Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
On April 9, 2014, Superior Court judge, Michel Yergeau, rendered an
important decision regarding the use of English-only trademarks on store signs.
In short, the Court concluded that the various provisions of the Quebec Charter of the French Language and its
regulations permitted such signs where they constituted the registered
trade-mark of the business.
The decision in Magasins Best Buy ltée v. Québec (Procureur général) (2014 QCCS 1427) involved a Motion for Declaratory Judgment brought by some of the biggest American retailers operating in Quebec, including Costco, The Gap, Walmart and Toys ’R US.
The questions at issue were framed
by the Court as follows:
[8] Dans ce contexte, se pose à nouveau ici la
question de la langue d’affichage, cette fois-ci au regard des marques de
commerce affichées dans une autre langue que le français.
[9] Les demanderesses souhaitent faire trancher
la question suivante : une marque de commerce de langue anglaise, sans
version française déposée, qu’on utilise dans l’affichage public et la
publicité commerciale, doit-elle être accompagnée d’un terme descriptif de
caractère générique (un générique) en français pour respecter la Charte de la langue française (la Charte) et le Règlement sur la langue du commerce et des affaires (le Règlement)? Cette question n’a donc rien à voir avec la
traduction en langue française des marques de commerce qui est un tout autre
sujet dont le Tribunal ne traite pas dans ce jugement.
[10] Pour ce faire, elles présentent une Requête
en jugement déclaratoire dont les conclusions principales se lisent
ainsi :
déclarer que, conformément au paragraphe 4 de l’article 25 du Règlement sur la langue du
commerce et des affaires, RRQ, c C-11, r 9, l’affichage d’une marque de commerce
uniquement dans une autre langue que le français est autorisé dans l’affichage
et dans la publicité commerciale et, en particulier, sur des enseignes de
devanture de magasin lorsqu’il n’existe aucune version française déposée de la
marque de commerce.
déclarer que l’affichage, par les demanderesses, de leurs marques de commerce
uniquement dans une autre langue que le français dans l’affichage et dans la
publicité commerciale, lorsqu’il n’existe aucune version française déposée de
la marque de commerce, ne contrevient pas à la Charte de la langue française ni au Règlement sur la langue du
commerce et des affaires, RRQ, c C-11, r 9.
déclarer que l’Office québécois de la langue française ne
peut suspendre, révoquer ou refuser de renouveler les certificats de
francisation des demanderesses, ni tenter d’imposer toute autre sanction, sur
le seul fondement que les demanderesses utilisent des marques de commerce, au
sens de la Loi sur les marques de commerce, dans leur
affichage et leur publicité commerciale uniquement dans une autre langue que le
français lorsqu’il n’existe aucune version française déposée de la marque de
commerce.
[Emphasis added, citations ommittted]
The case arose when the Petitioners
learned that the Office de la protection
de la langue francais (the “Office”) intended to start demanding the use of
a French version of their English trademarks on storefronts. This was a change
in the Office’s previous policy to tolerate such signage, and negotiations to
try to arrive at an agreement ensued.
These negotiations failed, and
between the end of 2011 and the beginning of 2012, the Office began a marketing
campaign to remind businesses that it was their obligation to ensure that there
was a French version of their trademarks when they intended to use it as store
signage. Certain Petitioners then began receiving notices from the Office warning
of potential penal sanctions if they did not comply with the office’s
interpretation of the law. Some of the Petitioners launched the present action,
but in the meantime, they received notices from the Office that their Franchisation certificates—a certificate
of compliance that the business operates in French that is necessary for any
business with more than 50 employees to operate—might be revoked.
The Attorney General of Quebec
raised various textual arguments based on the Charter and its regulations. In its analysis of those provisions,
the Court found that the law allowed the posting of an English-only sign when
that sign consisted of an English-only registered trademark:
[146] L’article 58 de la Charte établit que l’affichage public se fait en
français ou de façon nettement prédominante en français. Le terme affichage
s’utilise dans son sens usuel de visualisation, dans le but de faire connaître
au public par voie d’affiches publicitaires, un nom, un signe ou une identité.
[147] Le paragraphe 58(3) confie au gouvernement
le soin d’établir les cas ou les conditions où l’affichage public peut se faire
uniquement dans une autre langue que le français. En vertu du paragraphe
68(2) de la Charte, cette dérogation s’étend aux noms d’entreprise
dans l’affichage public dans la mesure où «cette autre langue peut, en
application de l’article 58 et des règlements édictés en vertu de cet
article, être utilisée dans cet affichage (…)».
[148] Or, le Règlement permet l’affichage d’une marque de commerce
utilisée dans une autre langue que le français, dans la mesure où cette marque
est reconnue au sens de la Loi sur les marques de commerce – ce qui est le cas dans le présent
dossier –, à moins qu’une version française en ait été
déposée – ce qui n’est pas le cas des marques de commerce détenues
par les demanderesses. Bref, rien ne permet de dissocier la marque de commerce
et les mots qui la composent pour assimiler ceux-ci à un nom d’entreprise au
sens de la Charte aux fins d’appliquer le paragraphe 27 du Règlement. Le texte est clair, la Charte permet l’affichage public des marques de
commerce sans égard à la langue des mots qui la composent dans le cas prévu à
l’alinéa 25(4o) du Règlement.
