mercredi 24 décembre 2014

L'interrogatoire du deuxième représentant d'une partie ne pourra porter que sur les questions auxquelles le premier n'a pas pu répondre

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Comme nous en avons déjà discuté, il est possible d'interroger plus d'un représentant d'une partie au préalable. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il s'agit d'un autre interrogatoire complet et une deuxième opportunité de poser des questions. En effet, comme le souligne l'Honorable juge Clément Samson dans Centre québécois du droit de l'environnement c. Heurtel (2014 QCCS 6171), l'interrogatoire du deuxième représentant ne portera que sur les sujets et questions pour lesquels le premier représentant ne pouvait répondre.


Dans cette affaire, les Demandeurs ont institué des procédures pour demander la cassation d'un certificat d’autorisation de travaux de construction d’une cimenterie à Port-Daniel-Gascons émis par le ministre du Développement durable, de l’Environnement et de la lutte contre les changements climatiques.
 
Après le dépôt des contestations et la tenue d’interrogatoires après défense, les mises en cause désirent interroger un deuxième représentant d'un des Demandeurs. Puisque cette demande est contestée, le juge Samson est saisi de la demande de permission.
 
Bien qu'il accorde la permission demandée, le juge Samson souligne que la portée de ce deuxième interrogatoire est limitée. Il indique, entre autres choses, qu'il ne peut porter que sur des sujets et questions pour lesquels le premier représentant n'a pu donner réponse:
[15]        Madame la juge Rita Bédard, dans l’arrêt Thibault c. Franchises Salvatore GA inc. a tracé les frontières d’un second interrogatoire d’une partie : 
« [26] Par ailleurs, les tribunaux ont reconnu que l'interrogatoire des personnes énumérées au premier paragraphe de l'article 398 C.p.c. constituait un droit absolu ne nécessitant pas l'autorisation du tribunal. Une partie pourrait donc procéder à cet interrogatoire de plein droit sans être limité quant au nombre de témoins pouvant y être assignés. Plus tard, la Cour supérieure a nuancé cette dernière proposition en s'exprimant comme suit :   
« [17] Précisons que l'interrogatoire sous 398 (1) est un droit absolu contrairement à celui prévu par 398 (3) qui nécessite la permission du tribunal. Ceci dit, le nombre de personnes contraignables n'est pas illimité. Lorsque l'information obtenue est suffisante eu égard à tous les aspects du litige, il y aura lieu de mettre un terme à l'exercice.
[18] Ainsi, une partie pourra interroger plus d'un agent, employé ou officier de l'autre partie lorsque les faits pertinents sont connus de plusieurs personnes. Elle n'a pas à obtenir d'autorisation préalable mais, en cas de contestation, elle devra préciser l'éclairage additionnel recherché et démontrer que cette information est de nature à faire progresser le débat. »
[27] Sera de nature à faire progresser le débat, l'information additionnelle ou celle portant sur d'autres faits que ceux sur lesquels a déjà répondu l'employé interrogé.  
[28] S'il est possible d'interroger plus d'un employé d'une partie adverse, certaines conditions s'appliquent encore. La partie qui souhaite interroger devra satisfaire au test de la nécessité en démontrant spécifiquement, concrètement et précisément pourquoi et en quoi l'interrogatoire s'impose. 
[29] Encore faut-il que la partie intéressée n'ait pu obtenir les renseignements souhaités à l'occasion du témoignage d'un premier employé. Les témoignages des autres employés devront donc être susceptibles de compléter celui du premier. Aussi, il n'est pas requis d'interroger deux témoins sur les mêmes faits. »  
(références omises) 
[16]        Comme le rappelle avec précision ce précédent arrêt : 
  Il est possible d’interroger un deuxième témoin représentant une partie; 
  La permission du Tribunal est nécessaire lorsqu’il y a contestation en regard de la nécessité de l’interrogatoire de ce deuxième témoin; 
  Pour ce faire, le « premier » témoin doit ne pas avoir été en mesure de répondre aux questions; 
  Et le deuxième « témoin » ne devra répondre qu’aux questions ou sujets sur lesquels le « premier » témoin n’a pas été en mesure de répondre.
Référence : [2014] ABD 511

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