mardi 28 octobre 2014

Une expertise est nécessaire pour faire une preuve sur une question d'opinion sur laquelle les parties ne s'entendent pas

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Comme avocat, il n'est pas toujours évident de déterminer quelles sont les questions en litige pour lesquelles une preuve par expert est requise et lesquelles peuvent être débattues sur la base de la preuve profane seulement. Essentiellement, on dira que dès que l'expression d'une opinion technique ou spécialisée est nécessaire et que les parties ne s'entendent pas, la preuve par expert sera nécessaire. C'est ce qu'illustre l'affaire Projets VG inc. c. Groupe Lessard inc. (2014 QCCS 5018).
 

Dans cette affaire, la Demanderesse - sous-traitante dans un projet immobilier - intente des procédures en dommages contre les Défenderesses par lesquelles elle réclame le solde contractuel qui lui est dû, en plus de certains montants pour des travaux supplémentaires qu'il prétend avoir effectuées.

Les Défenderesses contestent cette réclamation au motif que la Demanderesse n'aurait pas correctement fait les travaux en question et qu'elle n'aurait pas fait de travaux supplémentaires. En effet, tous les travaux effectués par la Demanderesse découlaient du contrat selon les Défenderesses.
 
Sur cette dernière question, la Demanderesse - dont la tâche était d'installer des fenêtres - fait valoir que les fenêtres étaient de dimensions trop réduites et que l’installation a nécessité qu'elle comble les vides par du pliage non compris au contrat.
 
Malheureusement pour la Demanderesse, elle n'a pas produit d'expertise appuyant sa thèse et les Défenderesses sont d'avis contraire. Ainsi, l'Honorable juge François P. Duprat n'a d'autre choix que de constater que la Demanderesse ne s'est pas déchargé de son fardeau en l'absence d'une expertise:
[34]         Sur cet aspect, les témoignages des parties s’opposent. VG plaide que des travaux supplémentaires et non prévus au contrat sont réalisés. Lessard, au contraire explique que tous les travaux réalisés sont prévus au contrat et aux dessins techniques.  
[35]        Le Tribunal a déjà statué qu’il n’existe aucun écrit qui alloue des travaux supplémentaires. 
[36]         VG n’a pas requis l’aide d’un témoin expert qui aurait pu établir de tels faits, c’est à dire que les travaux d’installation des fenêtres requièrent du travail qui déborde du contrat initial.  
[37]        De l’avis du Tribunal, une telle preuve est nécessaire dans le présent cas.  Dans l’arrêt Corporation d'entretien d'ascenseur indépendant c. J.E. Verreault & Fils ltée, la Cour d’appel  précise que :  
À mon avis, l'argument de l'appelante qui invoque l'absence de preuve d'expert ne saurait résister à l'analyse. Un tel argument n'a aucun fondement juridique. Nulle preuve d'expert n'est nécessaire pour établir l'existence de déficiences susceptibles d'être constatées comme strictes questions de fait. Une preuve d'expert n'aurait été nécessaire que dans l'hypothèse où il y aurait eu un conflit d'opinion entre les parties quant à l'existence de telles déficiences, ce qui n'était pas le cas.   [Soulignements du Tribunal] 
[38]        Le témoignage de Mme Morneau, présidente de VG, est sujet à caution. Elle ne peut, de l’avis du Tribunal, témoigner d’opinion. La preuve de ses compétences est mince. Son ancien conjoint, Denis Girard, qui a été présent sur le chantier, n’est pas plus convaincant. Il est vrai que M. Girard a une expérience appréciable et qu’il agit pendant quelques semaines comme superviseur de chantier. Il sera ensuite présent surtout le soir et durant le weekend. Cependant le témoignage de M. Girard n’a pas la précision et le souci du détail  que M. Riverin ou M. St-Pierre démontrent.
Référence : [2014] ABD 429

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