mardi 23 juin 2015

La proportionnalité à titre d'élément pertinent à une demande d'intervention

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Court billet cet après-midi pour discuter d'une décision intéressante rendue récemment par l'Honorable juge Robert Mongeon dans l'affaire Placements Réal Provencher inc. c. 9269-8802 Québec inc. (2015 QCCS 2722). Dans celle-ci, le juge Mongeon indique que la proportionnalité est un des éléments à prendre en considération dans l'analyse d'une demande d'intervention dans un litige civil.
 


Dans cette affaire, la Demanderesse intente un recours civil par lequel elle réclame le solde d’un prêt qui résulte d’une transaction survenue en 2012 aux termes de laquelle un fonds de commerce a été vendu à la Défenderesse.   La transaction de vente dudit fonds de commerce était assortie d’une condition à l’effet que l’immeuble dans lequel le fonds de commerce était opéré devait être acheté par la Défenderesse.

Or, en 2012, l’immeuble n’a pas été acheté par la Défenderesse mais plutôt par une société distincte dont l’actionnaire et le dirigeant est la même personne que l’actionnaire et le dirigeant de la Défenderesse, ceci avec l’accord de la Demanderesse.

La Défenderesse conteste le recours et produit une demande reconventionnelle en dommages pour vices cachés. Puisque ce n'est pas la Défenderesse qui a acquis l'immeuble, la compensation invoquée dans les procedures de la Défenderesse pose potentiellement problème. C'est pourquoi, pour pallier à cette difficulté, les procureurs de la Défenderesse produisent une demande d’intervention agressive au nom de la compagnie numérotée propriétaire de l’immeuble.

Cette demande d'intervention est contestée par la Demanderesse.

Le juge Mongeon est d'avis que l'intervention doit être reçue, principalement parce qu'il serait contraire au principe de la proportionnalité que d'encourager la prise de procédures séparées pour cette question:
[11]        On m’a cité une jurisprudence de la Cour d’appel qui suggère de refuser l’intervention à cause du fait qu’une personne morale distincte ne peut pas s’immiscer dans un débat et demander compensation à l’égard d’une dette due par une autre personne morale. 
[12]        Je crois, cependant, que sur la stricte question de l’intervention, le droit d’intervenir doit s’interpréter en fonction de la nouvelle philosophie du Code de procédure civile au niveau de la règle de la proportionnalité et de la gestion de l’instance.  De plus, tel qu’indiqué ci-haut, c’est la preuve au procès qui déterminera qui, de la Défenderesse et/ou de l’Intervenante, sont bénéficiaires des représentations du vendeur relativement au monte-charge. 
[13]        Au surplus, si je refuse l’intervention, il y aura vraisemblablement institution d’une action séparée et demande de réunion d’actions.  Étant donné l’inter-relation entre les parties, il est possible qu’un tribunal saisi d’une demande de réunion d’actions soit amené à l’accueillir.  Je ne vois pas la nécessité de forcer la Défenderesse ou l’Intervenante à procéder par action séparée au seul motif de l’existence d’une corporation séparée qui a acquis l’immeuble alors que cette acquisition devait se faire en vertu du contrat de vente d’actifs, que cette acquisition devait se faire, dis-je, par la compagnie défenderesse. 
[14]        Je crois que les intérêts de la justice, des parties et de la saine utilisation des ressources judiciaires, seront mieux servis en faisant droit à l’intervention de manière à ce qu’un seul tribunal puisse se saisir de l’ensemble du litige entre les parties élargi, c’est-à-dire, d’une part, l’endettement de la Défenderesse et, d’autre part, la réclamation relative au monte-charge.
Référence : [2015] ABD 248

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