Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
Ce qui est admissible à titre de contre-preuve n'est pas toujours simple à cerner. En effet, il est interdit à une partie demanderesse de scinder sa preuve en deux, de sorte que l'on ne pourra présenter en contre-preuve des éléments que l'on savait (ou aurait du savoir) seraient nécessaires à l'établissement d'un droit en demande comme le souligne la Cour supérieure dans Pelchat c. Zone 3 inc. (2013 QCCS 78).
Dans cette affaire, les Défenderesses s'objectent à ce que les Demandeurs présentent certains éléments de preuve lors de lors contre-preuve, faisant valoir qu'ils aurait du être présentés en preuve principale.
Saisi de la question, l'Honorable juge Daniel W. Payette leur donne raison et souligne qu'une partie demanderesse ne peut attendre la contre-preuve pour présenter des éléments qu'elle savait importants pour établir son droit:
[218] En contre-preuve, les demandeurs présentent Mme Josée Vermette (« Vermette »)pour qu’elle témoigne sur « la fréquentation du Salon Marcel Pelchat par Boutin, sa connaissance des émissions Look, sa contribution à la chronique beauté de Pelchat dans le cadre de l’émission De toutes les couleurs et le fait qu’elle connaissait tout à fait le statut de vedette télévisuelle de Marcel Pelchat ».
[219] Les défendeurs s’y objectent. Ils font valoir que les demandeurs ont eu l’occasion de traiter de ces sujets en preuve principale et que la preuve de la défense qu’ils entendent ainsi contrer était raisonnablement prévisible. Pour eux, les demandeurs tentent de scinder leur preuve.
[220] Après avoir brièvement soutenu le contraire, les demandeurs conviennent que le témoignage de Vermette ne satisfait pas les critères d’admissibilité de la contre-preuve. Ils demandent plutôt au Tribunal de le permettre en usant de la discrétion que lui confère le dernier alinéa de l’article 289 C.p.c.
[221] Il est vrai que cette disposition autorise le Tribunal, à sa discrétion, à permettre« l’interrogatoire d’autres témoins ». Cependant, ce pouvoir discrétionnaire doit être exercé judiciairement.
[222] La connaissance du demandeur et de son travail par Boutin est au cœur du litige. Les demandeurs en font état dans leurs procédures comme du fait que Boutin aurait fréquenté le Salon Marcel Pelchat entre 1992 et 1994.
[223] En preuve principale, ils ont d’ailleurs produit l’interrogatoire hors cour de Normand Grenier (« Grenier »), qui porte sur ce sujet, en plus de faire entendre Pelchat lui-même. Ils ont aussi contre-interrogé Boutin qui n’a fait que confirmer son témoignage en cette matière rendu hors cour le 17 mars 2006, ce dont le procureur des demandeurs convient.
[224] Le témoignage de Vermette sur ces questions à l’intérieur de la preuve principale est annoncé depuis fort longtemps et a été confirmé jusqu’au début du procès. Il ne s’agit donc pas d’une preuve nouvelle. De fait, Vermette apparaissait sur la liste des témoins devant être entendus en preuve principale jusqu’au neuvième jour d’audition, auquel moment le procureur des demandeurs a avisé le Tribunal qu’il n’entendait plus la faire comparaître.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/Tn8D83[225] En l’espèce, les demandeurs n’offrent au Tribunal aucun motif qui donne ouverture à ce témoignage en contre-preuve. Il s’agit d’un élément de preuve dont ils disposaient et qu’ils ont décidé de ne pas soumettre en preuve principale. Maintenant que Boutin a témoigné et malgré qu’elle n’ajoute pas d’élément nouveau sur les questions dont Vermette doit témoigner, les demandeurs désirent renforcer leur preuve. Si cela est interdit en contre-preuve, le Tribunal ne voit pas comment il l’autoriserait par le biais de l’article 289 C.p.c. L’objection est donc maintenue et le témoignage de Vermette, écarté.
Référence neutre: [2013] ABD 34
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