lundi 5 janvier 2015

Dans le cadre d'une révision judiciaire, le tribunal de révision peut exercer son pouvoir discrétionnaire et rendre la décision qui aurait dû être rendue

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

On discute droit administratif et révision judiciaire cet après-midi sur le blogue. Plus spécifiquement, on parle des pouvoirs du tribunal de révision une fois qu'il en vient à la conclusion qu'une décision administrative est déraisonnable. En effet, dans  K.J. c. Tribunal administratif du Québec (2014 QCCS 6081), l'Honorable juge Gérard Dugré souligne que si le retour du dossier au décideur administratif est souvent la solution privilégiée, il n'en reste pas moins que le tribunal de révision peut exercer son pouvoir discrétionnaire et rendre la décision qui aurait dû être rendue.
 

Dans cette affaire, la Requérante recherche l'annulation d'une décision majoritaire du TAQ (2-1) qui a statué que la Requérante n'avait pas droit à être indemnisée pour la fibromyalgie dont elle souffre en vertu de la Loi sur l’assurance automobile, nonobstant la prétention de cette dernière que cette fibromyalgie a été causée par un accident automobile.
 
Après une analyse exhaustive de la preuve, le juge Dugré en vient à la conclusion que le jugement de la majorité est déraisonnable en ce que la prépondérance de la preuve ne mène qu'à une seule issue possible: que le diagnostic de fibromyalgie dont souffre la Requérante est en lien avec l’accident automobile qu'elle a subi.
 
Il passe alors à la question du remède approprié et souligne que les circonstances de l'affaire méritent l'exercice par la Cour de son pouvoir discrétionnaire de rendre la décision qui aurait dû être rendue au lieu de retourner le dossier au TAQ:
[107]     En principe, lorsque le tribunal annule une décision administrative en application de la norme de la raisonnabilité, il retourne le dossier au décideur administratif : Giguère c. Chambre des notaires, 2004 CSC 1 (CanLII), [2004] 1 R.C.S. 3, par. 65 (j. Deschamps, dissidente).  
[108]     Toutefois, plusieurs exceptions à ce principe existent comme le confirment d’ailleurs les arrêts suivants : Desbiens c. Wal-Mart, 2009 CSC 55 (CanLII), [2009] 3 R.C.S. 540, par. 10; Giguère c. Chambre des notaires, précité, par. 34-35, 66; Bon L Canada Inc. c. Québec (Commissaire du travail), 2004 CanLII 7361 (QC CA); [2004] R.J.Q. 2359, par. 45-46; Panneaux Vicply inc. c. Guindon, J.E. 98-109 (C.A.); Chalifoux, précité; Viger, précité. 
[109]     À la lumière des enseignements qui se dégagent de ces arrêts, le tribunal est d’avis d’exercer son pouvoir discrétionnaire et de rendre la décision qui aurait dû être rendue par le TAQ, et de retourner le dossier à la SAAQ que pour indemniser la requérante en conséquence. C’est d’ailleurs ce que la Cour d’appel a fait dans les arrêts Chalifoux et Viger, précités, tous deux portant sur la fibromyalgie en vertu de la LAA et dans lesquels la norme de la décision manifestement déraisonnable fut appliquée.
Référence : [2015] ABD 6

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