Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
Le 15 décembre dernier, je discutais avec vous de l'affaire dans l'affaire Société en commandite Adamax Immobilier c. Immobilier Soltron inc. (2010 QCCS 5613) dans laquelle l'Honorable juge Jacques R. Founier soulignait que l'on ne pouvait utiliser les pouvoirs dévolus par l'article 46 C.p.c. pour passer outre la volonté expresse du législateur. La récente décision de la Cour supérieure dans Développements Sudonord inc. c. Bergonzi (2014 QCCS 255) est dans la même veine, puisqu'elle indique que l'on ne peut, sous le couvert d'une injonction interlocutoire obtenir ce qui est essentiellement une saisie avant jugement.
Dans cette affaire, les Demandeurs instituent des procédures en injonction interlocutoire et permanente par lesquelles ils demandent, entre autres choses, au stade interlocutoire de déposer 20% des profits actuels et futurs d'une entreprise en fidéicommis.
Les Défendeurs ainsi que les Mis-en-cause demandent à la Cour de rejeter le recours des Demandeurs au motif que l’injonction n’est pas le moyen approprié pour obtenir paiement d’une somme d’argent ni pour tenter de la saisir avant jugement sans formuler spécifiquement une telle demande.
L'Honorable juge Suzanne Hardy-Lemieux accueille la requête en irrecevabilité des Défendeurs et des Mis-en-cause. Elle souligne à cet égard que le recours en injonction n'est pas le recours approprié en l'instance:
[18] Or, ces conclusions sont de nature injonctive. Le Tribunal doit examiner s’il est possible d’obtenir, par ce véhicule procédural, le dépôt des sommes d’argent requis par les demandeurs.
[19] Monsieur le juge Dufresne siégeant comme juge unique à la Cour d’appel mentionne que :
«[6] L’adoption des articles 54.1 C.p.c. et suivants en remplacement de l’article 75.1 C.p.c. ne change ni n’atténue la règle jurisprudentielle selon laquelle le juge saisi d’une requête en irrecevabilité pour absence de lien de droit (art. 165(4) C.p.c.) ne décide pas des chances de succès de la requérante.»
[20] Dans «L’injonction», les auteurs précisent que :
«En revanche, forcer le paiement d’une somme d’argent par injonction paraît assez aléatoire, particulièrement lorsque cela implique la reconnaissance d’une obligation par ailleurs contestée.»
[21] Dans Provident, compagnie d’assurance-vie et accidents c. Chabot, monsieur le juge Morissette rappelle que «l’injonction n’est pas le recours approprié pour obtenir le paiement d’une créance».
[22] Monsieur le juge Jean-Jacques Crôteau mentionne que :
«[15] Selon la preuve au dossier, la demande de la requérante porte sur une somme d’argent que l’intimé lui devrait. Il s’agit d’un recours personnel. Il est clairement établi par la jurisprudence qu’il ne peut être demandé par injonction le paiement d’une somme d’argent.»
[23] Les conclusions recherchées par les demandeurs peuvent aussi être assimilées à une saisie avant jugement en main tierce car ils requièrent que le pourcentage de la transaction qui leur appartiendrait soit versé dans un compte en fidéicommis de leur avocat. Ils demandent alors à la Cour de forcer ses débiteurs, qui nient devoir la somme réclamée, à quand même la déposer entre les mains d’une tierce personne.
[24] Monsieur le juge Richard précise, dans le cadre d’une ordonnance de sauvegarde, que :
«[43] En réalité, la demanderesse essaie par l’ordonnance de sauvegarde d’obtenir les effets du bénéfice d’une saisie avant jugement sans établir que sa créance ne soit en péril et sans passer par les formalités exigées par l’article 733 C.p.c. dans le cadre d’une telle saisie pour dire qu’il y a urgence en la matière.
[44] On ne saurait de façon détournée arriver au même résultat en demandant une ordonnance de sauvegarde.
[45] Cette façon de faire n’est rien d’autre qu’un processus pour court-circuiter le processus de la justice. Laissons les tribunaux statuer sur le bien ou le mal fondé des prétentions de la demanderesse, d’autant que la somme qu’elle prétend lui être due est conservée par elle, puisqu’elle a opéré, avec ou sans droit, la compensation dont il est question au présent jugement.
[46] De plus, l’injonction ne peut servir à obtenir un paiement immédiat d’une somme qu’on réclame.»
[...]
[28] De l’avis du Tribunal et en prenant en considération les principes déjà énoncés, il est clair que l’injonction n’est pas le recours approprié pour recouvrer des sommes d’argent dont l’exigibilité et la quotité sont contestées. Il ne l’est pas non plus lorsque d’autres recours existent pour en obtenir le paiement.
Commentaires:
Ainsi, les deux choix qui s'offrent à la personne qui désire obtenir le remède que recherchait les Demandeurs en l'instance sont la saisie avant jugement ou l'injonction de type mareva.
Référence: [2014] ABD 103
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