samedi 26 avril 2014

Par Expert: la recevabilité de la preuve par polygraphe en matière civile

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

La preuve par polygraphe est-elle permise en matière civile québécoise? Posez la question à votre juge du procès. En effet, en principe rien ne s'oppose à la recevabilité d'une telle preuve en matière civile sujet à la conclusion du juge saisi de l'affaire que la preuve est probante et pertinente. C'est ce qu'indiquait la Cour d'appel dans l'affaire Hotel central (Victoriaville) inc. c. Compagnie d'assurance reliance (1998 CanLII 12934). 
 

Dans cette affaire, le juge de première instance, au stade interlocutoire, a exclu du dossier l'expertise que désirait déposer l'Appelante et radié les allégations qui s'y rattachaient au motif que la preuve par polygraphe était, selon lui, inadmissible.

L'Honorable juge Jacques Philippon (ad hoc), au nom d'un banc unanime, renverse cette décision. Il souligne que les questions de fiabilité, de pertinence et de force probante de cette preuve doivent être laissées au juge du procès:
Le juge du procès civil a, dans les circonstances appropriées, à exercer sa discrétion relativement à la marche du procès. 
En somme, il s'agit plutôt des conditions d'admissibilité d'une preuve résultant d'une technique scientifique innovatrice. Je ne puis affirmer aujourd'hui que la preuve obtenue par détecteur de mensonges ne peut apporter au processus judiciaire plus de certitude qu'on a en trouvée jusqu'à maintenant. 
La fiabilité de la preuve obtenue par détecteur de mensonges est un élément influant principalement sur sa valeur probante et cette question devrait être évaluée par le juge du fond et non au stade interlocutoire. Pour y arriver, le professeur Patenaude, dans un autre article, suggère une méthode qui commence par vérifier la validité du principe fondamental de cette technique, c'est-à-dire que les individus ont des réactions physiologiques différentes lorsqu'ils mentent. Par la suite, il faudrait évaluer la capacité de l'appareil, la méthode suivie, etc. Bref, il appartiendra au juge du procès de régler tous les aspects de la question. 
D'où le pourvoi de l'appelante, propriétaire de l'hôtel incendié qui réclame des dommages à l'assureur. Celui-ci refuse d'indemniser, alléguant en défense, entre autres motifs, que l'appelante, ses actionnaire et administrateur, ne sont pas étrangers à l'incendie.
Référence : [2014] ABD Expert 17

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