lundi 9 février 2015

La requête pour permission d'en appeler peut être signifiée au procureur de la partie adverse

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Dans certains cas, le législateur prévoit au Code de procédure civile qu'une procédure doit être signifiée à la partie elle-même. C'est le cas par exemple de l'ordonnance pour comparaître pour outrage du tribunal (art. 53 C.p.c.), de la requête introductive d'instance (art. 123 C.p.c.) ou du subpoena. Dans l'affaire 9256-0929 Québec inc. c. Turcot (2015 QCCA 241), la Cour d'appel devait décider si la requête pour permission d'en appeler est une de ces procédures.
 


Dans cette affaire, la Requérante recherche la permission d'en appeler d'un jugement de la Cour supérieure qui a accueilli la requête en révision judiciaire des Intimés d’une décision de la Commission des relations du travail et a déclaré cette dernière compétente pour entendre la demande des intimés relativement à l’application des articles 96 et 97 de la Loi sur les normes du travail.

Les Intimés opposent un moyen d'irrecevabilité à cette demande de permission d'en appeler, soulignant que si l'article 495 C.p.c. prévoit que l'inscription en appel peut être signifié au procureur, l'article 494 C.p.c. lui de contient aucune telle indication pour la requête pour permission d'en appeler. Les Intimés font donc valoir que la requête pour permission d'en appeler doit être signifiée à la partie adverse elle-même.

L'Honorable juge Manon Savard rejette cette prétention et en vient à la conclusion que la requête pour permission d'en appeler peut être signifiée au procureur adverse:
[4]           À mon avis, cette prétention est sans valeur. 
[5]           La procureure des intimés a raison de souligner que le Code de procédure civile distingue les formalités de signification d’une demande pour permission d’appeler et d’une inscription en appel. En vertu de l’article 495 C.p.c., l’inscription en appel doit être signifiée à la partie adverse ou à son procureur, tandis que, selon l’article 494 C.p.c., la demande pour permission d’appeler doit être signifiée à la partie adverse. La doctrine n’explique pas cette distinction et les parties n’ont recensé aucune décision sur cette question. 
[6]           L’article 499 C.p.c. énonce que, avant la comparution au greffe des appels, les actes de procédure peuvent, en certaines circonstances, être signifiés au procureur qui représentait l’intimé en première instance : 
[...]  
[7]           Selon le premier alinéa, cette règle vise les dossiers formés par une inscription en appel et ceux qui découlent d’une permission d’appeler. Dans le premier cas, c’est le dépôt de l’inscription au greffe de première instance qui enclenche le processus d’appel et qui rend applicables les règles de procédure propres à l’appel. Dans le deuxième cas, c’est le jugement qui autorise l’appel qui tient lieu de l’inscription en appel (art. 494, al. 4 C.p.c.). Vu le libellé du premier alinéa, l’application du second alinéa de l’article 499 C.p.c. me semble limitée aux seuls actes de procédure déposés une fois le processus d’appel enclenché et ne vise donc pas la requête pour permission d’appeler. 
[8]           Dans ce dernier cas, soit avant que le processus d’appel ne soit enclenché, je suis d’avis que l’article 78 C.p.c. trouve application. Cet article, que l’on retrouve au chapitre des règles générales de la procédure écrite, énonce : 
[...]  
[14]        Le fait que l’article 494 C.p.c. limite la signification de la requête pour permission d’appeler « à la partie adverse » alors que l’article 495 C.p.c. permet la signification de l’inscription en appel « à la partie adverse ou à son procureur » n’est pas incompatible avec une telle conclusion et, compte tenu de l’ensemble des textes, on ne peut y voir qu’une inattention du législateur. 
[15]        Également, je ne peux retenir l’argument de la procureure des intimés voulant que la requête pour permission d’appeler soit assimilée à une requête introductive d’instance; ce n’est pas la requête qui tient lieu d’inscription d’appel, mais le jugement autorisant l’appel (art. 494, al. 4 C.p.c.). Elle ne constitue pas la « requête introductive d’instance » de l’appel. Dès lors, sans me prononcer sur son bien-fondé, la jurisprudence citée par la procureure des intimées selon laquelle une requête introductive d’instance ne peut être signifiée au procureur d’une partie par télécopieur n’est d’aucun secours.
Référence : [2015] ABD 56

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