mercredi 8 avril 2015

Pour remplir son fardeau de la preuve dans une cause d'incendie, la partie demanderesse ne peut se contenter de prouver que la cause proposée par la défenderesse est erronée

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Le fardeau de la preuve, s'il est concept relativement facile à cerner en principe, pose souvent des problèmes pratiques. Par exemple, dans l'affaire Promutuel Portneuf-Champlain, société mutuelle d'assurances générales c. Langlois (2015 QCCA 579), la Cour d'appel nous enseigne que la partie demanderesse dans une cause d'incendie a le fardeau de prouver cette cause et qu'il ne suffit pas - pour satisfaire à ce fardeau - de convaincre la Cour que la cause proposée par la partie défenderesse ne tient pas la route.



Dans cette affaire, l'Appelante se pourvoit à l'encontre un jugement de la Cour supérieure rendu par l’Honorable Jacques Blanchard, qui a rejeté son recours pour vice caché contre l’Intimé et l’assureur de ce dernier.

L'Appelante fait valoir que le juge de première instance a erré en ne retenant pas la cause de l'incendie plaidée par l'Appelante, même s'il a rejeté la cause avancée par l'Intimé.
 
Une formation unanime composée des Honorables juges Doyon, Bich et Bouchard confirme le jugement de première instance. Sur la question de la cause de l'incendie, la Cour souligne qu'il ne suffit pas pour remplir son fardeau à l'Appelante de prouver que la cause avancée par l'Intimé ne tient pas la route:
[5]           Le juge de première instance a écarté la thèse des intimés après que la preuve eut révélé que le ventilateur ne fonctionnait pas au moment de l’incendie. Il n’a pas davantage retenu la thèse de l’appelante car cette dernière n’a pas réussi à démontrer selon lui que le coupe-feu artisanal fabriqué par l’installateur du foyer en 2000 était défectueux et constituait un vice caché, ni qu’il y avait eu contact entre des matériaux combustibles et la cheminée. 
[6]           L’appelante reproche au juge de lui avoir imposé un fardeau qui va au-delà de la règle de la prépondérance de la preuve. Une fois la thèse des intimés rejetée, il ne pouvait pas, de l’avis de l’appelante, rejeter la seule autre cause probable de l’incendie, soit celle de l’installation défectueuse de la cheminée et du coupe-feu artisanal. 
[7]           À bon droit, les intimés rappellent que le juge n’avait pas l’obligation de retenir une cause d’incendie. Dès lors, ce n’est pas parce que le juge rejette comme cause de l’incendie la mauvaise installation de la cheminée qu’il impose à l’appelante un fardeau plus lourd que celui de la prépondérance de la preuve. Au contraire, le juge a correctement établi, aux paragraphes 69, 70 et 78 de son jugement, le fardeau de preuve qui incombait à l’appelante : 
[69]      Le fardeau de prouver en toute probabilité que l’incendie résulte d’une mauvaise installation appartient à Promutuel.  
[70]      Pour ce faire, Promutuel doit présenter une preuve qui s’appuie sur des éléments de faits amplement convaincants et non sur de simples soupçons ou hypothèses si crédibles soient-ils.  
[78]      Dans les circonstances, le Tribunal est d’avis que la thèse avancée par l’expert Pelletier n’est pas suffisamment grave, précise et concordante pour démontrer de façon prépondérante que l’incendie résulte d’une mauvaise installation de la cheminée. 
[8]           L’argument de l’appelante sur ce point doit donc échouer.
Référence : [2015] ABD 139

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