mercredi 27 février 2013

On ne peut demander le rejet préliminaire pour cause d'irrecevabilité d'une action au motif que la preuve d'une entente de plus de 1500$ ne peut se faire par voie de preuve testimoniale

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

L'article 2862 du Code civil du Québec prévoit qu'on ne peut faire la preuve d'une entente de plus de 1500$ par preuve testimoniale sauf s'il existe un commencement de preuve ou si l'acte est passé dans le cours des activités d'un entreprise. Cependant, comme le souligne l'Honorable juge Denis Jacques dans Leigh c. Oleotek inc. (2013 QCCS 552), il s'agit là d'une règle de preuve et non de recevabilité, de telle sorte qu'on ne peut demander le rejet préliminaire pour cause d'irrecevabilité d'une action au motif qu'elle allègue une entente verbale d'une valeur de plus de 1500$.


La Demanderesse dépose une requête introductive d'instance en homologation d'une transaction qui serait survenue lors d'une séance de médiation. Il s'agirait d'une entente verbale.
 
La Défenderesse dépose une requête en irrecevabilité basée, entre autres motifs, sur le fait que la preuve d'une telle entente ne peut être faite par voie testimoniale.

Le juge Jacques rejette cette requête, soulignant qu'il ne peut préjuger à ce stade de la preuve qui sera faite par la Demanderesse quant à l'existence d'un commencement de preuve:
[10] La défenderesse invoque l’article 2862 du Code civil du Québecqui interdit la preuve testimoniale si la valeur du litige excède 1500 $, sauf s’il y a un commencement de preuve ou si l’acte juridique est conclu dans le cours des activités d’une entreprise. 
[11] Or, l’article 2865 du Code civil du Québec établit que le commencement de preuve peut résulter d’un aveu ou d’un écrit émanant de la partie adverse, de son témoignage ou de la présentation d’un élément matériel lorsque tel moyen rend vraisemblable le fait allégué. 
[12] Dans le contexte, le Tribunal ne peut présumer, à cette étape, des moyens de preuve de la demanderesse à l’enquête sur le fond. 
[13] Ce moyen soulevé ici à l’encontre de la requête constitue davantage une objection à la preuve, laquelle est prématurée à cette étape. 
[14] Il appartiendra au juge saisi du fond du dossier d’appliquer les règles de preuve lors de l’enquête.  
[15] Ainsi, le deuxième moyen d’irrecevabilité soulevé par la défenderesse est aussi mal fondé et doit être rejeté.
Commentaire:

Est-ce dire qu'on ne pourrait jamais faire rejeter, avant procès, une action sur la base de l'article 2862 C.c.Q.? Pas nécessairement.
 
Il est certes très difficile de voir comment l'on pourrait obtenir le rejet en vertu de l'article 165(4) C.p.c. puisque la Cour doit se limiter aux allégations de la requête introductive d'instance et aux pièces en demande dans ce contexte.
 
Cependant, il est concevable que l'on pourrait, après la tenue des interrogatoires préalables de part et d'autre et de la communication complète de la preuve, se baser sur l'article 54.1 C.p.c. pour plaider que l'action est manifestement mal fondée. Pour se faire, il faudrait convaincre un juge qu'il est tout simplement impossible, à l'égard de la preuve, que la partie demanderesse établisse un commencement de preuve. J'admets d'emblée que c'est toute une commande, mais ce n'est pas impossible.

Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/15QF2q5

Référence neutre: [2013] ABD 84

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