Irving Mitchell Kalichman s.e.n.c.r.l.
Chers employeurs, écoutez-nous et cessez d'inclure dans vos contrats d'emploi pour le Québec des clauses qui fixent le préavis de terminaison payable à vos employés en cas de résiliation unilatérale et sans cause du contrat d'emploi par l'employeur. En effet, comme nous l'avons déjà souligné, ces clauses ne sont pas opposables aux employés (voir http://bit.ly/10cE58T), mais ils peuvent s'en prévaloir s'ils le veulent (voir http://bit.ly/100fGGa). Peu importe la situation, vous n'en sortez pas gagnant. La décision récente dans l'affaire Legault c. Homag Canada inc. (2012 QCCS 6387) illustre bien le principe.
La question qui se pose en l'instance est celle de savoir quel est le montant du délai-congé auquel le Demandeur a droit suite à la terminaison de son lien d'emploi avec la Défenderesse. Cette dernière a effectivement unilatéralement résiliée son contrat d'emploi sans cause.
Le contrat en question prévoit une clause qui fixe l'indemnité de départ payable au Demandeur dans une telle circonstance. L'Honorable juge Carole Julien souligne qu'une telle clause est inopposable à l'employé si elle ne respecte pas les exigences du Code civil du Québec (i.e. un préavis raisonnable), mais souligne également que rien ne s'oppose à ce que l'employé s'en prévale, comme c'est le cas en l'instance:
[15] Les parties sont liées par un contrat d'emploi à durée indéterminée. L’employé congédié sans cause juste et suffisante a droit à un délai congé raisonnable ou à une indemnité qui en tient lieu selon les articles 2091 et 2092 C.c.Q. qui se lisent comme suit :
Art. 2091 Chacune des parties à un contrat à durée indéterminée peut y mettre fin en donnant à l'autre un délai de congé.
Le délai de congé doit être raisonnable et tenir compte, notamment, de la nature de l'emploi, des circonstances particulières dans lesquelles il s'exerce et de la durée de la prestation de travail.
Art. 2092 Le salarié ne peut renoncer au droit qu'il a d'obtenir une indemnité en réparation du préjudice qu'il subit, lorsque le délai de congé est insuffisant ou que la résiliation est faite de manière abusive.
[16] Dans un tel contexte, le droit de résiliation du contrat est unilatéral et discrétionnaire.
[17] Ces dispositions sont d’ordre public.
[18] L’existence d’un contrat entre les parties et comportant des dispositions en cas de terminaison d’emploi ne fait pas obstacle à l’application de ces dispositions du Code civil du Québec s’il n’en respecte pas les principes notamment quant au caractère raisonnable de l’indemnité versée.
Commentaire:[19] En l’espèce, le contrat liant les parties prévoit le versement au demandeur d’un préavis de six mois et d’une indemnité correspondant à un mois de revenu (« income ») par année de services débutant en 1995. C’est dire que le demandeur a droit à 22 mois de revenus suite à son congédiement, ce sur quoi les parties s’entendent au moment du procès.
J'anticipe déjà votre question: pourquoi est-ce que les employeurs continuent à prévoir de telles clauses dans leurs contrats d'emplois québécois? Quatre raisons:
(1) dans certains cas, les employeurs ne connaissent pas le droit québécois sur la question et ils croient erronément que de telles clauses limitent leur risque;
(2) certains employeurs, pour des raisons administratives, veulent utiliser le même modèle de contrat dans toutes les juridictions et ils ne souhaitent pas changer leur contrat pour le Québec nonobstant le désavantage que créent ces clauses pour eux;
(3) d'autres employeurs sont parfaitement conscients du désavantage qui résulte d'une clause similaire, mais certains employés clés ont un pouvoir de négociation tel qu'ils obtiennent une clause de ce type; ou
(4) finalement, certains employeurs connaissent très bien le droit québécois sur la question, mais comptent sur le fait que les employés congédiés ne s'informeront pas quant à leurs droits et accepteront de recevoir seulement ce qui est prévu au contrat, croyant que c'est le maximum qu'ils peuvent obtenir.
Reste que, personnellement, je recommande fortement aux employeurs de ne pas inclure de telles clauses dans leurs contrats québécois.
Le texte intégral du jugement est disponible ici: http://bit.ly/S9ixta
Référence neutre: [2013] ABD 7
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