lundi 17 février 2014

On ne peut avoir recours à l'ordonnance de sauvegarde pour contourner les critères nécessaires à l'émission de l'injonction provisoire

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Nous en avons souvent discuté, l'ordonnance de sauvegarde répond en principe aux mêmes critères que l'injonction provisoire. Il existe cependant des décisions qui font preuve de plus de souplesse à l'égard des ordonnances de sauvegarde dans certaines circonstances (en plus du fait que l'ordonnance de sauvegarde peut être émise pour une période plus longue que 10 jours). Ainsi, certaines parties, au lieu de demander une injonction provisoire, demandent dès le début d'une instance l'émission d'une ordonnance de sauvegarde dans l'espoir d'avoir la tâche plus facile. Ce procédé m'apparaît incorrect. Heureusement, dans Bernard c. Gilbert (2014 QCCS 490), l'Honorable juge Alain Michaud vient indiquer qu'un tel procédé est à proscrire.
 

Dans cette affaire, le Demandeur recherche l'émission d'une ordonnance d'injonction provisoire contre les Défendeurs les enjoignant de « de publier, d’écrire, de propager, d’émettre ou de toute autre façon des propos sur ou en relation avec le demandeur Éric Bernard et ce, par quelque moyen que ce soit et sans restreindre la généralité de ce qui précède, par les médias sociaux, Internet, courriel, message texte… ou tout autre médium de communication ».

Après analyse, le juge Michaud est d'avis que le critère de l'urgence n'est pas satisfait en l'instance, le Demandeur ayant attendu trop longtemps avant d'instituer ses procédures. À ce chapitre, le juge Michaud ajoute que le Demandeur ne peut passer outre cette difficulté en demandant verbalement une ordonnance de sauvegarde au lieu d'une injonction provisoire:
[14]        Le traitement de la question de l’urgence ne peut non plus être allégé par la présentation de la même demande sous l’appellation d’une demande de sauvegarde : 
a)        puisqu’une demande d’émission d’une ordonnance d’injonction est une procédure exceptionnelle, et qu’il ne peut être question de créer, par une simple demande verbale d’ordonnance de sauvegarde, une procédure parallèle plus souple;  
b)        parce que, comme l’indique la juge St-Pierre dans l’arrêt Lavoie c. Vailles, l’urgence « constitue un critère essentiel à l’émission de toute mesure de sauvegarde : sans urgence, pas d’ordonnance »;  
c)         parce que l’ordonnance de sauvegarde - étant de la nature d’une injonction provisoire - ne peut être émise que dans des cas extrêmement urgents, et qu’en fonction des mêmes critères. 
[15]        Par ailleurs, il importe de préciser que le mécanisme d’ordonnance de sauvegarde, à la différence de la demande d’injonction visant à faire cesser un comportement, recherche habituellement deux types de mesures : on parlera de mesures conservatoires et administratives, dont le but est la gestion du litige, ou de mesures de redressement qui visent, dans les cas urgents et exceptionnels, à rétablir provisoirement l’équilibre des intérêts des parties.
Référence : [2014] ABD 68

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