mardi 14 octobre 2014

Pour empêcher la reconnaissance et l'exécution d'un jugement étranger au Québec, les procédures déposées au Québec doivent être devant le bon forum

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

En matière de reconnaissance et exécution des décisions étrangères, l'article 3155 (4) C.c.Q. prévoit que ne sera pas reconnu le jugement étranger lorsqu'un "litige entre les mêmes parties, fondé sur les mêmes faits et ayant le même objet a donné lieu au Québec à une décision passée ou non en force de chose jugée, ou est pendant devant une autorité québécoise, première saisie [...]". Dans  Lynch Suder Logan c. Wilson Logan (2014 QCCS 4765), l'Honorable juge Catherine La Rosa souligne que cette exception ne peut trouver application que si les tribunaux québécois ont véritablement juridiction pour entendre les procédures déposées devant eux.
 


Le Défendeur dans la présente affaire demande la reconnaissance et l'exécution d'un jugement de divorce américain au Québec, lequel règle également le sort de la réclamation en dommages de la Demanderesse. La Demanderesse s'objecte à cette demande, invoquant le fait que des procédures sont pendantes devant les tribunaux québécois de sorte que l'exception de l'article 3155 (4) C.c.Q. trouve application.
 
Après analyse, la juge La Rosa rejette la contestation de la Demanderesse, jugeant les tribunaux américains clairement compétents pour entendre et juger des procédures de divorce, les deux parties étant domiciliées au Maryland. Elle ajoute que, pour cette raison, les tribunaux québécois ne sont pas compétents pour entendre des procédures relatives au divorce des parties et donc que l'exception de l'article 3155 (4) ne trouve pas application:
[46]        Tout d’abord, l’exception prévue à l’article 3155 C.c.Q., quatrièmement, ne s’applique pas en l’espèce. En effet, Suder ne peut faire indirectement ce qu’elle n’est pas en mesure d’exécuter directement. En d’autres mots, elle ne peut prétendre avoir saisi en premier le tribunal québécois puisque l’action instituée n’est pas valide. En effet, la procédure introduite par Suder au Québec découle du mariage et de la rupture dans un cas où ni l’une ni l’autre des parties n’a sa résidence ou son domicile au Québec. 
[47]        Sous prétexte que deux biens sont situés au Québec, Suder ne peut faire échec aux principes établis dans le Code civil en matière de compétence des tribunaux. 
[48]        Ajoutons que Suder a clairement reconnu la compétence du tribunal américain en matière de divorce en déposant sa défense dans le dossier de divorce ainsi qu’en introduisant une « tort action», simple copie de la procédure en dommages déposée au Québec. 
[49]        Suder ne peut jouer sur deux tableaux et effectuer du « forum shopping ». 
[50]        Finalement, en matière de divorce, puisque c’est un jugement de cette nature que le juge Cahill Jr a rendu, la compétence de l’autorité américaine confirme par ce fait que les parties, citoyennes américaines, avaient leur domicile dans l’État où la décision a été rendue depuis au moins un an avant l’introduction des procedures.
Référence : [2014] ABD 410

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