mercredi 18 février 2015

L'expulsion unilatérale d'un actionnaire sans entente pour le rachat de ses actions ou enclenchement d'un mécanisme pour le faire est un geste d'oppression

par Karim Renno
Renno Vathilakis Inc.

L'oppression est une question fondamentalement factuelle, mais reste que certains gestes sont presque toujours considérés oppressifs. C'est le cas de la décision unilatérale d'expulser un actionnaire de son entreprise sans qu'il y ait entente sur le rachat de ses actions ou enclenchement d'un mécanisme pour le faire. L'affaire Sabbah c. Obadia Amar (2015 QCCS 307) illustre un tel cas.
 

Pour nos fins, la trame factuelle de l'affaire importe peu. Il suffit de noter que l'Honorable juge Martin Castonguay est saisi de procédures en oppression dans lesquelles les parties principales demandent respectivement le rachat forcé des actions de l'autre.
 
Le juge Castonguay doit donc déterminer si des gestes oppressifs ont été posés, par qui et quelles sont les conséquences de ces gestes. Il constate l'existence de deux gestes oppressifs principaux, c'est à dire l'expulsion unilatérale d'un actionnaire et la suppression de l'information financière qui doit normalement être communiquée à un actionnaire.
 
Sur la question de l'expulsion, le juge Castonguay note que l'on ne peut simplement s'entendre pour expulser un actionnaire sans entente sur le rachat de ses actions ou exercice d'un droit légitime de rachat:
[137]     Cela étant, la preuve a révélé que les gestes d’oppression quant au défaut d’information financière furent posés après que le recours ait été intenté et après l’entrée en vigueur de la Loi. Ainsi, comme le mentionnait la Cour d’appel dans cette affaire en s’appuyant sur l’auteur Martel, la Loi aurait des effets immédiats quant aux gestes d’oppression commis en cours d’instance. 
[138]     Ainsi, le Tribunal retient de la preuve qu’il y a deux éléments d’oppression à des périodes distinctes. Le premier lorsque Carol a montré le chemin de la porte à Sabbah lors de la rencontre chez Prosper Sabbagh, soit le 1er avril 2009. Le deuxième est l’absence d’information financière, laquelle s’est poursuivie même après l’introduction des présentes procédures. 
[139]     Cette constatation a un impact quant à l’appréciation des gestes posés par Carol, Benjamin et David, comme l’indique la Cour d’appel, toujours dans l’arrêt Charland c. Lessard
[...]    
[140]     Ainsi, quant au fait d’avoir expulsé Sabbah, le Tribunal devra tenir compte de la jurisprudence élaborée quant à son pouvoir de surveillance et de contrôle, puisque ce geste fut posé avant l’entrée en vigueur de la Loi. 
[141]     Le Tribunal conclut, à la lumière de la preuve, que cette expulsion est contraire aux « exigences de la bonne foi », puisqu’en dépit de l’aventure de Sabbah au sein de Clin d’œil, il n’en perdait pas moins ses qualités et droits à titre d’actionnaire de Fou d’elle. 
[142]     La décision de Carol d’expulser Sabbah a été prise dans le cadre de la réunion chez Prosper Sabbagh, alors qu’aucune entente n’existait entre les parties quant au rachat des actions de Sabbah. 
[143]     Cette façon de faire de Carol, avec l’aval de David, équivalait à une expropriation.
Référence : [2015] ABD 69

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