mardi 31 mars 2015

Un délai de déchéance qui expire un jour non-juridique est prolongé jusqu'au prochain jour juridique selon une décision de la Cour supérieure

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

Qu'arrive-t-il lorsque l'expiration d'un délai de déchéance tombe sur un jour non-juridique? Selon la décision rendue par l'Honorable juge Martin Dallaire dans l'affaire Grégoire c. Brouillette (2014 QCCS 5744), le délai est alors prolongé jusqu'au prochain jour juridique, et ce même s'il s'agit d'un délai de déchéance.
 

Dans cette affaire, les Défendeurs présentent une requête en irrecevabilité à l'encontre des procédures en inopposabilité de la Demanderesse. Les Défendeurs allèguent en effet que les procédures ont été déposées après l'expiration du délai de déchéance d'un an imposé par le législateur.
 
La Demanderesse conteste cette requête et fait valoir que ses procédures ont été déposées dans les délais. Elle plaide qu'au plus tôt le délai de déchéance a commencé à courir le 20 octobre 2011 et que ses procédures déposées le 22 octobre 2012 respectent le délai d'un an puisque les 20 et 21 octobre 2012 étaient des samedi et dimanche.
 
Après s'être penché sur la question, le juge Dallaire donne raison à la Demanderesse sur la question. Bien qu'il ne soit pas convaincu que le délai a véritablement commencé à courir à cette date, il en vient à la conclusion que les procédures ont été dans le délai de déchéance d'un an:
[33]        Ce n’est pas la date du 23 juillet 2012 qui doit être retenue, mais bien la date du 20 octobre 2011, soit la date de la communication de l’information. 
[34]        Or, il existe un imbroglio quant à cet effet. Les pages d’expédition font référence à cinq pages d’envoi, c’est-à-dire la lettre d’envoi plus la lettre qui comporte quatre pages. Les engagements sont beaucoup plus significatifs, ont-ils été expédiés de façon concomitante ou par la suite? Il semble y avoir un certain flottement à cet effet. 
[35]        Quoi qu’il en soit, même si la date du 20 octobre 2012 serait la date butoir de référence, le tribunal, en cumulant le délai, constate que la procédure a été déposée le 22 octobre 2012, soit dans un délai d’un an et un jour, en ne tenant pas compte de la date de départ, mais bien plutôt de la date de dépôt. 
[36]        En suivant la preuve, le 22 octobre 2012 est un lundi et la date du 21 octobre est un dimanche. Il s’agit donc d’un jour non juridique qui doit être reporté selon les dispositions de l’article 141 C.p.c., ce qui amène le tribunal à conclure que la demande a été déposée dans le délai voulu, et ce, même en tenant pour acquis qu’il s’agisse là de la date de référence exacte. Quoiqu’à cet effet, le tribunal est loin d’être convaincu qu’il s’agit de la bonne date puisqu’il y a un imbroglio sur la communication des engagements subséquents qui auraient été communiqués ultérieurement à la lettre d’envoi.
Suivi

Le 27 mars dernier, l'Honorable juge Yves-Marie Morissette a refusé la demande de permission d'en appeler de ce jugement dans Brouillette c. Grégoire (2015 QCCA 584) sans nécessairement confirmer la justesse du jugement de première instance:
[1]         Les requérants sollicitent la permission d’appeler d’un jugement qui a rejeté la requête en irrecevabilité, laquelle était fondée sur le délai de déchéance de l’article 1635 du Code civil du Québec. 
[2]         Ils reprochent au juge de première instance d’avoir conclu que, lorsque ce délai expire un samedi, il doit être prolongé au lundi suivant, étant entendu par ailleurs que le samedi est un jour non juridique au sens du Code de procédure civile, mais n’est pas pour autant un jour férié au sens de la Loi d’interprétation.  
[3]         Cette question peut ne pas être dénuée d’intérêt et elle est sûrement d’une certaine importance pour les parties en cause ici. 
[4]         Mais, s’agissant d’une requête pour permission d’appeler régie par l’article 29 et non pas par l’article 26 du Code de procédure civile, je ne peux me convaincre que cette question ainsi posée en est une question de portée générale au sens de la jurisprudence des juges de la Cour qui fait exception à la règle selon laquelle il n’y a pas d’appel d’un jugement rejetant une requête en irrecevabilité.
Référence : [2015] ABD 127

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