jeudi 16 juillet 2015

La Cour d'appel de l'Alberta indique que, dans certaines circonstances, une ordonnance Anton Piller pourra être maintenue nonobstant l'absence de pleine divulgation des éléments pertinents à la Cour

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Une des joies de ce blogue c'est que je reçois régulièrement des courriels de confrères et consoeurs attirant mon attention sur des décisions intéressantes. Je ne les remercierai jamais assez, alors je prends la peine de le faire ce matin. C'est d'actualité puisque c'est mon mentor éternel George R. Hendy qui a attiré mon attention sur la décision très intéressante rendue par la Cour d'appel de l'Alberta dans Peters & Co Limited v. Ward (2015 ABCA 6) en matière d'Anton Piller.
 


D'abord, pourquoi devriez-vous être intéressé par une décision albertaine en matière d'Anton Piller? Simplement parce que les ordonnances Anton Piller sont une pure création jurisprudentielle qui nous vient de la common law et que les tribunaux québécois se réfère souvent à la jurisprudence venant de la common law. D'ailleurs, le nom de l'ordonnance nous provient de la cause anglaise qui l'a créée.
 
Puisque les ordonnances Anton Piller sont extrêmement invasives et qu'elles sont obtenues ex parte, la jurisprudence nous enseigne que la partie qui demande une telle ordonnance a un devoir élevé de divulguer volontairement à la Cour tous les faits pertinents à l'émission (ou non) de l'ordonnance. C'est pourquoi on dira généralement que le défaut de faire une divulgation complète entraînera la cassation de l'ordonnance.
 
C'est là que la décision dont nous traitons ce matin est intéressante puisque la Cour d'appel albertaine indique que ce n'est pas nécessairement le cas. En effet, la Cour indique que ce ne sont pas tous les défauts de divulgation qui entraîne la cassation de l'ordonnance et qu'il revient à la Cour de déterminer si - en prenant toutes les circonstances en ligne de compte - l'ordonnance aurait été émise n'eut été du défaut de divulgation franche et complète:
[11]           Failure to disclose all relevant materials, whether negligently or deliberately, may result in an Anton Piller Order being set aside. However, not every non-disclosure will cause an order to be set aside. The effect of non-disclosure is in the discretion of the chambers judge: Capitanescu v Universal Weld Overlays Inc, (1996) 1996 CanLII 7286 (AB QB), 192 AR 85, 46 Alta LR (3d) 203 (QB) at para 30
[12]           The appellants submit that at the ex parte application Peters & Co failed to disclose information that the appellants characterize as material. They say that Ward had a significant equity position with Peters& Co which would give him incentive to depart on good terms. They state that on the morning following the removal of the material from Ward’s office, Ward met with the President and CEO of Peters & Co in Ward’s office and it would have been obvious that there were items taken from the office; yet, he said nothing about that. The President had also said to Ward on the day prior to his departure that he had “received his last paycheque” and he should “pack up his shit and leave.” Mr. Ward also points to the conduct of the Managing Director of Corporate Finance at Peters & Co who was in contact with Ward the entire week leading up to the ex parte application, but who did not question Ward about the removal of the material.  The appellants further submit that it was common for employees to have personal and proprietary information in their possession even at their residences. The appellants also say that the respondent misrepresented material facts to the chambers judge. These included an affidavit from the respondent which deposed that Ward was neglecting his responsibility to two of his clients and was working on securing those clients for his new employer. They say that this is not true and was contradicted by Ward’s affidavit. The appellants also point to an admission of an employee that the printing of 106 documents by an employee was not unusual (as had been represented to the chambers judge). 
[13]           These exact matters were raised at the application to set aside the Anton Piller Order. The chambers judge addressed each of the matters individually and then concluded at paras 13 – 14: 
I have considered the Defendant's submissions and the Plaintiff's response. I am quite satisfied that there was not a failure to provide full and frank disclosure of all relevant material. Obviously, there were some matters that were not correct, such as the ages of the children who might be in the house and any attachment between Ms. Ward and some property on Elbow Drive. These were inadvertent and, in any event, irrelevant and immaterial to the issues before the court.  
With respect to the other matters which were alleged to be either material non-disclosure or material misrepresentations, I am satisfied that, overall, the Plaintiff presented a full and accurate summation of all of the material to relative facts within its possession. 
[14]           The chambers judge was in the best position to make these findings. He considered each argument and was best placed to consider them in the context of the entire application. The appellants have not demonstrated any reviewable error in the chambers judge’s consideration of the alleged non-disclosure. The chambers judge’s decision is entitled to deference. 
[15]           This ground of appeal is dismissed.
Commentaire:
 
On retiendra donc qu'il sera de la discrétion de la Cour, même lorsqu'on aura établi un défaut de divulgation, de déterminer quelles sont les conséquences de ce défaut. Cela me semble tout à fait juste lorsque le défaut de divulgation est commis de bonne foi ou innocemment.
 
Je dois cependant avouer que je suis en désaccord avec le raisonnement de la Cour lorsque le défaut est volontaire, et donc de mauvaise foi. Puisque les demandes d'injonction - et à plus forte raison les demandes de type Anton Piller - en appellent au pouvoir discrétionnaire de la Cour, la partie requérante doit avoir les mains propres. J'ai beaucoup de difficulté à voir comment cela pourra être le cas lorsqu'on induira volontairement la Cour en erreur.
 
Ceci étant dit - comme c'est mon habitude - je vous recommande de suivre les enseignements des tribunaux plutôt que mes opinions...
 
Référence : [2015] ABD 281

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