertise comme en fait foi son curriculum vitae joint à son rapport.  
[11]      Bien qu’il aurait les compétences pour se prononcer sur la cause de l'incendie, Monsieur Gauthier n’aurait toutefois pas celles pour discuter des causes de sa propagation. 
[12]      Selon les défendeurs, tel que son curriculum vitae le précise, il est écrit que depuis 1978, « Il a aussi effectué des expertises, analyses des expertises et études reliées à la combustion des matériaux, à la propagation d'incendies et à l'aggravation de dommages... » alors qu’il ajoute que, depuis 1987 « il travaille exclusivement comme expert légiste en origines et causes dans le domaine de l'expertise technico-légale... ». 
[13]      Les défendeurs prétendent que depuis 1987, Monsieur Gauthier a d'une certaine manière perdu sa qualification d'expertise sur la propagation des incendies. 
[14]      De l'avis du Tribunal, à première vue, il s'agit d'une question d'écriture. De plus, quelqu'un qui a travaillé dans ce domaine pendant 9 ans, même si ces années remontent à quelques décennies, n'en perd pas pour autant sa qualification d'expert. Finalement, tel que rédigé, on pourrait croire que, depuis 1987, il s'est aussi acquis de nouvelles expertises en sus de celles qu'il avait déjà. 
[15]      Quoi qu’il en soit, le Tribunal est d'avis qu'il appartient au juge saisi du dossier au fond d'apprécier la crédibilité du témoin et de déterminer s'il a les compétences pour témoigner en ce domaine nonobstant ce qu’il déclare dans son curriculum vitae. 
[16]      Au stade d'une requête en irrecevabilité, cette question est prématurée.
Référence : [2015] ABD Expert 44

2 commentaires:

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