vendredi 7 février 2014

Les critères relatifs à une demande de sursis d'exécution dans le cadre d'une requête en rétractation de jugement à la demande d'un tiers

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Dans certaines circonstances, le tiers qui demande la rétractation d'un jugement doit également demander le sursis de l'exécution de ce jugement pour que sa demande ne deviennent pas académique. Or, le législateur n'a pas édicté de critères spécifiques gouvernant une telle demande, de sorte que ceux-ci ont été développés par la jurisprudence. L'Honorable juge Pierre Ouellet en fait état dans Sheikh c. 657807 New Brunswick inc. (2014 QCCS 307).

Suite à un acquiescement total de la part des Défendeurs, le Demandeur obtient jugement au montant de 888 925,45$ contre ceux-ci. La Requérante, elle-même titulaire d'un jugement pour une somme importante contre un des Défendeurs, demande la rétractation de ce jugement. De plus, en attendant une décision sur cette demande, elle recherche le sursis d'exécution du jugement obtenu par le Demandeur.
C'est dans ce contexte que le juge Ouellet énonce les critères pertinents:
[10]        Selon l'article 489 C.p.c., la requête en rétractation de jugement à la demande d'un tiers n'opère pas sursis de l'exécution du jugement dont on recherche la rétractation à moins qu'un juge ne l'ordonne. 
[11]        Les motifs pouvant justifier une telle ordonnance n'ayant pas été spécifiés par le législateur, ils sont laissés à la discrétion du tribunal.  Donc, ce ne sont pas les mêmes critères que la demande de sursis qui est présentée dans le cadre d’un recours extraordinaire. 
[12]        Évidemment, cette discrétion doit être exercée judiciairement. Il s'agit en fait de préserver l'existence des droits des uns, avant que ne soient définitivement confirmés ceux des autres ou, en d'autres termes, de maintenir le statu quo de la situation en attendant une décision finale et tenter d'éviter de créer une situation de fait à caractère irréversible ou, dit autrement encore, d'établir une sorte d'équilibre entre les intérêts du tiers potentiellement affecté par le jugement original, ici la Fédération, et ceux qui pourraient être affectés par la rétractation et qui bénéficient déjà des avantages du jugement, ici le demandeur. 
[13]        Je me réfère au résumé de l’état du droit qu’a fait le juge Jean-François Gosselin, j.c.q. quant aux principes applicables en matière de sursis. 
[14]        En somme, pour avoir droit à une ordonnance de sursis dans le cadre d'une requête en rétractation de jugement à la demande d'un tiers, ce dernier doit : 
1.    Démontrer prima facie qu'il respecte les conditions d'ouverture du recours prévu à l'article 489 C.p.c., c’est-à-dire qu'il n'a pas été appelé dans l'instance visée et que le jugement dont il recherche la rétractation préjudicie à ses droits;  
2.    Que sans le prononcé d'une ordonnance de sursis, il y a risque de créer une situation de fait à caractère irréversible, voir un préjudice sérieux et irréparable.
Référence: [2014] ABD 56

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