mardi 12 août 2014

Le lieu où est commise la faute de la diffamation

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Où est commise la faute en matière de diffamation? Est-ce au lieu d'où les propos émanent ou plutôt au lieu où ils sont diffusés? En common law canadienne les tribunaux ont retenu la règle du lieu de la diffusion substantielle comme lieu de la faute tel qu'il appert de la décision de la Cour suprême dans Éditions Écosociété Inc. c. Banro Corp. (2012 CSC 18). Quelle est la réponse en droit québécois? Dans Pomerleau et Adornetto (2014 QCCS 3899), l'Honorable juge Jacques Blanchard c’est au lieu de la provenance de la diffusion des propos que la faute a été commise.
 

Dans cette affaire, les Demandeurs intentent une action en diffamation dans le district de Beauce dans laquelle ils allèguent que le Défendeur a tenu des propos diffamatoires sur sa page personnelle Facebook.
 
Le Défendeur dépose une exception déclinatoire dans laquelle il demande le renvoi du recours intenté par les Demandeurs devant le district judiciaire de Terrebonne où il est domicilié.
 
Les Demandeurs font valoir que toute la cause d'action est née dans le district de Beauce et c'est ce qui justifie le dépôt de la poursuite dans ce district.
 
Le juge Blanchard rejette la prétention des Demandeurs. En effet, il souligne qu'ils avaient le fardeau de prouver que toute la cause d'action est née dans le district et il n'ont pas établi le lieu de commission de la faute, i.e. le lieu de la provenance de la diffusion des propos selon lui. Pour cette raison, le district de la résidence du Défendeur est à privilégié:
[11]        La Cour suprême dans l’arrêt Air Canada c. McDonnell Douglas Corp. enseigne que dans une action en responsabilité comme celle introduite par les demandeurs, certains éléments doivent être prouvés, soit la faute, le dommage et le lien de causalité, pour que ce Tribunal puisse conclure à une condamnation monétaire. Chacun des trois éléments doit avoir pris naissance dans le district judiciaire donnant compétence au tribunal. 
[12]        Le défendeur, selon les demandeurs, aurait tenu des propos diffamatoires fautifs dans le district de Beauce, soit au moment de la diffusion desdits propos sur la page personnelle Facebook de monsieur Adornetto. 
[13]        Ainsi, selon les demandeurs, l’acte fautif commis par monsieur Adornetto consiste à la diffusion de sa page personnelle Facebook et cette diffusion a eu lieu, entre autres, dans le district de Beauce. 
[14]        Certes, il y a eu une diffusion des propos sur la page personnelle Facebook du défendeur dans le district de Beauce, mais les demandeurs n’ont pas établi d’où émanait la diffusion. 
[15]        De l’avis du Tribunal, c’est au lieu de la provenance de la diffusion des propos que la faute a été commise. 
[16]        Rien ne permet de conclure, suivant les arguments avancés par Me Mercier ou les allégués de la requête introductive d’instance, que la diffusion de la page personnelle Facebook de monsieur Adornetto émane du district de la Beauce. 
[17]        Si certains éléments seulement de la responsabilité civile ont pris naissance dans un district, tels que les dommages, et que les autres ont pour leur part pris naissance ailleurs, le Tribunal ne peut considérer que toute la cause d’action a pris naissance en un même endroit.
Référence : [2014] ABD 320

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