samedi 30 août 2014

Par Expert: la force probante implique une analyse des qualifications de l'expert, mais aussi des prémisses de son rapport

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Loin de moi l'idée de vouloir diminuer l'importance des qualifications d'un expert. Au contraire, elle revêtent une grande importance non seulement au niveau de la recevabilité, mais aussi de la force probante de l'expertise. Reste que l'autre élément déterminant quant à la force probante de l'expertise est la qualité des prémisses sur lesquelles se fondent le rapport. C'est ce que soulignait la Cour d'appel dans Société R. Langlois Inc. c. Société québécoise d'assainissment des eaux (2001 CanLII 14168).
 


Dans cette affaire, l'Appelante se pourvoit contre une jugement de la Cour du Québec, chambre de l'expropriation, qui a ordonné à l'Intimée de lui payer 434 473,95 $ plus intérêts et indemnité additionnelle.
 
Le débat en appel porte principalement sur la décision du juge de première instance de mettre de côté l'évaluation faite par l'expert de l'Appelante et de retenir plutôt celle de l'Intimée.
 
Au nom d'un banc unanime, l'Honorable juge Louise Otis indique que c'est à bon droit que le juge de première instance a pris cette décision. En effet, même si l'expertise de l'Intimée souffrait de quelques lacunes, celle de l'Appelante se basait sur des prémisses douteuses:
[33]           Le juge d'instance a eu raison d'écarter le rapport Bazinet. En premier lieu, les comparables utilisés ne sont pas similaires puisqu'ils se situent dans des villes avoisinantes dotées d'infrastructures et d'une qualité de services qui ne sont pas équivalents à ce qui existe à Saint-Philippe. 
[34]           En deuxième lieu, une simple lecture du contrat daté du 29 juillet 1991 entre Langlois et Habitations Monte Carlo inc. démontre le peu de sérieux du projet immobilier qui est le fondement de la méthode de lotissement utilisée par Bazinet.  En effet, le contrat en question n'est pas signé par le témoin, ne comporte aucune date pour la signature de l'acte de vente devant le notaire et, surtout, devient nul par le simple non-respect de celui-ci par le promettant-acquéreur.  Il s'agit davantage d'une lettre d'intention, dont on ne peut mesurer ni la plausibilité ni la fiabilité, que d'un véritable contrat.  
[35]           De plus, le témoignage de Gustave Deslippes, employé de la municipalité de Saint-Philippe, vient démontrer qu'il aurait été impossible, pour Langlois, de demander l'émission d'un permis de lotissement nécessaire à la réalisation du projet puisque le règlement de contrôle intérimaire (1982-1992), puis le règlement de zonage no. 191 de la municipalité de Saint-Philippe (1992-1996) l'interdisait. Bazinet semble finalement admettre ce fait. 
[36]           Finalement, l'appelante elle-même semble répudier — au moins partiellement — les conclusions de son expert puisqu'elle ne propose à cette Cour que de retenir l'approche par parité.
Référence : [2014] ABD Expert 35

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