mercredi 14 août 2013

Pour les fins d'une exception déclinatoire, le juge doit tenir les faits allégués à la requête introductive d'instance pour avérés

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Pour les fins de certains moyens préliminaires, la partie demanderesse bénéficie d'un avantage important puisque la Cour devra tenir les faits allégués pour avérés. C'est le cas dans le cadre de l'analyse d'une demande de changement de district, où le juge saisi de l'exception déclinatoire devra prendre les faits pour avérés et ne devra pas se saisir du fond de l'affaire comme le souligne l'Honorable juge Guy Gagnon dans Corporation Capital Kilkenny c. IOS Services géoscientifiques inc. (2013 QCCA 1354).


Dans cette affaire, la Requérante sollicite la permission d'en appeler d'un jugement qui a rejetté sa demande de transfert de district judiciaire de celui de Chicoutimi vers celui de Laval. La Requérante fait valoir que, contrairement à ce que l'Intimée allègue dans sa requête introductive d'instance, aucun contrat n'est intervenu entre les parties et que le juge aurait donc dû se rabattre sur la règle du domicile de la partie défenderesse.
 
Le juge Gagnon refuse d'accorder la permission d'en appeler, ne voyant pas d'erreur dans le jugement de première instance. À ce chapitre, il souligne que c'est à bon droit que le juge de première instance a pris les faits allégués pour avérés:
[5] L'existence d'un contrat intervenu entre les parties constitue l'enjeu principal du débat qui les oppose en première instance. La requérante plaide qu'elle n'a pas pu exposer pleinement sa thèse puisque le juge a décidé de tenir pour avérés les faits allégués de la requête introductive d'instance, la privant ainsi de sa capacité de contester le lien juridique invoqué par l'intimée. 
[6] Retenir la logique de la requérante reviendrait à inviter le juge saisi de la requête à apprécier prématurément son principal argument de fond visant à obtenir le rejet de l'action, soit l'inexistence du contrat, et ce, en vue de trancher l'exception déclinatoire ratione loci. Cette proposition, si elle était acceptée, déboucherait ni plus ni moins sur l'obligation de tenir deux procès pour la même cause d'action. 
[7] Dans l'arrêt Spar Aerospace Ltée c. American Mobile Satellite Corp., la Cour suprême précise le rôle du juge saisi d'un moyen déclinatoire : 
31. […] Pour contester la compétence dans le cadre d'une requête préliminaire, il faut demander le rejet de la demande en présentant une requête en exception déclinatoire conformément à l'art. 163 C.p.c. Selon la jurisprudence, le juge saisi de ce genre de requête n'a pas à se prononcer sur le fond du litige, mais doit plutôt tenir pour avérés les faits que le demandeur allègue pour que la compétence des tribunaux du Québec soit reconnue (voir Air Canada c. McDonnell Douglas Corp., [1989] 1 R.C.S. 1554, p. 1558; et Rosdev Investments Inc. c. Allstate Insurance Co. of Canada, [1994] R.J.Q. 2966 (C.S.), p. 2968).  
[Je souligne] 
[8] Notre Cour avait aussi décidé que « [p]our statuer sur la requête déclinatoire de compétence, il faut examiner les allégations de la requête introductive d'instance lesquelles sont tenues pour avérées ».
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/16LbvNG

Référence neutre: [2013] ABD 323
 

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