lundi 12 août 2013

L'urgence est un critère en matière d'ordonnance de sauvegarde, même en matière d'ennuis causés par le bruit

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

S'il est indéniable que les circonstances propres à chaque affaire peuvent amener les tribunaux québécois à moduler leur analyse des critères traditionnels afférents à l'ordonnance de sauvegarde, reste que ces critères s'appliquent à tous les domaines. Par exemple, comme le souligne l'Honorable juge Thomas M. Davis dans Hilinski c. Robert (2013 QCCS 3782), le critère de l'urgence s'applique même en matière d'ennuis causés par le bruit.


Dans cette affaire, les Demandeurs recherchent une ordonnance de sauvegarde en relation avec des bruits qui émanent d’un garage ou atelier qui est situé sur la ferme appartenant aux Défendeurs. Le hic est que leurs procédures judiciaires ont été déposées en août 2011 et que la demande d'ordonnance de sauvegarde dont le juge Davis est saisie est la première à être présentée.
 
Pour pallier à ce problème d'apparence insurmontable au niveau de l'urgence, le procureur des Demandeurs fait valoir, se basant sur une décision de la Cour d'appel, qu'en matière d'ennuis causés par le bruit le critère de l'urgence est inapplicable. Le juge Davis rejette cette prétention:
[14] En regardant dans un premier temps le critère d’urgence, les demandeurs soutiennent qu’en matière d’ennui causé par le bruit, l’urgence n’est pas un critère que le Tribunal doit nécessairement retenir.  
[15] Il réfère le Tribunal au jugement de cette cour dans l’affaire Ville de Ste-Anne-des-Plaines c. Collabella et al. 
[16] Dans cette affaire, les citoyens se plaignaient du bruit causé par un centre de tir et le juge Forget, alors à cette cour s’est exprimé comme suit : 
« Toutefois, en matière de pollution, ce principe peut vraiment être appliqué surtout si l’infraction alléguée se poursuit. Nul ne peut prétendre à un droit de continuer à polluer puisqu’on l’a longtemps toléré.» 
[17] Toutefois, ce paragraphe doit être lu avec les paragraphes 64 et 65 de ce même jugement.  
[18] Au paragraphe 64, le juge Forget s’exprime ainsi :  
Il est vrai que l’honorable juge Beaudoin a fait de cette question un motif secondaire à sa décision dans l’arrêt Gagné c. William :  
« Ce sont là donc deux motifs qui me paraissent suffisants pour rejeter le rappel principal. J’en ajouterais un autre. Malgré l’urgence alléguée au soutien de l’injonction interlocutoire, quelque trente-deux mois se sont écoulés, sans que le lien ne soit fait sur la demande principale. Le caractère d’urgence me semble donc, pour le moins qu’on puisse dire, sérieusement mis en doute. »  
Dans cette affaire, selon le juge de première instance et selon la Cour d’Appel, le requérant n’avait pas établi une apparence sérieuse de droit et la prépondérance des inconvénients favorisait l’intimé. De plus, le juge Beaudoin reproche surtout aux requérants de ne pas faire progresser son dossier sur la demande d’injonction permanente. 
[19] Dans le présent dossier, le délai entre la demande initiale et la présentation de la demande d’ordonnance de sauvegarde est presque deux ans. Il est aussi démontré par les affirmations solennelles que les parties sont voisines depuis longue date et que les activités en question sur la ferme ont toujours été pratiquées.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/19dWPc6

Référence neutre: [2013] ABD 319
 

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