vendredi 15 août 2014

Tous dans le même bateau

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

La question de savoir si l'on peut forcer des personnes qui ne sont pas partie à une convention d'arbitrage à participer à celui-ci lorsque leur présence est nécessaire à la solution complète du litige est complexe. En principe bien sûr la convention d'arbitrage ne lie que les parties qui l'ont signée de sorte que l'on ne pourrait renvoyer un dossier à l'arbitrage lorsqu'une des parties à celui-ci n'est pas partie à la clause d'arbitrage, mais ces principes ne sont plus aussi absolus qu'ils ne l'ont déjà été.
 

Ainsi, des circonstances particulières peuvent justifier un renvoi à l'arbitrage de parties non signataires à l'arbitrage comme le souligne l'Honorable juge Suzanne Mireault dans 9171-5607 Québec inc. (Écocentre Val-Bio) c. Graymont (Québec) inc. (2014 QCCS 3441).
 
Dans cette affaire, les Demandeurs intentent une action en dommages contre la Défenderesse dans laquelle ils réclament des dommages-intérêts totalisant 841 083$, invoquant le non-respect d’une convention d’approvisionnement en biomasse.
 
La Défenderesse, alléguant la présence d'une clause compromissoire dans l'entente pertinente, demande le renvoi du litige à l'arbitrage.
 
En contestation de cette requête, les Demandeurs plaident que ce renvoi est impossible puisque deux d'entre eux ne sont pas parties à la convention qui contient la clause d'arbitrage et ne peuvent donc pas être forcés de procéder devant un arbitre.
 
Pour la juge Mireault - saisie de la requête - les circonstances particulières de ce dossier militent en faveur d'une conclusion autre. En effet, elle note que les Demandeurs physiques ont préalablement requis, au nom de la Demanderesse, le renvoi à l'arbitrage. Qui plus est, ils sont les actionnaires et administrateurs de la compagnie Demanderesse:
(33)        G. Fontaine et J. Des Rosiers n’ont effectivement pas signé, à titre personnel, la convention d’approvisionnement. 
(34) Néanmoins, ils ont dûment requis, pour 9171, le renvoi à l’arbitrage dans leur missive datée du 15 novembre 2010. 
(35) Le tribunal en conclut donc qu’ils sont fort malvenus aujourd’hui de prétendre que, n’étant pas personnellement signataires de la clause d’arbitrage, l’arbitre n’a pas juridiction.
Ce faisant, la juge a pris appui sur la décision rendue en 1996 par la Cour d’appel dans Décarel inc. c. Concordia Project Management Ltd, dans laquelle la Cour avait fait état pour la première fois de l’approche plus libérale qu’il fallait adopter en la matière.

Référence : [2014] ABD 325

Le présent billet a initialement été publié sur le blogue d'actualités juridiques Droit Inc. le 6 août 2014.

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