jeudi 5 septembre 2013

Les recours en dommages dirigé contre un avocat pour diffamation quant au contenu de procédures se prescrit par un an de la date du jugement final lorsque l'on allègue également que les procédures étaient abusives

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'action en diffamation, on le sait, se prescrit par un an en vertu de l'article 2929 C.c.Q. Ainsi, en principe, lorsqu'une partie désire intenter un recours en diffamation contre un avocat pour sa rédaction de procédures judiciaires, il devrait le faire dans l'année du dépôt de ces procédures. Cependant, comme le souligne l'Honorable juge Jean-François Michaud dans Polachek c. Caron (2013 QCCS 4144) ce délai commence à courir seulement une fois le jugement final rendu lorsqu'on allègue non seulement diffamation, mais aussi procédures abusives.


Dans cette affaire, les Demandeurs intentent des procédures en dommages contre les Défendeurs, qui agissaient comme procureurs d’un syndic à la faillite, au motif qu'ils auraient rédigé des allégations fausses et diffamatoires dans des procédures judiciaires que les Demandeurs qualifient d’abusives. Les Demandeurs réclament donc des dommages moraux, des dommages punitifs, le remboursement des honoraires encourus pour contester ces procédures et 5 029 552 $ au motif que ces procédures auraient fait échouer un projet immobilier.

La première question qui se pose est celle de la prescription du recours en diffamation. En effet, ce recours est intenté presque trois ans après que les allégations que les Demandeurs jugent diffamatoires aient été introduites.
 
Le juge Michaud rejette le moyen fondé sur la prescription, soulignant que lorsqu'on allègue diffamation et abus de procédure, la prescription commence à courir à partir de la date du jugement final et non de l'introduction des procédures:
[91]       Le Tribunal est néanmoins d’avis que le recours des Polachek n’est pas prescrit. En effet, lorsque les propos diffamatoires sont contenus dans un acte de procédure que l’on qualifie également d’abusif, la Cour d’appel a statué que le point de départ de la prescription court du jour où le jugement final est rendu : 
[8]  Il n’aurait pas été pour autant prématuré d’intenter un recours avant la date du jugement final, mais le point de départ de la prescription court du jour où le jugement final est rendu lorsque le recours en dommages est non seulement un recours en diffamation mais également un recours pour abus de procédure. 
[92]       Le juge Guibault a également indiqué aux demandeurs qu’ils devaient attendre le jugement final avant d’entreprendre un recours contre le syndic, ce qui est tout aussi vrai pour Me Caron : 
[14]  Ainsi, il sera toujours loisible aux requérants d’entreprendre un tel recours, si à la suite du jugement au mérite qui sera prononcé sur la requête du syndic, il s’avère qu’aucun des éléments de la requête n’a pu être établi et que suivant le tribunal qui prononcera un tel jugement, le recours était abusif dilatoire et entrepris de mauvaise foi de la part du syndic, dans le seul but de causer un dommages à la réputation des requérants. 
[93]       Comme le jugement final a été rendu le 3 août 2006 par le juge Silcoff et que l’action des demandeurs a été intentée le 8 juin 2007, le recours des demandeurs n’est pas prescrit.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/17euGAO

Référence neutre: [2013] ABD 356

Autre décision citée dans le présent billet:

1. Bourassa c. Del Rio-Abarca, 2005 QCCA 389.

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