mardi 5 novembre 2013

Même si un bien est atteint de vices cachés, l'acheteur ne pourra obtenir la résolution de la vente que si les vices sont importants et ne peuvent aisément être réparés

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Le 7 octobre 2013, j'attirais votre attention sur une décision de la Cour du Québec qui indiquait qu'il revenait à l'acheteur d'un bien affecté de vices cachés de choisir son recours (dommages versus résolution de la vente). Or, je vous souligne aujourd'hui que si cela est parfaitement juste, reste que l'acheteur ne pourra obtenir la résolution de la vente et devra se contenter de dommages si les vices invoqués sont faciles à réparer et ne justifient pas la résolution de la vente comme le souligne l'affaire 9192-7392 Québec inc. c. Camions Lussicam Trans-Canada inc. (2013 QCCS 5422).
 

Dans cette affaire, la Demanderesse, jugeant que le camion qu'elle a acheté est affecté de vices cachés, demande la résolution de la vente du dit camion. La Défenderesse conteste ce recours pour plusieurs motifs, dont le fait que les vices invoqués peuvent être réparés et ne justifient donc pas la résolution de la vente.
 
Saisi de l'affaire, l'Honorable juge Louis Crête est d'avis qu'il existe effectivement des vices cachés affectant le camion, mais que ceux-ci ne sont pas assez importants pour justifier la résolution de la vente. Il accorde donc des dommages seulement à la Demanderesse:
[33] Quand il s’agit d’une demande de résolution d’une vente, ajoutons que : 
« La loi réserve le recours en résolution aux vices dont la gravité ou l’importance, par rapport à l’ensemble de la vente, justifie une sanction aussi sévère.  
La résolution entraîne non seulement la restitution du prix mais aussi, sans qu’on se pose de question, le remboursement des frais de notaire, d’arpenteur-géomètre, de déménagement, des taxes foncières, d’assurance-habitation, et autres. Le tribunal peut refuser la résolution demandée quand le vice est « de peu d’importance », selon la règle générale; l’acheteur doit alors se contenter de la réduction du prix et, éventuellement, des dommages-intérêts. 
Il s’agit alors d’un vice grave, en ce sens que l’acheteur « n’aurait pas donné si haut prix » s’il l’avait connu (article 1726), mais qui n’est tout de même pas assez sérieux pour justifier la résolution. » 
[34] Dans l’affaire Transport E.N.J. inc. c. Aubé, le juge Louis Rochette, alors à la Cour supérieure, laissait entendre que la résolution d’un contrat de vente pouvait être demandée quand « ce vice était majeur et rendait même périlleuse l’utilisation du camion »
[..­.] 
[57] S’il est vrai que le camion acquis par la demanderesse a pu être affecté de vices cachés, soit celui relatif au ventilateur (mai) et celui relatif à la transmission et l’embrayage (juin et septembre), en revanche, ces problèmes ne justifieraient pas le tribunal d’ordonner la résolution de la vente. En effet, les vices allégués pouvaient être corrigés et ils l’ont été. Ils n’ont pas mis en cause de façon significative l’utilité du véhicule ni sa sécurité. D’ailleurs, le camion de la demanderesse a pu effectuer de nombreux voyages vers la côte ouest américaine et le nombre de kilomètres parcourus ne mène nullement à la conclusion que le camion était affecté de vices cachés le rendant impropre à l’usage auquel il était destiné. Dans ce contexte, la résolution de la vente ne serait aucunement justifiée.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/19X1TmH

Référence neutre: [2013] ABD 441

Autre décision citée dans le présent billet:

1. Transport E.N.J. inc. c. Aubé, (2000) AZ-00021272 (C.S.).

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