Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
Règle générale, le législateur ne permet pas l'établissement d'ententes d'une valeur de plus de 1 500$ par preuve testimoniale. Il prévoit par ailleurs bon nombre d'exceptions à cette règle (commencement de preuve, acte passé dans le cours normal des activités d'une entreprise, etc.). Or, dans la mesure où une partie s'autorise d'une de ces exceptions pour faire la preuve testimoniale d'une entente quelconque, elle ne peut s'objecter à ce que la partie adverse fasse de la preuve testimoniale du contenu de la même entente. La Cour supérieure pose le principe dans l'affaire Plaisirs gastronomiques inc. c. Canards du Lac Brome ltée. (2013 QCCS 5832).
Dans cette affaire, la Demanderesse intente des procédures en dommages contre la Défenderesse, alléguant ne pas avoir été payée pour des marchandises vendues et devoir être dédommagée pour les coûts encourus avant que la Défenderesse résilie unilatéralement le contrat intervenu entre les parties.
Un débat survient à propos de l'allégation faite par la Défenderesse à l'effet que la Demanderesse se serait engagée à ne pas lui faire concurrence dans le contrat entre les parties. La Demanderesse s'objecte à cette preuve, plaidant que la preuve testimoniale d'un tel engagement n'est pas recevable en l'absence d'un écrit ou un commencement de preuve.
L'Honorable juge Charles Ouellet rejette cette objection, étant d'avis qu'il s'agit d'un acte passé dans le cours des activités de la Demanderesse. Qui plus est, le juge Ouellet souligne que la Demanderesse elle-même a fait la preuve testimoniale du contenu de son entente avec la Défenderesse, de sorte qu'elle ne peut s'objecter à la preuve testimoniale de la même entente qu'entend faire cette dernière:
[10] À l’audience, Plaisirs Gastronomiques s’est objectée à la preuve de son engagement à ne pas concurrencer sa cliente Canards du Lac Brome, engagement dont elle conteste l’existence, alléguant sa non-pertinence au débat. Le Tribunal a rejeté cette objection séance tenante, au motif que Canards du Lac Brome entend plaider que c’est en raison de la violation par Plaisirs Gastronomiques de cet engagement qu’elle a mis fin à son contrat avec cette dernière.
[11] Dans ses notes et autorités produites après l’audience, Plaisirs Gastronomiques soutient ensuite que l’engagement de non-concurrence ne pouvait être prouvé par preuve testimoniale puisqu’il excède en valeur 1 500 $ et qu’il n’aurait pas été passé dans le cours des activités de son entreprise (2862 C.c.Q.). Cet engagement entrerait selon elle dans la catégorie des « contrats accessoires qui interviennent occasionnellement pour le service et l’exploitation d’une entreprise (qui ne peuvent pas être prouvés par témoignage) ».
[12] Ce second motif d’objection est mal fondé lui aussi.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/Izt38v[13] Il ne fait pas de doute que le contrat intervenu a été conclu par Plaisirs Gastronomiques dans le cours des activités de son entreprise, laquelle consiste justement à transformer des produits alimentaires en vue de la consommation au détail. Il n’est pas ici question d’un contrat accessoire aux activités de l’entreprise du type de ceux qui sont conclus « occasionnellement pour favoriser la formation, l’établissement ou le développement d’une entreprise » tel par exemple l’achat d’un fonds de commerce, la location d’un local ou l’emprunt de capital en vue d’exploiter une entreprise. Rappelons aussi que c’est la demanderesse qui avait le fardeau de prouver le contrat sur lequel repose sa réclamation, et qu’elle a entrepris de faire cette preuve par témoin elle-même. Elle ne peut s’objecter à ce que la partie adverse tente d’établir elle aussi le contenu de ce contrat par preuve testimoniale.
Référence neutre: [2013] ABD 478
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