dimanche 7 juin 2015

Dimanches rétro: nullité, résiliation, résolution...pas des concepts interchangeable

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

S'il est vrai que la procédure doit généralement être la servante et non la maîtresse du droit, reste que certains aspects de celle-ci demeurent primordiaux. C'est le cas du remède qui est recherché dans les conclusions de la requête introductive d'instance. En matière contractuelle, cela veut dire que les concepts de nullité, résiliation et résolution ne sont pas interchangeables et que lorsqu'on recherche une de ces sanctions, on ne peut simplement faire valoir comme argument que la Cour peut en accorder une autre. Ce principe est illustré dans l'affaire Chaput c. Godin (2014 QCCA 1505).
 

Dans cette affaire, l’Appelant se pourvoit contre un jugement qui a partiellement accueilli sa requête introductive d’instance et condamné l'Intimé à lui payer 2 500 $ à titre de dommages et intérêts. Ce jugement a aussi annulé la promesse bilatérale de vente et d’achat intervenue entre les parties et ordonné la radiation des avis de préinscription au registre foncier.
 
La juge de première instance a prononcé cette annulation au motif que la promesse n'avait selon elle plus sa raison d'être en raison des circonstances qui avaient changées depuis la date de conclusion de la promesse.
 
Le juge Hilton souligne qu'il s'agit d'une erreur de droit. En effet, la nullité ne peut que sanctionner un vice de formation et non pas une inexécution contractuelle ou problématique qui survient postérieurement.
 
Il ajoute que puisque la résolution, la résiliation, la modification et la révocation n'ont pas fait l'objet de conclusions en première instance, il ne saurait être question d'appliquer une de ces sanctions en appel:
 
[31] Quant à M. Godin, il demande à la Cour supérieure de faire droit aux conclusions suivantes   
DÉCLARER la promesse d’achat, contre-proposition et autres documents P-2 signés entre les parties au cours du mois de juin 2002, nuls et de nul effet; 
[...]  
[53] À cette étape de l’analyse, il est primordial de rappeler que la promesse est un contrat à part entière; elle est obligatoire et connaît la sanction du droit. Sa nullité, le cas échéant, doit ainsi correspondre aux prescriptions de l’article 1416 C.c.Q. : [...] 
[54] Avec égards, c’est à tort que la juge a annulé la promesse conclue en juin 2002. La nullité tant relative qu’absolue est une sanction réservée aux manquements relatifs à la formation du contrat. Comme l’explique le professeur Lluelles, la nullité s’apprécie au moment de la formation du contrat : [...] 
[55] D’emblée, je souligne que la juge a rejeté, avec raison, la prétention de M. Godin selon laquelle il y avait eu dol : [...] 
[56] Elle annule néanmoins la promesse bilatérale, car cela « équivaudrait à dénaturer la décision rendue par le TAQ le 23 février 2007 et à démembrer une terre agricole en contravention avec la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles ». Même à supposer qu’il s’agisse là d’un motif qui commande une quelconque sanction judiciaire, cette sanction n’est certainement pas l’annulation de la promesse. Rien de cela n’est contemporain à la conclusion de la promesse ou n’a quoi que ce soit à voir avec les conditions de formation des contrats selon les articles 1385 et suivants C.c.Q. 
[...] 
[59] Quant à la résolution, la résiliation, la modification ou la révocation de la promesse, il n’en a pas été question en première instance. En effet, la demande reconventionnelle ne recherchait pas de telles conclusions.
Référence : [2015] ABD Retro 23

2 commentaires:

  1. Monsieur Renno,

    Chercheure à la faculté de droit de l'université de Sherbrooke, je mène actuellement une étude consacrée aux blogues juridiques québécois. Le projet, subventionné par la fondation du barreau du Québec, s'intitule La contribution des blogues juridiques québécois à la critique et aux transformations du droit.

    C'est dans le cadre de cette recherche que je me permets de vous contacter aujourd'hui, puisque vous avez un blogue juridique actif.

    Je vous demande de bien vouloir contribuer à faire avancer ce projet en répondant au questionnaire que j'ai établi en vue de dresser le portrait de la blogosphère juridique québécoise.

    Votre participation à ce sondage me paraît en effet essentielle pour mieux cerner le phénomène du blogging juridique au Québec, car il n'a encore fait l'objet d'aucune étude et demeure mal connu au-delà du cercle des juristes blogueurs. J'espère ainsi combler ces lacunes en publiant les résultats de ma recherche prochainement.

    Je vous invite donc à suivre le lien suivant pour répondre au questionnaire:

    https://fr.surveymonkey.com/r/Bloguesjuridiques-EGuilhermont-juin2015

    Je vous remercie par avance de votre aimable participation et vous prie d'accepter mes salutations cordiales.

    --
    Edith Guilhermont
    Docteure en droit
    Chercheure
    Chargée de cours
    Université de Sherbrooke

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    Réponses
    1. Merci beaucoup Madame Guilhermont. C'est fait.

      Bonne chance dans votre étude.

      Karim Renno

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