mardi 9 septembre 2014

Pour obtenir l'autorisation d'intenter un recours collectif, la partie requérante doit établir l'existence d'un groupe

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'article 1003 (d) C.p.c. indique que l'autorisation d'un recours collectif ne pourra avoir lieu que lorsque "la composition du groupe rend difficile ou peu pratique l'application des articles 59 ou 67". Il s'en suit nécessairement que la partie requérante a le fardeau à l'autorisation de prouver qu'il existe bel et bien un groupe à représenter. À défaut de se faire, la partie requérante verra sa requête en autorisation rejetée comme ce fût le cas dans l'affaire Hébert c. KIA Canada inc. (2014 QCCS 3968).
 

Alléguant que plusieurs modèles de voiture des Intimés contiennent des systèmes Bluetooth défectueux, le Requérant dépose une requête en autorisation d'instituer un recours collectif au nom du groupe de personnes suivants:
Toute personne physique, personne morale de droit privé, société ou association (si la personne morale de droit privé, société ou association, en tout temps au cours des douze (12) derniers mois avait sous son contrôle au plus cinquante (50) employés) qui est propriétaire ou locataire au Québec d’une voiture de marque KIA, modèle de l’année 2009, 2010, 2011, 2012, 2013 ou 2014 munie d’un appareil Bluetooth KIA installé par le fabriquant.
La difficulté pour le Requérante est qu'il est incapable d'établir, même en vertu du fardeau allégé de preuve applicable au stade de l'autorisation d'un recours collectif, qu'il existe même un autre membre du groupe qu'il propose de représenter.
 
Selon l'Honorable juge Jean-François Michaud cette lacune est fatale à la requête en autorisation du Requérant puisqu'il a le fardeau de prouver l'existence d'un groupe:
[20]      Pour qu’un recours collectif soit autorisé, encore faut-il qu’un groupe de personnes soit aux prises avec les mêmes problèmes. Sur cette question, M. Hébert allègue qu’il n’est pas le seul à subir des inconvénients en raison de la technologie Bluetooth. Il formule plusieurs allégations qui méritent d’être analysées séparément. 
[...] 
[41]      Bref, seule une enquête au fond permettra de le déterminer. Mais pour l’heure, il est prématuré de conclure que tous les véhicules KIA visés par le groupe sont défectueux du simple fait que M. Hébert allègue que ceux équipant ses deux voitures le sont. 
[42]      Au contraire, comme on l’a vu précédemment, il existe une présomption de faits qui tend à démontrer que les problèmes de M. Hébert sont propres à lui compte tenu qu’il n’a pas été en mesure d’identifier un seul autre propriétaire ou locataire au Québec d’une voiture KIA aux prises avec un des problèmes qu’il a identifiés alors qu’il allègue que plus de 77 000 véhicules sont équipés avec le même système. 
[43]      La présente situation n’est pas sans rappeler l’affaire F.L. c. Astrazeneca Pharmaceuticals, p.l.c. où les représentants alléguaient que chacun des membres du groupe avait subi des dommages. Pourtant, ils n’avaient parlé ni rencontré aucun autre membre. Le tribunal conclut que ces affirmations ne sont basées sur aucun fait.  
[44]      Il incombait à M. Hébert d’alléguer des faits suffisants pour justifier l’autorisation du recours. Il ne pouvait s’en remettre à de simples spéculations ou hypothèses. Les carences de son enquête empêchent de déterminer s’il existe un groupe. 
[45]      En conclusion, il serait contraire à une saine administration de la justice que les parties aient à investir dans des expertises complexes pour déterminer la cause des problèmes allégués par M. Hébert non seulement pour ses deux véhicules et ses deux téléphones cellulaires mais également pour tous les autres modèles de KIA et les autres téléphones cellulaires disponibles sur le marché. On voit aisément que ces expertises seraient longues et coûteuses, ce qui  ne doit pas être autorisé en l’absence d’un groupe.  
[46]      Par conséquent, le Tribunal n’autorisera pas la demande d’autorisation d’exercer un recours collectif. Il va néanmoins traiter de chacune des conditions de l’article 1003 C.p.c.
     
Référence : [2014] ABD 360

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