Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
Un court billet ce matin pour répondre à une question qui m'est régulièrement posée: est-ce qu'on peut poursuivre un administrateur qui a décidé de mettre fin aux opérations d'une entreprise. L'Honorable juge Pierre Isabelle répond à cette question dans l'affaire Plaza Bellehumeur Holdings Ltd. c. 2072283 Canada inc. (2013 QCCS 6107).
Dans cette affaire, la Demanderesse institue des procédures dans lesquelles elle demande la résiliation du bail commercial intervenu avec la Défenderesse et une condamnation en dommages pour plus de 2 000 000$ contre elle et son administrateur.
La Défenderesse a cessé ses activités et ne comparait pas pour contester les procédures. Reste seulement la question de la responsabilité du Défendeur, actionnaire et administrateur unique de la Défenderesse. La Demanderesse recherche la responsabilité du Défendeur pour une multitude de raisons, dont le fait qu'il est celui qui a pris la décision de mettre fin aux activités de la Défenderesse.
Le juge Isabelle rejette sommairement cet argument, soulignant que n'est pas fautive en soi la décision par un administrateur de cesser les activités d'une compagnie:
[130] Dans la présente affaire, le seul élément pouvant constituer une faute personnelle de l'administrateur est celui de ne pas avoir informé le locateur de la fermeture de l'entreprise, de l'abandon des lieux et de ne pas avoir remis les locaux loués en état, tel que le prévoit le bail.
[131] Or, tel que le mentionne la Cour d'appel dans l'arrêt précité de Regor inc. c. Pro-Sag Mécanique inc.:
« (…) la cessation des activités de l'entreprise, ou son insolvabilité éventuelle, n'a pas pour effet de rendre les actionnaires et administrateurs débiteurs personnels d'une dette qu'ils n'avaient pas garantie en aucune façon, à défaut d'une faute de leur part, ce que le dossier ne démontre pas.»
[132] Ainsi, la fermeture de l'entreprise Marché Frais de Gatineau ne constitue pas une faute en soi. De cette décision découle nécessairement le fait d'abandonner les locaux loués et de ne plus se présenter sur les lieux. La présente situation ne correspond pas à la définition de déguerpissement au sens littéraire du terme. Il s'agit de l'abandon volontaire des lieux loués au bénéfice du locateur, tel que celui-ci l'exige dans l'action intentée contre la locataire.
[133] D'ailleurs, les dommages recherchés en raison de cette décision, laquelle se justifie dans le contexte de la relation entre les parties, découlent des obligations contractées dans le cadre du bail. Celui-ci prévoit l'obligation par la locataire de remettre les lieux en état à la fin du bail ou lors de la résiliation de celui-ci.
[134] Or, la locataire n'a pas les ressources financières nécessaires pour effectuer la remise en état des lieux, qui rappelons-le, a coûté à la demanderesse plus de 76 000 $. Jean-Luc Brazeau ne peut être tenu responsable des obligations contractuelles de la locataire, car l'administrateur d'une société par actions demeure à l'abri des conséquences pécuniaires du non-respect de toute obligation contractuelle de la part de la société.
[135] De plus, tous les dommages réclamés par la demanderesse sont de nature contractuelle. L'abandon des lieux au locateur et le refus ou l'impossibilité de la locataire de les remettre en état découlent des obligations contenues au bail.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/ISP9Di[136] Ainsi, la responsabilité extracontractuelle de Jean-Luc Brazeau n'est pas retenue dans la présente affaire.
Référence neutre: [2013] ABD 497
Autre décision citée dans le présent billet:
1. Regor inc. c. Pro-Sag Mécanique inc., J.E. 2001-631 (C.A.).
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