dimanche 5 avril 2015

Dimanches rétro: les conditions de la passation de titre

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Vous connaissez bien mon obsession pour les jugements synthèses. Je profite donc de l'occasion de ce matin pour attirer votre attention sur l'affaire Théberge c. Durette (2007 QCCA 42) où l'Honorable juge Marie-France Bich rappelait les critères à remplir pour obtenir la passation de titre suite à une promesse valide et exécutoire.



Dans cette affaire, les Appelants se pourvoient à l'encontre d'un jugement de la Cour supérieure qui a rejeté leur action en passation de titre tout en accueillant une partie de leur réclamation en dommages.
 
La juge Bich, au nom d'une formation unanime de la Cour, en vient à la conclusion que la passation de titre aurait dû être accordée en première instance. Elle profite de l'occasion pour rappeler les principes applicables à un tel recours, dont les critères à rencontrer:
[48] On peut résumer comme suit les conditions principales de l'action en passation de titre, qui suppose évidemment une promesse valide et exécutoire : 
- Mise en demeure (encore que l'absence de celle-ci ne soit pas nécessairement fatale);  
- Présentation d'un acte de vente conforme à la promesse (encore que cette exigence soit interprétée et appliquée avec une certaine souplesse, et non pas de façon « stricte, rigoriste et byzantine », comme le rappelle la Cour dans Bettan c. 146207 Canada inc. et dans Morris Bailey Enterprises c. Gouverneur inc.; au même effet, voir : Belley c. Cécyre; Penterman c. Ferme brune des Alpes inc., notamment au paragr. 87);  
- Offre et consignation du prix de vente indiqué à la promesse (encore que cette exigence ait elle aussi été assouplie et puisse même être exécutée postérieurement au jugement, si les circonstances s'y prêtent, comme ce fut par exemple le cas dans l'affaire Houlachi c. Bray;  
- Action intentée dans un délai raisonnable. 
[49] En l'espèce, toutes ces conditions sont réunies. Les parties ont signé une promesse bilatérale de vente et d'achat au sens des articles 1396 et 1712 C.c.Q. Les appelants, promettants-acheteurs, se sont conformés à leurs obligations et c'est plutôt l'intimée qui a tenté de se soustraire aux siennes. Il y a eu mise en demeure. L'acte de vente proposé (qui a été joint à la mise en demeure de passer titre et produit au dossier de la Cour supérieure) est conforme à la promesse de vente. Il reproduit notamment la clause 5.8 de la promesse en stipulant ce qui suit : 
Ce bâtiment est vendu tel quel sans garantie aux risques et périls de l'acquéreur, sans garanties légales contre les vices cachés (exemple : pyrite). 
[50] Les appelants n'ont pas consigné le prix de vente de l'immeuble, mais, dans les circonstances, il pourra être fait droit néanmoins à leur action en leur octroyant un délai pour ce faire, selon le modèle employé par la Cour dans Houlachi c. Bray, précité, ou dans Gubbay c. 4575 Poirier Investments Ltd. À l'audience, l'avocat des appelants a déclaré que les sommes requises étaient disponibles dans l'immédiat. 
[51] Il y a donc lieu de forcer l'intimée à passer titre et, par conséquent, d'accueillir le pourvoi, du moins sous ce rapport. Par contre, il ne sera accueilli que partiellement en ce qui touche les dommages-intérêts.
Référence : [2015] ABD Rétro 14

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