The Attorney General was
also arguing that the Charter
required that any business name be accompanied by a French modifier so as to
render it in conformity with the law. After reviewing the legislative history
of the provisions that defined what a business name was, the Court rejected
that argument as well, finding that trademarks were not encompassed in the
definition of business names:
[160] À la lumière de l’historique législatif de
la Charte et du Règlement, le Tribunal en vient à la conclusion que les
mots nom d’une entreprise et nom, qu’on retrouve aux articles pertinents
au dossier, soit les articles 58 et 63 ainsi qu’au paragraphe
68(2) de la Charte et aux paragraphes 25 et 27 du Règlement, ne désignent rien d’autre que les noms
d’entreprise au sens de la Loi sur la publicité légale des
entreprises et ne
comprennent pas, ni directement, ni par association, les marques de commerce.
[161] En corollaire, si une entreprise souhaite
utiliser à titre de nom d’entreprise une marque de commerce tirée d’une autre
langue que le français, elle devra l’accompagner d’un générique en français.
Mais cette question n’a rien à voir avec l’exposition publique d’une marque de
commerce dans le but de l’associer aux services offerts par l’entreprise.
The Court also found
that the Office’s own interpretation of the legislative provisions at issue
was, while not determinative, one that should not be derogated from so long as
that interpretation was consistent with the law. Accordingly, having permitted
the use of English trademarks on signage for 18 years, the Office could not now
change course, unless that permission turned out to have been in contravention
of the law:
[233] Le Tribunal retient donc de ce qui précède
que :
a) en 1998, des ambigüités dans les règles
d’affichage et dans l’enregistrement des «raisons sociales» amènent la ministre
responsable de la Charte à demander un avis au Conseil de la langue
française;
b) dans son avis du mois d’août 2000, le Conseil
de la langue française prend acte des difficultés d’ordre juridique que
l’affichage des marques de commerce en langue anglaise soulève et recommande de
procéder par incitation plutôt que par la voie coercitive, voire pénale;
c) alors que des entreprises, dont la plupart
des demanderesses, affichent publiquement au cours des années 1990 et 2000 des
marques de commerce dans une langue autre que le français sans l’appui d’un
générique en français, l’Office leur délivre des certificats de francisation et
permet leur renouvellement, reconnaissant implicitement que leur programme de
francisation est respecté au chapitre de l’affichage public;
d) durant près de 20 ans, l’affichage des
marques de commerce dans une langue autre que le français sans générique
français est non seulement toléré mais considéré par l’Office conforme à la Charte;
e) à compter de 2010, l’Office, fort de
l’interprétation qu’il donne maintenant des articles 63 et 68 de la Charte et des paragraphes 25 et 27 du Règlement, entreprend un virage qui l’amène à modifier sa
position sur l’affichage public des marques de commerce rédigées dans une autre
langue que le français pour exiger l’ajout d’un générique en français;
f) au cours du printemps et de l’été 2011, des
membres du Conseil canadien du commerce de détail, dont certains des
demanderesses, reçoivent des avis de l’Office leur demandant d’accompagner d’un
générique français les marques de commerce affichées dans une autre langue que
le français sur leurs devantures extérieures.
[234] En somme, l’alinéa 25(4o) du Règlement a reçu de l’Office le même traitement et a fait
l’objet de la même interprétation entre le moment de son entrée en vigueur en
1993 et 2011, soit pendant 18 ans. Cette interprétation s’inscrit donc dans la
durée, ne constitue pas une interprétation isolée et peut être qualifiée de
véritable usage interprétatif :
Si une loi se prête raisonnablement à
l’interprétation qui en a été donnée par l’usage, les tribunaux ne s’en
écarteront pas.
[235] Comme le souligne l’auteur P.-A. Côté, «la
raison de ce principe est évidente : un usage interprétatif fait naître
des attentes qui ne peuvent être trompées sans entraîner des préjudices parfois
graves». Et il ajoute : «Il faut donc un motif valable pour rejeter un
usage interprétatif qui n’est pas contraire au texte».
[236] Le corollaire est évidemment qu’on ne peut
pas permettre qu’une interprétation administrative contredise un texte
législatif clair. Par contre, elle peut apporter une «confirmation utile» à ce
qui se dégage de la disposition en question.
The Court concluded its
analysis as follows:
[258] Cela dit, ce n’est pas au Tribunal qu’il
revient de changer maintenant le cours des choses par la magie d’un jugement
déclaratoire alors que les textes législatifs et réglementaires sont clairs et
appuyés d’un usage interprétatif demeuré inchangé pendant deux décennies.
[259] Malgré les difficultés inhérentes au droit
des marques de commerce, un domaine de juridiction fédérale encadré par des
conventions internationales auxquelles le Canada souscrit, c’est au législateur
québécois qu’il appartient de montrer la voie s’il estime que le visage
linguistique français du Québec souffre d’une vague, voire d’une déferlante,
des marques de commerce de langue anglaise dans l’affichage public et
d’imposer, par la voie législative au besoin, les solutions qu’il juge
adéquates. Ce choix relève de la fonction politique et non du pouvoir
judiciaire.
[260] Pendant ce temps, rien n’empêche les
entreprises qui le souhaitent d’assortir les marques de commerce de langue
anglaise qu’elles affichent sur leur devanture d’un descriptif ou d’un slogan en
français à l’instar de ce que plusieurs font déjà sur une base volontaire,
concourant du même coup à la sauvegarde du visage linguistique français du
Québec.
So, for now, business as usual.
Reference: [2014] ABD 167
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