lundi 11 février 2013

Les conséquences de la signature d'un contrat stipulé au nom d'une compagnie qui n'existe pas

par Karim Renno
Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.

Contrairement à une certaine croyance populaire, il est tout à fait possible pour une personne physique d'utiliser un nom d'affaires (voir par exemple la décision de la Cour d'appel dans Restaurant la Passerine Inc. c. Schwartz Levitsky Feldman Inc., 2003 CanLII 39322 et l'article 21 de la Loi sur la publicité légale des entreprises). Il n'y a donc rien de fautif dans le fait de signer une entente au nom d'une compagnie qui n'existe pas juridiquement. La conséquence est par ailleurs que la personne qui utilise ce nom sera responsable personnellement des obligations, puisqu'il ne peut y avoir de voile corporatif en les circonstances comme le souligne l'affaire Consultants de l'Arctique inc. c. Saviadjuk (2013 QCCQ 585).


En défense à une action sur compte, le Défendeur fait valoir qu'il n'existe pas de lien de droit entre les parties puisque les factures sont libellés au nom d'une compagnie et pas lui personnellement.
 
S'il est vrai que les factures sont libellées au nom d'une compagnie, l'Honorable juge Sylvain Coutlée note que celle-ci n'existe pas et qu'il s'agit tout simplement d'un nom sous lequel le Défendeur fait affaire. Il en découle comme conséquence que le Défendeur est personnellement responsable:
[5] Le défendeur soulève un autre moyen de défense. Il allègue que le présent recours lui est inopposable au motif que la facture est libellée au nom d'une compagnie alors que le présent recours est dirigé contre monsieur Paulusie Saviadjuk personnellement. La Cour d'appel a déjà décidé qu'un tel recours est opposable au tiers lorsque l'entreprise sous laquelle le défendeur prétend faire affaires est, dans les faits, inexistante. 
[6] Dans l'affaire Investissement Ponari mondial inc. c. Yehuda Mordehay,la Cour s'exprime ainsi :
[1] L'intimé faisait affaire sous le nom d'Astro Construction inc. Le problème est que cette société était inexistante. De fait, elle n'a jamais existé. 
[2] La personne qui signe un contrat se lie personnellement. Si elle déclare signer pour une autre, encore faut-il qu'elle ait le pouvoir de le faire, sinon on revient à la première règle, elle est liée personnellement. 
[3] L'article 320 du Code civil du Québec constitue une application de ce principe : 
Art.320. Celui qui agit pour une personne morale avant qu'elle ne soit constituée est tenu des obligations ainsi contractées, à moins que le contrat ne stipule autrement et ne mentionne la possibilité que la personne morale ne soit pas constituée ou n'assume pas les obligations ainsi souscrites. 
[4] On le retrouve également affirmé dans l'arrêt Bélanger c. Lacaille[1]où la juge Mailhot de notre Cour écrivait pour la majorité :
«En agissant au nom d'une compagnie inexistante, Bélanger a engagé sa responsabilité personnelle »
[7] Dans ces circonstances, la présente réclamation est opposable au défendeur.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/X31k11

Référence neutre: [2013] ABD 59

Autre décision citée dans le présent billet:

Aucun commentaire:

Publier un commentaire

Notre équipe vous encourage fortement à partager avec nous et nos lecteurs vos commentaires et impressions afin d'alimenter les discussions à propos de nos billets. Cependant, afin d'éviter les abus et les dérapages, veuillez noter que tout commentaire devra être approuvé par un modérateur avant d'être publié et que nous conservons l'entière discrétion de ne pas publier tout commentaire jugé inapproprié.